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Le cas des mères porteuses en droit québécois

Par   •  30 Juin 2018  •  3 871 Mots (16 Pages)  •  371 Vues

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Partie II : L’adoption dans le cadre des conventions de mères porteuses

L’adoption, lorsque toutes les conditions sont remplies et que le tribunal prononce le jugement, peut paraître facile. Cependant, quand le processus met en scène une convention avec une mère porteuse, d’autres aspects sont à considérer. Le rôle du juge est donc de s’assurer que le critère de l’intérêt de l’enfant est respecté peu importe les circonstances.

- L’intérêt qui est pris en compte

- La convention de mères porteuses

Premièrement, il convient de définir ce que l’on entend par « mère porteuse». Des précisions s’imposent. Par la pratique de « mère porteuse», on entend une femme qui est inséminée par le sperme d’un homme, ce dernier formant un couple avec une autre personne qui peut être une femme ou un homme. Le sperme peut aussi venir d’un donneur de sperme. Quant à l’ovule, il peut provenir de la femme inséminée, elle sera donc génitrice de l’enfant qu’elle porte, ou elle peut recevoir les embryons du couple désirant avoir l’enfant. Elle sera, dans ce cas, gestatrice. En règle générale, la mère porteuse remettra l’enfant au couple intentionnel et renonce à tout droit qu’elle pourrait avoir sur l’enfant. Nous pouvons aussi appeler ce processus gestation pour le compte d’autrui, maternité de substitution ou la procréation pour autrui[14]. La Loi sur la procréation assistée[15] définit la mère porteuse comme étant une personne de sexe féminin qui porte un embryon ou un fœtus issu d’une technique de procréation assistée et provenant des gènes de donneurs avec l’intention de remettre l’enfant à une autre personne à la naissance de celui-ci. Puisque les mères porteuses existent, la filiation des enfants qui leur sont nés doit être déterminée. La femme qui accouche est présumée la mère de l’enfant à qui elle donne naissance, même si elle porte le matériel génétique des parents prospectifs avec lesquels elle a contracté[16]. Dans ce cas, une mère porteuse peut, à la naissance de l’enfant, choisir de se déclarer ou non mère de l’enfant. Le père se déclarera également en vertu des articles 113 et 114 C.c.Q.[17]. Alors, l’acte de naissance d’un enfant né d’une convention de gestation pour autrui fera paraître la gestatrice comme mère. En pratique, outre la possession d’état, la seule manière d’établir le lien familial entre la mère d’intention et l’enfant né de la gestation pour autrui semble de recourir à l’adoption[18]. Le conjoint ou la conjointe du père ne sont liés à cet enfant que par le cœur ou l’intention. Si la mère porteuse est génitrice, la personne concernée n’a aucun lien génétique ni légal rattaché à l’enfant[19]. En vertu de l’article 523 C.c.Q ce sont ceux dont les noms sont inscrits à l’acte de naissance qui seront considérés les parents « légaux» et cela, peu importe les circonstances de la naissance.

- La convention par des parents désirant

Plusieurs raisons poussent des parents à faire appel à une mère porteuse. Par exemple, une grossesse n’est plus envisageable médicalement[20] parce qu’une femme est incapable de porter un enfant à cause d’un problème à l’utérus ou en l’absence de ce dernier ou encore, lorsque la grossesse entraînerait des risques de transmission d’une maladie génétique ou de malformations; pour des raisons de convenance, si, par exemple, une femme ne veut pas arrêter sa carrière ou encore, si un homme célibataire désire un enfant[21]. Dans la mesure où la filiation et l’amour que l’on porte aux enfants sont supposés découler naturellement de la grossesse et de l’accouchement, la gestation pour autrui fait effectivement basculer des certitudes. Des études récentes nous démontrent pourtant que les mères d’intention sont d’aussi bons parents que celles qui ont elles-mêmes porté leurs enfants. Ces mères se trouvent dans une situation semblable aux mères adoptives. Or, aujourd’hui, on ne pourrait affirmer qu’une mère adoptive est moins aimante ou moins compétente en raison de l’absence du lien génétique avec son enfant. Cette approche implique de faire reposer la filiation sur l’intention de devenir parent et non pas sur les liens biologiques. Les couples faisant appel à la gestation pour autrui sont motivés et désirent un enfant. De plus, les gestatrices disent éprouver un grand sentiment de satisfaction et elles ont l’impression d’avoir accompli une mission. C’est la raison pour laquelle elles vivent la remise de l’enfant aux parents désirant comme un don et non pas un abandon[22].

3. Le consentement de la mère biologique

En vertu de l’article 555 C.c.Q. le consentement à l’adoption peut être spécial. Le Code civil du Québec prévoit qu’un consentement spécial à l’adoption peut être donné en faveur du conjoint ou de la conjointe du père biologique. Dans l’arrêt Adoption – 09367[23], le juge adopte la position suivante : peu importe les circonstances de la naissance de l’enfant, l’acte de naissance fait foi de la filiation et il n’y a rien dans la preuve qui invalide le consentement donné par la mère. Ainsi, lors d’un jugement en ordonnance de placement, si le consentement spécial donné par la mère porteuse semble dépourvu de tout vice, le juge donnera probablement suite à la demande.

B. Le principe d’ordre public pour assurer la protection

1. La nullité de la convention de mère porteuse

Au Québec, les contrats de mère porteuse, qu’ils soient à titre onéreux ou à titre gratuit, sont considérés comme contraires à l’ordre public. En vertu de l’article 541 C.c.Q., ce type de contrat est nul de nullité absolue. Les parties liées par une telle convention ne possèdent aucun recours en justice pour l’exécution de ce contrat. Cette inexécution pourrait porter sur la rémunération de la mère porteuse autant que sur la remise de l’enfant[24]. Depuis 1994, il est convenu par le législateur québécois que «toute convention par laquelle une femme s’engage à procréer ou à porter un enfant pour le compte d’autrui est nulle de nullité absolue»[25]. Selon Deleury et Goubeau, cette règle reposerait sur le principe de l’indisponibilité du corps humain « étant ‘’hors commerce’’ il ne saurait donc être l’objet de conventions.»[26] La convention considérée comme contraire à l’ordre public est de nullité absolue (art. 1413 et 1417 C.c.Q.), car

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