Commentaire composé le portrait de Manon Lescaut

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Cet extrait joue également le rôle de moteur de l'action, en créant un effet de suspens : comme le narrateur, nous nous demandons comment une telle jeune femme peut-elle rester au milieu de ces filles de joie ?

Prévost répond donc à l'une des visées des écrivains classiques : plaire.

2/ Mais un blâme implicite au service d'un projet moral.

- Une esthétique de l'illusion

L'extrait suggère l'univers théâtral, à travers « spectacle » et « spectateurs » et nous pouvons relever plusieurs termes rattachés à la description de Manon et qui évoquent l'idée d'illusion : « paraissait », « tâchait », « l'air ».

Manon est ici implicitement présentée comme une comédienne.

Dès lors, le lecteur peut doûter de l'éloge moral : cette « modestie » n'est-elle pas à comprendre comme une fausse pudeur ? La jeune femme ne se trouve-t-elle pas là pour de bonnes raisons ?

- Le regard d'un gentilhomme

Le choix de confier la narration du premier portrait de Manon à De Renoncour n'est pas innocent.

En effet, le personnage incarne une figure de gentilhomme, un anti Des Grieux : alors que Des Grieux succombe immédiatement au charme de Manon, De Renoncour narre cette vision avec une distance raisonnable, réfléchie.

Cette distanciation est introduite par le champ lexical de la vue (« voyez », « je vis », « sa vue », «yeux ») et nous pouvons relever un lexique lié à la réflexion (« m 'inspira », « sentiment de modestie », « je l'eusse prise »).

De Renoncour ne remet donc pas en cause la raison de la présence d'une jeune femme d'exception parmi ces filles de joie. Le narrateur est alors à envisager comme un double de l'auteur et il annonce le projet moral de ce dernier qui est d'instruire. Le portrait fonctionne donc comme un premier avertissement au lecteur : il s'agit de ne pas céder aveuglèment à la passion.

Conclusion :

Ce premier portrait de Manon s'inscrit pleinement dans le projet classique, qui est de « plaire et instruire » (citation de La Fontaine) : si nous sommes happés par la beauté physique et apparemment morale de Manon, le romancier nous interroge aussi quant aux dangers de succomber à l'illusion.