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"La nuit est une grande cité endormie", Philippe Jaccotet.

Par   •  4 Juin 2018  •  2 561 Mots (11 Pages)  •  900 Vues

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ces « yeux » vont jouer un rôle important.

Finalement, après avoir regardé brièvement le poème de Philippe Jaccottet, le lecteur peut se sentir perdu, ne pas comprendre le propos du poète. Nous l’avons vu, le poète cherche même à créer ce sentiment en utilisant des termes ambivalents. Cependant, on peut remarquer qu’un élément reste présent tout au long du poème, celui du vent. Bien entendu, ce « vent » est défini lui aussi selon plusieurs mots. Le mot « appel » est lui aussi utilisé. Quel est donc ce vent, cet appel dont essaie de nous parler le poète. Il est possible que le poète tente de parler d’une notion difficile à définir. C’est entre autre pour cela que le lecteur peut, à première vue, ne pas comprendre les propos du poète.

II) Un poème comme tentative de dire l’indicible?

a) Un thème difficile à saisir

Au vers 9, l’adverbe exclamatif « combien » insiste sur la difficulté que le poète a à s’exprimer. Il ne peut verbaliser tout ce qu’il a dans sa tête. Il apparaît impuissant devant la grandeur du sujet qu’il veut traiter. Il doit affronter cette difficulté. Le sujet qu’il traite a l’air d’être très ambitieux. Plusieurs éléments viennent souligner l’ambition du poème. Par exemple, l’oxymore « bords infinis » au vers 4. Les bords ne sont pas sans rappeler «ce lit » situé dans le vers précédent. Cependant, les repères sont détruits. Il n y a plus de limites. Le poète est donc sans repères. On peut faire le parallèle de ce poète sans repères avec l’image de la nuit exploitée aussi dans le poème. Le poème pousse donc le lecteur dans un territoire inconnu, vertigineux, infini, obscur, effrayant.

Cependant, Jaccottet, à plusieurs reprises tente d’annuler ce sentiment. En opposition à l’inconnu, il place de nombreux éléments qui peuvent apparaître comme rassurant pour le lecteur comme « le lit », « le noisetier », « la grande cité endormie », « au coin des rues ». Ces éléments familiers sont donc des points de repères, des moyens de rassurer le lecteur face à la difficulté du sujet. De la même manière, « l’appel » mystérieux du vers 5 est défini ainsi « Viens cet appel qui se rapproche et se retire ».Cette image rappelle au lecteur le mouvement de la mer et de ses vagues, image calme et rassurante. De plus, le fait que l’appel se « rapproche et se retire » insiste sur la difficulté de le saisir. Le préfixe itératif « re » (ou « r ») insiste sur la répétition inéluctable de ce mouvement.

b) Une parole poétique chamboulée

Face à cette difficulté, la parole de Jaccottet apparaît comme originale. La difficulté de s’exprimer sur ce sujet est aussi transmise par la construction du poème. De fait, on peut remarquer de nombreux rejets, mais aussi des points de suspensions au vers 2 et 10 qui forcent le lecteur à l’interprétation, qui ajoute au mystère et qui insiste sur la difficulté de s’exprimer. Le poète essaie de dire l’indicible. D’ailleurs, la parenthèse présente au vers 9 et 10 semble apparaître comme une remise en cause de l’auteur, une réflexion. On a l’impression que Jaccottet semble douter de sa tentative de définition antérieure. Il a du mal à se concentrer, à garder un fil narratif clair.

Le poète a du mal à rester clair. Les vers 5 à 8 sont constitués d’une proposition principale « vient cet appel », de deux propositions relatives « qui se rapproche » et « qui tournoie », d’une proposition juxtaposée « on jurerait » et de la proposition incise « dit-on ». Cette construction complexe est révélatrice de la difficulté que le poète peut avoir pour essayer de se faire comprendre par le lecteur. Cependant, Jaccottet, ne renonce pas comme l’indique le « mais » du vers 10. Ce « mais » traduit la réaction du poète. Le poète tente de reprendre le contrôle de son langage. Cette conjonction de coordination est d’ailleurs suivi par la formule restrictive « ce n’est que » qui montre que le poète parvient à définir clairement et à rassurer encore une fois son lecteur.

c) les multiples définitions de « l’appel »

On remarque qu’au début du poème, Jaccottet nous parle d’un « vent ». Ce vent est personnifié par le pronom « il » au vers 2. Le déplacement du vent est d’ailleurs mis en valeur aussi grâce aux indications spatiales « de loin » et « jusqu’à ». C’est un souffle fort, qui ne s’arrête pas. De plus la préposition « jusqu’à » souligne un effet d’attente car elle est en position d’enjambement. C’est donc un vent mystérieux, puissant. Il est aussi montré comme un élément inquiétant qui vient se glisser dans « le lit » symbole de repère, et de sécurité. Ce même vent « secoue » aussi le noisetier, symbole familier. C’est donc un élément effrayant, perturbateur aux premiers abords.

Jaccottet n’emploie plus le terme de « vent » pendant le reste du poème. Cependant, il commence à évoquer un appel. « Vient cet appel » au vers 5 insiste sur le caractère étrange de ce vent. Le démonstratif « cet » souligne son caractère inconnu et le verbe venir qui est antéposé à son sujet permet de mettre ce sujet en évidence. Encore une fois, le terme est assez inquiétant car il n’est pas du tout défini. On ne sait que peu de choses sur cet appel.

Enfin, Jaccottet finit par définir cet appel comme « l’effraie » au vers 11. Cet animal permet déjà de rassurer le lecteur. Il peut enfin identifier. Néanmoins, comme nous l’avons vu dans l’introduction, cet animal est aussi un symbole de mort. Encore une fois, le poète joue avec des mots qui suscitent à la fois le familier et l’inconnu, le rassurant et l’inquiétant. De plus, « l’effraie » est presque un homophone de l’effroi.

Brièvement, on peut donc remarquer que le poète essaie tant bien que mal d’adapter son langage pour qu’il puisse parler au mieux de son sujet, qu’il soit le mieux défini. La parole poétique chamboulée n’est donc au final qu’un moyen d’évoquer au lecteur la multitude d’émotions et d’images que lui font ressentir ce sujet. Le sujet comme nous l’avons vu peut être délicat et inquiétant et c’est pour cela que Jaccottet tente à plusieurs reprises de rassurer son lecteur.

III) Un poème aux allures de « memento mori »

a) Le réseau lexical du cadavre

Après l’apparition

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