L'illusion comique, Molière, Acte V, scène 5
Par Stella0400 • 17 Octobre 2018 • 2 792 Mots (12 Pages) • 1 551 Vues
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Nous en sommes au dénouement : Alcandre vient de montrer à Pridamant la fin de son fils : poignardé par un rival…. Le père est impuissant et effondré. Le rideau s’est baissé pour cacher la vision tragique du corps mort.
Mais la réalité n’est pas ce qui semble.
Le spectateur, comme Pridamant, prenne brutalement conscience du fait qu’il n’assiste pas à la remémoration de la mort de Clindor mais à une fantasmagorie d’une pièce de théâtre où le comédien Clindor est victime d’une mort violente. Corneille a ainsi réalisé une mise en abyme, une pièce se jouant au sein même de la pièce : il utilise le théâtre dans le théâtre pour finalement faire l’apologie de son art.
En brisant ainsi l’illusion théâtrale, Pridamant est ramené brutalement à la réalité.
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PROBLEMATIQUE /ANALYSE ET COMMENTAIRE DU TEXTE
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Problématique
Nous allons nous demander quel regard Corneille porte sur le théâtre et comment il met en œuvre ses idées en utilisant le mage Alcandre comme porte-parole dans l’extrait de l’œuvre théâtrale que nous étudions.
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De l’illusion théâtrale à la réalité
Pridamant commence à comprendre qu’il a été l’objet d’une illusion : le mot « charme » (étymologie latine : carmen) évoque bien un véritable ensorcellement dont il a été victime.
Il n’en croit pas ses yeux et veut se persuader de la réalité de ce que ces sens perçoivent : dans le texte, l’anaphore « je vois » souligne cet effort. Il réalise qu’il a été piégé.
Alcandre, le mage, lui confirme son sentiment. Son fils n’est pas mort. Il est devenu comédien. Par sa magie, Alcandre a permis à Pridamant d’assister à la représentation d’une de ses pièces.
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Le mage Alcandre porte-parole de Corneille : un plaidoyer pour le théâtre
Alcandre est un magicien en cela qu’il a créé l’illusion vécue par Pridamant depuis le début de la pièce. On ne peut s’empêcher de penser que, pour Corneille, ce mage capable de faire croire à une réalité différente est comme un auteur de théâtre capable d’amener les spectateurs dans l’univers et dans l’histoire qu’il a imaginées. Un nouveau niveau de lecture apparait alors. Alcandre va tenter de convaincre le père des hautes vertus du théâtre.
La longue tirade d’Alcandre est une première apologie du théâtre. Cette tirade et la suivante sont de véritables plaidoyers en faveur de l’art théâtral :
- Le théâtre peut tout représenter. Cela est souligné par l’accumulation d’antithèses : traitre/trahi, mort/vivant, les vivants/les morts.
- La deuxième tirade du mage (du vers 35 au vers 58) est encore plus dithyrambique. Utilisant l’hyperbole (rappel : figure de style qui correspond à un procédé d’exagération par une accumulation de termes, de superlatifs, de comparatifs. Cette figure est destinée à convaincre. Alcandre réalise là encore une véritable accumulation de périphrases mélioratives (rappel : une périphrase est une figure de style qui correspond par l’utilisation de plusieurs mots pour désigner quelque chose alors qu’on aurait pu utiliser un seul mot) pour définir le théâtre : « l’amour de tous les bons esprits »/ « l’entretien de Paris »/ « le souhait des provinces »/ « le divertissement le plus doux de nos princes »/ « les délices du peuple et le plaisir des grands ».
- Le théâtre est donc aimé de tous, sans distinction de classe sociale. Plus qu’aimé, il est « idôlatré », possédant quasiment un caractère divin.
- Corneille en profite, à travers son double théâtral qu’est Alcandre, pour faire l’éloge de son roi mécène (Louis XIII) : à nouveau accumulation de périphrases et d’appositions mélioratives : « ce grand roi…. Foudre de guerre… au front ceint de lauriers » : le roi y est ainsi décrit comme un vrai chef de guerre, victorieux. Le théâtre lui apporte le divertissement et la légèreté nécessaires.
- L’argumentaire de défense d’Alcandre se poursuit. Il veut amener Pridamant à évoluer dans sa vision du théâtre : il oppose le mépris dans lequel les gens de théâtre étaient tenus autrefois (« votre temps ») aux honneurs dont bénéficient les comédiens « aujourd’hui ».
- Les arguments sont aussi financiers : le théâtre offre « de bonnes rentes » des « accommodements », c’est-à-dire la possibilité de s’enrichir . Alcandre dément ainsi l’idée que le théâtre est un pis-aller, un choix par défaut.
Le plaidoyer d’Alcandre a totalement porté ses fruits puisque Pridamant reconnait ses erreurs. Il use maintenant lui aussi de superlatifs et de comparaisons toutes en faveur de la nouvelle vie choisie par son fils (« bien meilleure que la mienne »). Il est passé de la tristesse et de l’inquiétude au champ lexical de la joie (« allégresse, bannir la tristesse »). Il reconnait la puissance de l’illusion créée par l’auteur et ses interprètes puisqu’il « a cru la comédie au point où il l’a vue » (v.64)
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Conclusion
Corneille en utilisant la mise en abyme par l’enchâssement de deux pièces nous permet de comprendre quelle est sa conception du théâtre et réalise un véritable plaidoyer pour son art.
Cette mise en abyme est un procédé qui donne de la profondeur, du recul et qui lui permet finalement de mieux analyser son travail. Il utilise également pour cela un double théâtral : la magie d’Alcandre est la métaphore de l’illusion théâtrale créée par le dramaturge.
On retrouve une mise en abyme, une pièce enchassée dans la pièce dans L’impromptu de Versailles de Molière.
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