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Commentaire composé de Bel Ami de Maupassant

Par   •  24 Octobre 2018  •  1 602 Mots (7 Pages)  •  950 Vues

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les moments encanaillés au cabaret de la Reine Blanche ou aux Folies-Bergère.

III - BEL-AMI OU BELLES AMIES?

Dans ces cabarets à la mode, Duroy rencontre d’abord une cocotte, Rachel, la prostituée « brune à la chair blanchie par la pâte », aussi vulgaire que désirable car Duroy a sans cesse besoin de désirer les femmes et d’être désiré d’elles puisque, avoue Maupassant, « c’est par les femmes seules qu’il arrive ». Au-delà des assouvissements du corps, cinq d’entre elles vont ainsi jouer un rôle capital dans son ascension:

— Madeleine Forestier, la jolie blonde un peu mystérieuse, femme de tête, pour qui le mariage est d’abord une association, fait sa première éducation en l’initiant au monde du journalisme et de la politique. Elle lui fera le triple don de son talent, en écrivant son premier article, d’un nom de plume à succès et d’une première fortune en l’épousant après la mort de Forestier;

— Clotilde de Marelle, la « brunette », lui offre, elle, son corps de « gentille maîtresse ». Elle est la complice idéale qui lui apprend à naviguer dans les eaux troubles des salons mondains

— Laurine, la fille de Clotilde, ne lui offrira pas moins que son surnom de « Bel-Ami », sésame de sa réussite

— Mme Walter, « la Patronne », lui servira de second tremplin dans le monde journalistique en lui décrochant la place de « chef des échos » et en l’initiant aux tripotages boursiers pour son plus grand profit;

— Suzanne Walter, enfin, la fille de celle-ci, « frêle poupée blonde », consolidera sa position sociale par une seconde union arrachée à force de manigances, vérifiant la morale cynique du héros : « toutes les femmes sont des filles » dont il faut « se servir sans leur rien donner de soi >.

IV - VOLONTÉ DE PUISSANCE ET HANTISE DU NÉANT

Une faille secrète

Mais ce personnage cynique, qui semble déployer sans obstacles sa volonté de puissance, qui collectionne les femmes, accumule succès de plume et millions pour se lancer enfin à l’assaut du pouvoir politique est, comme tous les héros de Maupassant, comme Maupassant lui-même, hanté par une faille secrète. Son existence tout entière, comme son nom (Duroy), reflet inversé de ses origines paysannes, bizarrement clivé (Du/Roy) et démultiplié (du Cantel), repose sur un leurre, comme si son être, artificiellement gonflé, lui échappait.

Miroirs et images du double

Devenu chef des échos, Bel-Ami n’est que la vaine répétition d’une apparence. Dans les miroirs où il croit trouver l’image flatteuse de sa réussite, c’est toujours un autre qu’il rencontre, un autre qu’il ne reconnaît pas : affublé d’un habit d’occasion lors de sa première visite chez les Forestier, il n un mouvement de recul devant « un monsieur en grande toilette qui le regard[e] ». Stupéfait, il découvre que c’est lui-même, « reflété par une haute glace en pied » ; plus tard, c’est « un monsieur pressé qui [vient] en gambadant à sa rencontre » et il prend « congé de son image, [...] se saluant très bas, avec cérémonie, comme on salue les grands personnages ». Mais la vérité grimace avec une terrible ironie dans le miroir complaisant du succès : allumant une allumette-bougie pour éclairer le palier de Forestier, devenu le sien, Duroy fait « surgir dans la glace» son image et celle de Madeleine. Et le miroir, reflétant « deux fantômes [...] prêts à s’évanouir dans la nuit », sonne le glas de son « rire de triomphe» : « voilà des millionnaires qui passent », commente Bel-Ami qui ne croit pas si bien dire.

L’angoisse de la mort

Double de Forestier, dont il enfile symboliquement les pantoufles, endossant par là même son destin, il est en permanence renvoyé à son néant : déjà, à l’approche du duel qui lui révèle sa lâcheté, « il s’imagine distinctement étendu » sur sa couche avec « ce visage creux qu’ont les morts et cette blancheur des mains qui ne remueront plus » ; saisi par l’air froid comme par un « bain de glace » au sortir de la serre des Walter, il est peut-être déjà atteint par le mal fatal qui a emporté Forestier et le visage peint du Christ marchant sur les flots, dans lequel Mme Walter croit retrouver le sien, fait de son ascension sociale, inlassablement répétée par celle des escaliers qu’il gravit, une allégorie prémonitoire de son inévitable chemin de croix.

Le goût amer du pessimisme dans Bel-Ami

À travers ces indices, savamment disséminés dans le roman, le mot de Norbert de Varenne prend tout son sens : décidément, «dans tout ce qu’on regarde, c’est [...] la mort qu’on aperçoit». Roman de la volonté de puissance, Bel-Ami illustre à sa manière la sombre philosophie de Schopenhauer (1788-1860). Le vouloir- vivre est la racine du mal : le « fiel» qui empoisonne toutes les joies de Georges Duroy donne au roman le goût amer du pessimisme irréductible

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