Questions de corpus de texte de français.
Par Junecooper • 10 Juin 2018 • 1 175 Mots (5 Pages) • 760 Vues
...
Sur ses deux longues jambes, l'homme se dandinait. Après un moment d'hésitation il répondit :
- Mais vous alors, n'asservissez vous pas notre espèce maintenant ? Ne faites vous pas d'esclaves ? Ne mangez vous pas vos congénères les animaux qui ont le malheur de ne point égaler votre force ? N'y a-t-il pas une hiérarchie au sein de la nature ? Laisseriez vous la gazelle régner sur la savane alors que vous vous en repaissez ?
Fier de sa tirade, il releva la tête vers celui qu'il servait. Il espérait que son discours puisse lui apporter un regard nouveau, lui faire comprendre un peu mieux la nécessité d'une société comme fut jadis la sienne. Mais quand il croisa le regard du lion, tout ce qu'il y vit fut une grande lassitude et de la tristesse. Ou peut être était-ce de la pitié ?
- Voilà le fond même du problème, petit homme. Reprit le Maitre. Vous les hommes avez oublié. Ici, c'est la loi du plus fort qui nous régis. C'est ce qui te fais garder trois mètres de distance lorsque que tu t'adresses à moi. La gazelle est comme moi un maillon essentiel dans la chaîne alimentaire. Sans elle je ne pourrait subsister, et sans moi elle prolifèrerait au point de manquer de nourriture et de s'éteindre à son tour. Nous ne tuons que pour nous nourrir et ce que l'on laisse sert à d'autres. Nous n'entassons pas, nous n'amassons pas, nous ne produisons pas de superflu. Nos besoins sont simples, le strict nécessaire, alors que vous n'êtes jamais rassasiés de rien. Votre définition du bonheur n'a pas de fin et n'en aura jamais. Nous n'asservissons personne au point de vous battre, de vous menacer ou de vous maltraiter. Je vois plus cela comme un échange, je suis plus fort que toi, plus gros et plus rapide aussi, ce qui me donne le pouvoir de te manger ... ou de te protéger contre d'autres si j'en tire un avantage. C'est un troc, comme beaucoup d'espèces le font déjà, la mygale protège la grenouille et la grenouille protège les œufs de la mygale en mangeant les insectes qui s'en approchent. Chacun y trouve son compte. Nous n'avons ni la notion d'ennui, ni un besoin croissant de choses dont on se lassera trop vite. Je ne dit pas qu'il n'y a pas de querelles entres membres d'une même espèce, mais si chez nous la discrimination existait, il n'y aurait plus de nouvelles espèces. Vous étiez dans vos maisons, vous pensant bien à l'abris de tout danger, plus de prédateurs naturels, sauf un que vous aviez oublié. Il n'était autre que vous même.
Sous ses babines, l'homme devinait les canines pointues qui ne demandaient qu'à sortir. Il savait parfaitement que le lion avait raison, l'homme était la victime et l'ennemi dans une même espèce. Traqué et traquant, prédateur de ses propres frères. Prisonnier d'une boucle infinie de besoins nouveaux à jamais inassouvis. Ce n'était pas la définition du bonheur, mais il était incapable de s'en contenter. Pourtant trop fier pour faire demi tour, pour remettre en cause son existence même, il fit comme l'aurait fait n'importe quel humain trop borné, il baissa la tête et tenta de prendre le ton le plus dubitatif lorsqu'il dit :
- Vous devez probablement avoir raison, Maitre.
Exaspéré le roi de la savane rugit :
- Vas donc me chercher à manger avant que je ne trouves moi même de quoi me repaitre.
...