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Manon Lescaut, Le coup de foudre

Par   •  2 Octobre 2018  •  1 541 Mots (7 Pages)  •  602 Vues

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La phrase suivante est une phrase longue qui souligne la transformation de Des Grieux et qui met en scène le coup de foudre. Entre le début et la fin de cette phrase, le chevalier ne sera plus le même. Le pronom « moi » est répété à deux reprises : dans le premier, il s’agirait encore de De Grieux avant Manon ; dans le second, d’un autre moi, le moi bouleversé après la rencontre de Manon. On discerne une légère ironie de la part de Prévost lorsqu’il dit que son personnage ne connaît rien des femmes. Le contraste entre les « deux » Des Grieux indique une certaine niaiserie. A la fin de la phrase, « tout à coup » matérialise le coup de foudre comme la flèche de Cupidon. Des Grieux est transporté. Il ne s’appartient plus. Manon le transporte. On pense à un passage, quand Manon s’évade de la prison de l’Hôpital Général et qu’ils se retrouvent l’un et l’autre pour s’enfuir dans un carrosse. « Touche au bout du monde », dit Des Grieux au cocher, « mène-moi quelque part où je ne puisse jamais être séparé de Manon » (p. 198).

Le chevalier n’est plus maître de lui-même. C’est Manon désormais qui est la maîtresse non seulement de son cœur, mais de son destin.

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Il y a une différence entre Manon et Des Grieux. Elle n’est pas comme lui « innocent » (ou candide) et il semblerait que le chevalier le comprenne seulement en le relatant à Renoncour. Il n’est pas sûr qu’il ait saisi immédiatement combien Manon avait déjà l’habitude d’être courtisée.

L’échange entre eux deux au discours indirect (ou rapporté) éclaire toute la duplicité de Manon qui n’est pas si ingénue qu’elle n’en a l’air. Le discours indirect sera abondamment utilisé dans tout le roman pour rendre compte le plus réellement possible des propos des personnages. Cependant, la voix de Manon ne parvient jamais directement au lecteur. Elle est toujours retranscrite par Des Grieux, voire par Prévost qui ne donne pas la parole à Manon. Quel que soit son immoralisme, Manon est une femme qui subit la domination masculine et qui, comme de la société de son temps, en est la victime.

Le XVIIIe va abondamment développer le thème des Lumières de la raison, mais on peut se demander si l’amour que Manon inspire à Des Grieux est raisonnable. De nouveau, Prévost ironise sur le fait que Manon aurait « éclairé » Des Grieux. L’insistance de la conjonction « si » le souligne. Au contraire, l’amour l’aveugle.

La façon dont Des Grieux s’adresse à Manon, sa courtoisie, contraste avec les sollicitations sans doute plus directes des amants de Manon. Il y a une forme d’atténuation dans l’expression des sentiments. On peut en déduire qu’elle doit être surprise par ce procédé. Elle n’en a pas certainement l’habitude et en est particulièrement sensible. Ce point permet de nous interroger sur la réciprocité ou non du coup de foudre. Manon ne semble pas touchée comme Des Grieux. Pourtant, et la suite du roman le confirmera, malgré ses trahisons, elle n’aura de cesse de lui prouver sa fidélité. Certes, Manon n’est pas Des Grieux. Au moment où ils se rencontrent, ils sont même extrêmement différents. Autant elle est expérimentée, autant lui ne l’est pas. Bien qu’elle soit charmée par ce jeune homme qui la courtise, elle saura en profiter. Des Grieux, qui est à un croisement de sa vie, se laisse entraîner par Manon. Tiberge ne pourra le retenir. C’est de ce côté que penche Des Grieux, vers le « penchant au plaisir » de Manon.

Enfin, Des Grieux revient à lui-même, comme il avait commencé au début de l’extrait à étudier, c’est-à-dire conscient des « malheurs » (la litote est à peine voilée) que lui ont causé son histoire. La conjonction de coordination « et » lie les malheurs de Manon à ceux du chevalier. Ils sont indissociables. Des Grieux est lié à Manon dans le malheur, un malheur qui paradoxalement rimerait avec bonheur.

Conclusion

Cet extrait met bien en scène un coup de foudre, celui davantage de Des Grieux, un coup de foudre revécu après coup. A partir de cet instant, le chevalier entraîné par Manon n’en finira plus de courir après sa Daphné.

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