Le choc des civilisations cas
Par Junecooper • 15 Décembre 2017 • 3 177 Mots (13 Pages) • 598 Vues
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entre les deux. Par contre, profondément divisé et dispersé, l’Islam n’a pas d’État phare, pas plus que l’Afrique et l’Amérique latine. Certains pays, comme la Russie, la Turquie et le Mexique, ont tenté de s’occidentaliser, au prix toutefois de déchirements qui ont souvent mis en échec ce processus.
Un monde multicivilisationnel voit se conclure des nouvelles alliances entre civilisations et éclater des conflits qui s’éternisent, impliquent un grand nombre de participants et sombrent dans la violence extrême. Alors que Huntington voit les conflits de l’Occident avec l’Inde, l’Afrique et la Russie s’amenuiser, il craint que l’Occident ne s’oppose davantage à la Chine et à l’Islam. Celui-ci, se rapprochant de la Chine, aura des relations plus antagonistes avec l’Inde et la Russie. Les guerres frontalières qui se multiplient entre musulmans et non-musulmans susciteront des alliances nouvelles et inciteront les États dominants à intervenir pour calmer les choses.
Enfin, Huntington lance à l’Occident un appel au ressaisissement. Il estime que la survie de l’Occident dépendra de la capacité et de la volonté des Américains de réaffirmer leur identité occidentale fondée sur l’héritage européen. La persistance du crime, de la drogue et de la violence, le déclin de la famille, le déclin du capital social, la faiblesse générale de l’éthique et la désaffection pour le savoir et l’activité intellectuelle, notamment aux États-Unis, sont autant de signes indiquant le déclin moral de l’Occident. Le livre de Huntington est à la fois une théorie des relations internationales et une critique du multiculturalisme comme politique intérieure. Huntington reproche aux multiculturalistes américains de vouloir créer une sorte de pays aux civilisations multiples, c’est-à-dire un pays n’appartenant à aucune civilisation et dépourvu d’unité culturelle. Il croit que l’affrontement entre les partisans du multiculturalisme et les défenseurs de la civilisation occidentale constitue le « véritable conflit » aux États-Unis. Si ces derniers devaient se désoccidentaliser, l’Ouest se réduirait alors à l’Europe, elle-même aux prises avec l’irruption de l’Islam. Pour enrayer le déclin de l’Occident, l’Europe et l’Amérique du Nord devraient envisager une intégration politique et économique, de même qu’aligner les pays d’Amérique latine sur l’Occident, empêcher le Japon de s’écarter de l’Ouest, freiner la puissance militaire de l’Islam et de la Chine en maintenant la supériorité technologique et militaire de l’Occident sur les autres civilisations.
Tzvetan Todorov cherche dans son essai à dépasser la théorie qui fait florès de choc de civilisations, posée par Huntington. Culture, civilisation, barbarie et identité collective, il explore toutes ces notions, s’appuyant sur l’histoire européenne, pour nous donner à penser, et a s’interroger sur les réels arguments de cette thèse.
Posant la démocratisation révolutionnaires des communications et des armes destructives comme une nouvelle donne de notre monde, Tzvetan Todorov se penche sur la juxtapositions de contrastes où l’archaïque côtoie le moderne et les tremblements dans les sociétés que cela produit. Pour mieux l’appréhender, il entame son essai par une classification des états selon ce que Montesquieu appelait « leur principe de gouvernement » c’est à dire leur passion dominante. Il complète ainsi une typologie posée par Dominique Moïsi, politologue, et géopoliticien francais :
- le premier groupe est les pays de l’appétit , » ceux dont la population a souvent le sentiment que pour des raisons diverses, elle a été tenu à l’écart de la répartition des richesses, aujourd’hui leur tour est venu ».Dans ce groupe il classe le Japon, le Sud-Est asiatique, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud
- le deuxième groupe est celui du ressentiment. » Cette attitude résulte d’une humiliation, réelle ou imaginaire, qui leur serait infligée par les pays les plus riches et les plus puissants ». Dans cette catégorie, il classe les pays dont la population est majoritairement musulmane mais aussi quelques pays asiatiques comme la Corée du Nord .
- le troisième groupe est celui de la peur. Ce sont les pays de l’Occident.
- le quatrième groupe, plus dispersé est celui de l’indécision : » groupe résiduel dont les membres risquent de passer un jour sous l’emprise de l’appétit comme du ressentiment mais qui restent encore extérieurs à ces passions. »
« La thèse peut se résumer en quelques mots. Les pays occidentaux ont pleinement le droit de se défendre contre toute agression et toute atteinte aux valeurs sur lesquelles ils ont choisi de fonder leur régime démocratiques.Ils ont notamment à combattre avec fermeté toute menace terroriste et toute forme de violence. Ils ont intérêt cependant à ne pas se laisser entrainer dans une réaction disproportionnée, excessive et abusive, car elle produirait des résultats contraires à ceux que l’on escompte. » Car » la peur des barbares est ce qui risque de nous rendre barbares.«
Tzvetan Todorov examine alors les raisons des amalgames fâcheux menant à l’islamophobie dans nos sociétés, et notamment notre intolérance pour des ressortissants qui accordent à la religion dans leur organisation sociale une place que les démocraties libérales ont depuis longtemps abandonné.
« Renoncer à l’intolérance ne signifie pas qu’il faille tolérer tout. Pour être crédible , un appel à la tolérance doit partir d’un consensus intransigeant sur ce qui dans une société est considéré comme intolérable. Ce sont en général les lois du pays qui définissent ce socle…. L’interprétation des conflits politiques et sociaux en termes de religion ou de culture est à la fois fausse et nocive : elle envenime les conflits au lieu de les apaiser. La loi doit l’emporter sur la coutume quand les deux s’opposent.
Après avoir mis dos à dos universalisme et relativisme dans leur nécessaire incomplétude à saisir le monde, Todorov se penche sur la notion de Barbarie. Dépassant la simple traduction du mot grec, il pose un ensemble de caractéristiques convergentes pour définir la barbarie :
- la transgression des lois les plus fondamentales de la vie commune, avec comme point de départ la difficulté à mettre à distance la relation parentale
- la rupture du lien d’humanité entre eux et les autres hommes
- l’absence de prise en compte du regard de l’autre.
« Les barbares sont ceux qui ne reconnaissent pas que les autres sont des êtres
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