Plan de commentaire de la scene 38 d"Incendies
Par Junecooper • 31 Janvier 2018 • 1 405 Mots (6 Pages) • 3 972 Vues
...
- Elle lui fait un compliment en l’assimilant à Sawda l.25 « je t’aurais appelée Sawda »
III) Il s’agit également d’une parole tournée vers l’avenir : Nawal donne une leçon de vie à ses enfants.
1) Nawal explique pourquoi elle n’a pas parlé à ses enfants, et veut les aider à surmonter la douleur liée à cette quête des origines dans laquelle elle les a lancés.
- Nawal a conscience de la douleur causée à ses enfants : métaphores « un couteau planté dans la gorge » l.6 + « l’histoire est en miettes » l.12
- l.57 elle reprend la question que ses enfants se posent certainement, et répond par un précepte formulé au présent de vérité générale l.58. Elle souligne la dimension initiatique de la quête avec les termes « vérités », « révélées », « découvertes ».
2) Nawal pousse ses enfants vers l’avenir, en refusant le déterminisme et en leur offrant la possibilité de reconstruire leur histoire.
- Elle donne des directives, comme une mère qui montre le chemin à suivre : modalité injonctive « il faut » l.8, 11, 36. Elle incite Simon à se remettre de cette découverte douloureuse : métaphore « réapprendre à avaler sa salive », et Jeanne à se libérer d’une fatalité : métaphore « casser le fil ». La répétition du verbe à l’impératif l.29 « Souris, Jeanne, souris » est une invitation à se libérer du poids du passé et à trouver le bonheur.
- La répétition du mot « histoire » parcourt toute la lettre. Nawal les incite à se reconstruire après cette découverte douloureuse : l.11 « il faut reconstruire l’histoire ». Elle rappelle la question clé de cette quête l.38 « où commence votre histoire ? » et évoque deux hypothèses qui ne sont satisfaisantes ni l’une ni l’autre l.39 et 41 (antithèse « horreur » / « amour » montre que les deux hypothèses sont incompatibles). Elle dénonce l’idée de destin lié aux circonstances de la naissance l.44 à 48 : chiasme des termes « amour/ sang, viol // sanguinaire, violeur / amour » => Nawal déjoue et retourne ainsi l’idée de malédiction attachée à la naissance (comme pourrait le laisser supposer la proposition de la l.40 « alors elle commence dans l’horreur »), comme cela peut être le cas dans certains mythes ou tragédies (cf. Œdipe). Nawal enseigne à Jeanne et Simon qu’ils peuvent au contraire choisir leur histoire l.50-51 : insistance sur le possessif « Lorsqu’on vous demandera votre histoire, / Dites que votre histoire … », et se choisir un point d’origine : nombreux verbes qui expriment l’idée de début « remonte » l.43 + 52, « commence » l.38 + 40 + 55. Ce point de départ apaisant proposé par Nawal est la connaissance, la maîtrise du langage, qui lui a permis de graver le nom de sa grand-mère sur sa tombe.
- Elle les réintègre dans une filiation en insistant sur l’expression « notre famille » (répété l.30 et 31) + en leur racontant l’histoire de leur arrière grand-mère, et en leur demandant de répéter le geste qu’elle-même a accompli pour Nazira : l.53 « une jeune fille / revint à son village natal pour y graver le nom de sa grand-mère » + l.61 « gravez mon nom sur la pierre »
Conclusion :
Scène épilogue car fait écho aux thèmes du début de la pièce et joue un rôle de clôture : le scandale d’une mère qui refuse de parler à ses enfants trouve une explication ; la quête a été accomplie ; ceux qui l’ont conduite se trouvent en quelques sorte récompensés par leur réintégration dans une lignée familiale et la solution qui leur est offerte pour échapper à l’horreur de leur naissance : choisir le point de départ de leur histoire pour déjouer toute notion de malédiction liée à leur origine, et leur permettre de construire leur identité.
L’importance de la parole est rappelée : la maîtrise du langage et de l’écrit permet de s’affranchir de la malédiction et de la colère. C’est le sens de cette parole poétique, et du symbole du nom que l’on peut enfin graver sur la sépulture lorsque l’apaisement a été trouvé.
...