Argumentation Antigone

...

L’Antigone d’Anouilh est différente de celle de Sophocle. En effet, le dramaturge grec est plus manichéen. Dans l’antiquité, alors qu’Antigone est gentille, Créon est, lui, un tyran implacable et insensible. Mais Nicolas Briançon, qui reprend les textes d’Anouilh, remplace le méchant dictateur par un oncle trop sensible pour faire un bon tyran. Créon représente l’occupant et Antigone, la résistance. Grâce à ces deux personnages, Nicolas Briançon nous rappelle qu’Antigone, qui refuse l’abdication, est intemporelle et que les tyrans n'appartiennent pas à un passé révolu mais s’inscrivent dans toutes les époques.

Antigone est déterminée et malheureusement, Créon doit assumer son rôle, celui de la faire mourir.

« Comprendre. Toujours comprendre. Moi je ne veux pas comprendre. », déclare Antigone à sa sœur Ismène qui essaye de la raisonner. Antigone énumère toutes les règles avec lesquelles elle a été élevée, comme si depuis sa tendre enfance, elle attendait le moment pour se rebeller et mourir. Plus tard, Antigone rejette le bonheur dérisoire que lui propose Créon, ainsi que la vieillesse et le changement.

La figure d’Antigone est aussi un héros tragique qui suscite la compassion du spectateur, dans une scène qui met en évidence l’isolement de l’héroïne à l’heure de sa mort. Dans cette dernière scène où le garde est resté seul avec Antigone, Nicolas Briançon joue avec l’attitude du garde pour la rendre comique, et indifférente au sort de la malheureuse.

Enfin, la pièce adaptée par Nicolas Briançon est une pièce tirée d’une tragédie antique certes mais réecrite dans la jeunesse de Jean Anouilh. Pour ce dernier, l’âge adulte est fondé sur un péché. Antigone a le courage de la jeunesse, inconscient et sans limite. Anouilh voit en Antigone la rébellion et la pureté d’une adolescente en crise. Nicolas Briançon insiste cependant sur le fait que cette crise pourrait être faite à tout âge : la révolte naît surtout d’un profond désir de liberté.

Antigone touche Créon, qui doit la faire mourir, malgré son admiration et son attachement. Nicolas Briançon ne souhaite pas donner l’image d’une Antigone mordante. Au contraire, il veut mettre en avant la révolution intemporelle et infinie de ce personnage. Antigone, seule dans son combat, lutte contre son oncle, son fiancé, sa sœur et sa nourrice. Sûre d’elle, elle ne doute pas. La jeune fille répond bravement aux autres personnages par des affirmations réfléchies. La représentation du metteur en scène français met en avant le débat que tient Antigone face à Créon qui tente de la sauver.

Elle ne veut pas d’un bonheur instable, basé sur des mensonges et des tromperies. La mort de Antigone ressemble à un sacrifice. Malgré les promesses de ses proches, la petite Antigone tient son rôle jusqu’à la mort.

En conclusion, aller voir la représentation d’Antigone d’Anouilh, mise en scène par Nicolas Briançon soulève beaucoup de questions. Tout en gardant les références à la pièce classique, il s’attache à la rendre la pièce actuelle et plus accessible à tous. Les décors, les tenues des comédiens, les jeux d’acteurs, les caractères légèrement différents de Créon et Antigone, l’accent mis sur la rébellion de la jeune fille permettent au public de découvrir un classique du théâtre engagé modernisé. Nicolas Briançon a réussi à rendre la pièce intemporelle et universelle.