Don et greffe d'organes.
Par Junecooper • 31 Mars 2018 • 2 787 Mots (12 Pages) • 740 Vues
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Dans notre société moderne, le don fait plus souvent appel à la compassion ou la charité. Alors le corps médical et certaines associations prônent l'utilitarisme aux familles pour obtenir des greffons.
L'utilitarisme est une conception de l'Homme technique et d'une société l'idéale qui instrumentalise l'Homme, ses relations et sa vision du monde. Il fait de l'Homme un être efficace et intéressé, qui devient un "corps-machine".
Cette vision objective permet de renforcer le lien entre les individus ; le don serait un acte naturel et banal. Ainsi, après le décès d'un individu, ses organes sont utilisés, assurant la santé de ses descendants et s'inscrivant dans une logique de « donner-recevoir ».
L'utilitarisme oblige l'Homme à modifier sa vision de la vie et de la mort car le corps a une forte valeur symbolique. Nous voyons nos organes comme nôtres, même après notre mort.
C'est cette vision sacrée du corps humain qui dessert le don d'organes pour les donneurs comme pour les receveurs. Les receveurs d'un greffon humain doivent réaliser une intromission identitaire et organique car l'organe est l'emblème même du donneur et peut provoquer chez les greffés des troubles de la personnalité plus ou moins importants, ainsi que des rejets malgré un traitement immunologique.
- L'esprit du don de Marcel Mauss
Mais le don naturel est possible sans instrumentalisation de l'Homme. Marcel Mauss, anthropologiste et philosophe du début du XXe siècle, exprime son point de vue dans Essai sur le don paru en 1924. Il explique que le don est un lien qui permet d'unifier la société, mais qu'il n'est possible que s'il ne dénature pas l'Homme et ses principes de fonctionnement collectif.
Le don est un acte généreux, réalisé dans le but de vivre en tranquillité avec sa conscience et le monde qui nous entoure. Il devient un phénomène social, avec une valeur symbolique forte. Le don est alors un échange positif et rassurant pour la population qui se sent obligée de donner à son tour, en remerciement ceux de qui ils ont déjà reçu. La logique devient « donner-recevoir-rendre ».
Ce système de reconnaissance peut aussi avoir des effets négatifs. La forte valeur symbolique du don amène l'obligation, transformant le don en un acte obligé et dénué de générosité.
Le don d’organes est une expérience humaine troublante et difficile à assumer malgré le gain de santé et d’autonomie qu'il permet pour autrui. Il met en évidence le fait que le danger de recevoir est non seulement la dette à régler mais aussi le risque de perdre son identité.
L’exemple du don d’organes nous rappelle que la volonté d’échapper à autrui pour être soi-même, c’est-à-dire la volonté d’échapper à toute dette, est une illusion. L’être humain ne vit pas seulement de choses et d’équivalences comptables ou techniques, mais aussi de renoncements aux choses. Là où l’utilitarisme fonctionnalise le corps et les organes, la logique du don de Mauss le considère en tant que sujet. Dans le cas d'un don, la vision du corps influe le choix du donneur.
- Les dérives potentielles
A l'image de l'Europe, le monde entier est touché par la pénurie de donneur. Ce manque d'organe ainsi que la pauvreté rencontrée dans un bon nombre de pays entraînent alors certaines dérives, comme le trafic d'organes.
- Le trafic d'organes
- Qu'est ce que c'est ?
L'obtention d'organes à partir de donneurs décédés, ou vivants, est limitée et soumise à une réglementation très stricte en Europe notamment, ce qui entraîne la mort de nombreux de patients en attente de transplantations d'organes, avant même d'avoir reçu celui-ci. Cependant, le manque de réglementation dans le reste du monde aboutit à un trafic d'organes illégal important.
Le trafic d'organes, en plus d'être une solution contre l’urgence de la transplantation, est aussi un marché très lucratif et exerce une sorte de pression sur des personnes en situation de pauvreté. Ce trafic lucratif est souvent organisé par des réseaux mafieux et généralement en lien avec le trafic d'armes, de drogues ou de prostitution.
Les personnes en situation précaire vendent donc des "pièces détachées" humaines aux riches malades en attente d'une transplantation.
- Où ?
En Europe, le trafic d’organes humains se trouve principalement en Moldavie, Bulgarie et Roumanie.
La Chine ferait commerce des organes prélevés sur les détenus exécutés.
La vente d’organe se poursuit en Inde, malgré les nouvelles lois du pays qui rendent cette pratique illégale.
Au cours des dernières années, des réseaux ont été démantelés au Kosovo, en Afrique du Sud, en Israël, aux États-Unis et en Inde.
- Comment ?
Il existe de nombreuses façons de se procurer un organe, notamment sur des sites internet, où les interventions peuvent être organisées en moins de 10 jours.
Par exemple, en septembre 1999, le site aux enchères « eBay » a dû supprimer la vente d’un rein postée par un citoyen de Floride. Au moment de la suppression, le rein avait atteint la somme de 5,7 millions de dollars.
- Le tourisme de transplantation
Les patients fortunés découragés par des listes d'attente interminables n'hésitent pas à parcourir plusieurs milliers de kilomètres pour recevoir un organe dont la provenance reste douteuse. Cet affreux trafic repose sur le manque de scrupules des uns et le manque d'argent des autres.
Le tourisme de transplantation repousse les barrières de l’éthique, au seul profit de l'offre et de la demande. Face à la pénurie d'organes dans les pays développés, des donneurs des pays sous-développés, poussés par la pauvreté, sont prêts à sacrifier un rein ou une cornée, quitte à rester ensuite sans soins.
En Chine, comme dit précédemment, ce sont les organes des condamnés à mort qui trouvent là un débouché financier. L'origine des greffons permet
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