L'art de la Conversation chez Molière
Par Plum05 • 22 Octobre 2018 • 1 802 Mots (8 Pages) • 657 Vues
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Cette pratique de satire utilisée par Molière, sensibilise le spectateur à veiller sur son comportement dans le milieu des salons, s' il ne veut point être la risée de l'assemblé, en se transformant en piètre poète ou en femmes savantes. Molière donne une leçon à ses contemporains en caricaturant les défauts que l'on peut rencontrer dans les salons bourgeois de l'époque, afin que tous respectent au mieux les codes de bienséance et de bel esprit.
Dans Le Misanthrope, une scène nous intéresse tout particulièrement, elle se déroule dans le salon de Célimène qui reçoit tous les courtisans (Acte II, scène IV). Ici la conversation est placée sous le signe des portraits que Célimène, à la demande de ses hôtes, dresse au sujet d'hommes de la cour qui sont absents, en les tournant en dérision et en mettant l'accent sur leurs travers. Durant cette conversation huit personnages sont décrits à l'aide des portraits, parmi ces descriptions, cinq ont pour sujet le discours, l'éloquence qui sont donc les fondements de l'art de la conversation. A travers ces cinq portraits, Molière met en évidence les défauts qui existent lors d'entretien dans les salons. (« Tout ce qu'il vous débite en grimace abonde; / A force de façons, il assomme le monde; ») Grâce aux propos de Célimène, on constate à quel point l'art de la conversation est essentiel pour plaire dans la société et obtenir une place respectable auprès de ses pairs.
A travers les reproches formulés par Célimène et ses hôtes, on retrouve les principes théoriques exprimé par Bouhours. Les portraits dépeints par Célimène illustrent le manque de fond de certaines conversations qui se déroulent dans les salons (« C'est un parleur étrange, et qui trouve toujours / L'art de ne vous rien dire avec de longs discours; ») ainsi que le manque d'éducation de certains membres ( « Le pauvre esprit de femme, et le sec entretien! »). Les courtisans jugés ennuyeux déplaisent à la société et leur réputation est mise à mal.
Le portrait de Damis permet quant à lui d'attester les notions théoriques exposées par Madeleine de Scudéry. D'après les propos de Célimène, Damis cherche trop à enjoliver son discours, il ne semble plus du tout naturel, ce qui est diamétralement opposé aux préceptes de Scudéry. Certes, il est nécessaire de bien manier l'art de la conversation, mais il n'en demeure pas moins important de pouvoir cacher cet apprentissage lors de la conversation. (« ...dans tous ses propos, / On voit qu'il se travaille à dire de bons mots. ») On constate donc que Damis n'étant point capable de discourir de façon naturelle, est critiqué par l'assemblée et celle-ci lui reproche son manque de talent. Damis reçoit donc une image de pédant, ce qui est très mal vu dans le milieu des salons. Adraste est également coupable de ce travers. En effet, il fait trop l'étalage de son savoir et semble être aux yeux de ses pairs un personnage imbu de lui-même, ce qui est très mal venu. ( « Ah! Quel orgueil extrême! / C'est homme gonflé de l'amour de soi-même. » Les règles de Scudéry semblent donc essentielles si l'on veut garder une image digne à la cour.
Encore une fois à travers cette pièce, Molière cherche, par le contre-exemple, à mettre en garde les spectateurs des travers qu'il faut éviter pour être bien vu à la cour. Ces portraits bien que satiriques ont un but très précis, ils illustrent à merveille les principes de Scudéry et de Bouhours. Certes, il est possible que les spectateurs n'aient pas tout à fait compris cette mise en garde tant ces portraits semblent grotesques. Pourtant on y retrouve sans peine des caractéristiques propres à chacun, mais encore faut-il à travers les comédies être capable de se remettre en question. Molière caricature à l'extrême le milieu mondain afin de provoquer une réaction, toutefois sous le masque de la comédie, il y a une réelle leçon de savoir vivre, qui a pour but de rappeler à tous l'importance des codes qui régissent les conversations. Les gentilshommes, et les femmes qui appartiennent au milieu de la cour, sont sans cesse jugés par leurs semblables, ce qui est clairement montré dans Le Misanthrope, c'est pourquoi Molière en plus de mettre en scène un divertissement cherche à s'accorder au mieux aux préceptes de son temps, pour permettre à tous de se souvenir de l'importance de leur image dans le milieu mondain. Par les contre-exemples utilisés également dans Les Femmes savantes, il donne également aux spectateurs l'opportunité de se remettre en question, afin de bien se conformer aux codes de la conversation. Plus que des comédies, ces pièces sont des leçons de vie qui véhiculent la morale à suivre à l'époque.
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