Ethique des affaires cas
Par Ramy • 5 Avril 2018 • 2 640 Mots (11 Pages) • 590 Vues
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2/- L’inadaptation de l’interdit:
Le droit pénal des affaires en tentant d’établir des listes exhaustives des comportements interdits risque de freiner les initiatives dans le monde des affaires, tel était le constat du professeur Chavanne en 1963.
Par contre, l’éthique moderne des affaires se veut plus une science de l’étude des finalités et de recherche de réponses aux situations conflictuelles. C’est pourquoi les chartes d’éthique des entreprises qui s’inspirent de la solution anglo-saxonne préfèrent décrire les attitudes souhaitables qui devraient orienter la politique de l’entreprise, plutôt que d’énumérer les comportements condamnables.
Une telle inadaptation du droit pénal avec le monde des affaires a suscité une opposition farouche de la part des opérateurs économiques qui se sont estimés lésées par l’inflation de la règle pénale dans le domaine des affaires, ce qui a conduit à un recul du droit pénal dans la vie des affaires.
B/- Le recul du droit pénal dans la vie des affaires :
La récession qui a succédé à l’inflation pénale s’est manifestée sur le plan de la dépénalisation du droit des affaires et de la montée en puissance de l’administration aux dépens d’autorités judiciaires :
1/- La dépénalisation du droit des affaires :
A l’instar de la France, le Maroc s’est engagé dans le processus de dépénalisation du droit des affaires, mais avec moins de rigueur.
L’existence tant dénoncée de 877 causes d’emprisonnement du chef d’entreprise (M. Yvon GATTAZ. Bilan et perspective du droit pénal de l’entreprise, rapport du IXème congrès de l’association française du droit pénal, Lyon, Nov.1987,pub.Economica, 1989) a poussé le législateur français à adopter une dépénalisation avancée qui a profondément modifié des matières aussi sensibles aux considérations éthiques que le droit des entreprises en difficulté et le droit de la concurrence.
La loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises a limité le champ d’application des dispositions pénales relatives à la banqueroute, en réduisant le nombre de ses cas et en subordonnant la condamnation à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire.
Ainsi, la poursuite abusive d’une exploitation déficitaire dans le seul intérêt du dirigeant, acte anti-éthique caractérisé, n’est plus sanctionné pénalement.
Par ailleurs, l’ordonnance du 1er décembre 1986 et la loi du 6 juillet 1987 ont affiché une grande sensibilité à l’échec de la répression pénale des pratiques anticoncurrentielle où fleurissent les problèmes d’éthique. Désormais, qu’il s’agisse de pratiques collectives ou individuelles, le droit pénal n’occupe qu’une place dérisoire. En effet, les sanctions pénales maintenues n’interviennent qu’exceptionnellement. Ainsi, l’article 17 de l’ordonnance, héritier du délit de coalition de l’article 419 du code pénal qui sanctionne pénalement les personnes physiques ayant frauduleusement pris une part personnelle et déterminante à la mise en œuvre de pratiques abusives ne semble pas avoir connu d’application jurisprudentielle.
Au Maroc, la loi 17-95 dont on reprochait la grande sévérité de son système répressif et le décalage avec la réalité économique du pays a été récemment amendée par la loi 20-95 qui a marqué un tournant important dans le processus de dépénalisation du droit des affaires marocain. L’assouplissement du dispositif pénal concerne les articles allant de 375 à 422. Les changements touchent la suppression d’une dizaine de peines d’emprisonnement, le remplacement de certaines peines de prison par des amendes auxquels s’ajoute la réduction du taux de certaines peines d’amendes. Parmi les avancées les plus importantes, on notera la disparition de certaines peines privatives de liberté dont on peut citer à titre indicatif les cas suivants : l’emprisonnement n’est plus encouru dans le cas d’émissions sans que les actions en numéraires aient été libérées à la souscription du quart au moins de leur valeur (article378). Les dirigeants ne risquent plus l’incarcération même si ils s’abstiennent ou refusent de mauvaise foi de faire procéder, dans les délais légaux, soit au dépôt des pièces au tribunal, soit aux mesures de publicité (article 420).
Cependant, l’emprisonnement a été maintenu pour les sociétés faisant appel public à l’épargne (article 378) sur lesquelles pèse une obligation de transparence et de protection des épargnants.
Apparemment, la dépénalisation du droit pénal des affaires ne s’est pas limitée aux règles de fond, étant donné qu’elle a conduit à l’affaiblissement des autorités judiciaires.
2/- Affaiblissement de l’autorité judiciaire :
Suite aux insuffisances des normes légales en général et celles du droit pénal des affaires en particulier, on assiste ces derniers temps à l’effacement du législateur et du juge au profit de la prolifération des autorités administratives indépendantes qui révèle au grand jour la volonté du législateur de moraliser la vie des affaires. (Mme. Delmas- Marty « le délit d’initié va –t-il changer la bourse ? » D.1997, Chrone.91.). En effet, ces autorités administratives sont particulièrement aptes à connaître les situations de conflit, à percevoir le sentiment des professionnels sur la solution éthique à leur donner et à faire respecter la déontologie par des moyens extrêmement souples, usant du dialogue et de la persuasion, recourant au besoin à la réglementation et, en dernier lieu à la sanction de l’entreprise ou de son responsable. Le Maroc n’a pas échappé à l’ascension de l’administration au dépens des autorités judiciaires, plusieurs autorités administratives spécialisées ont vu le jour telles que : ANRT ; HACA ; CDVM et le conseil de concurrence qui se chargent de la police sectorielle dans des domaines à fort rendement économique.
Si l’indifférence du droit pénal envers l’éthique des affaires est une question non de nature mais de conjoncture, il se pourrait que le droit pénal, avec un effort d’adaptation, puisse se révéler attentif à l’éthique des affaires.
II/- Le droit pénal attentif à l’éthique des affaires
Le libéralisme n’est pas synonyme de laxisme ni d’irresponsabilité, c’est la raison
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