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6ème et 1ère sous-sections réunies du Conseil d’Etat, 25 juin 2012

Par   •  10 Septembre 2017  •  2 145 Mots (9 Pages)  •  890 Vues

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II – Le strict encadrement de la procédure de retrait des actes administratifs créateurs de droits

Le Conseil d’Etat a peu à peu affiner sa jurisprudence en matière de retrait d’actes administratifs en instaurant un délai maximal de quatre mois suite à la prise de la décision pour opérer un retrait (A). de plus, afin de toujours mieux protéger les administrés, le retrait ne peut être effectué pour cause de simple faute de l’administration du fait des droits qui ont été acquis par l’administré (B).

A – L’existence d’un délai buttoir pour le retrait d’un tel acte par l’administration

Le Conseil d’Etat dans cet arrêt énonce que « l’administration ne peut retirer une décision individuelle créatrice de droits, si elle est illégale, que dans un délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ». Ici, M. A s’est vu versé une prime de risque d’octobre 2006 à mars 2008 donc le délai de quatre mois fixé par le Conseil d’Etat est plus que dépassé donc l’ONCFS ne peut plus demander la restitution et annuler l’acte. Ce considérant reprend les termes de l’arrêt d’assemblée du Conseil d’Etat, Ternon, du 26 octobre 2001.

Avant de se pencher sur cet arrêt, il faut observer le point de départ de la jurisprudence sur le retrait des décisions créatrices de droits qui est marqué par l’arrêt du Conseil d’Etat, Dame Cachet, du 3 novembre 1922. Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat reconnaissait la possibilité pour l’autorité administrative de retirer une décision créatrice de droits aussi longtemps qu’elle était susceptible d’être annulée pour irrégularité par le juge. Ici, il y avait donc un couplage entre le pouvoir de retrait de l’administration et le pouvoir d’annulation du juge. Le problème était que tant que la publication n’avait pas eu lieu, l’acte pouvait indéfiniment être retiré par l’administration, ce qui était source d’insécurité et d’instabilité juridique.

L’arrêt Ternon rompt donc avec la jurisprudence Dame Cachet en procédant au découplage du retrait par l’administration et du recours devant le juge. En effet, le Conseil d’Etat dit que « l’administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans un délai de quatre mois suivant la prise de décision ». Désormais, le délai de retrait se différencie de celui du recours, à la fois par sa durée de quatre mois au lieu de deux et par son point de départ qui est la date d’adoption de la décision et non pas celle de la publicité comme dans l’arrêt Dame Cachet.

Cependant, il est intéressant de préciser que la jurisprudence Ternon ne s’applique que pour les décisions individuelles explicites créatrices de droit. Par ailleurs, cette solution a été retenue également concernant l’abrogation des actes illégaux non réglementaires créateurs de droits. Ainsi, dans l’arrêt M. Coulibaly du 6 mars 2009, le Conseil d’Etat a également indiqué que l’abrogation n’était possible que dans les quatre mois suivant l’entrée en vigueur de l’acte, à la fin de ce délai il n’est plus possible de revenir dessus quand bien même l’acte serait illégal.

Cette jurisprudence s’inscrit encore une fois dans la volonté et la nécessité de protéger les droits acquis par les administrés. En outre, ceci a été inscrit dans la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

B - La non prise en compte de l’erreur de l’administration dans la procédure de retrait

Le Conseil d’Etat dans cet arrêt déclare que « la mise en paiement de cette prime de risque ne présentait pas le caractère d'une erreur de liquidation ». De plus, l’administration ne peut pas retirer cette prime « dès lors que le bénéfice de l'avantage en cause ne résulte pas d'une simple erreur de liquidation ou de paiement » mais de la simple erreur de l’administration qui a commencé à verser cette prime à M. A alors qu’il n’y était pas sujet. Dès lors, cela a fait naitre des droits pour M. A qui ne peuvent lui être supprimés.

Dans l’arrêt de section du 6 novembre 2002, Mme Soulier, le Conseil d’Etat avait énoncé que « la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en jugeant que, faute pour le maire de disposer d’un pouvoir d’appréciation pour attribuer ou refuser cet avantage à caractère exclusivement pécuniaire, sa décision pouvait être retirée à tout moment ». De ce fait, on a ici un exemple qui montre que la simple erreur de l’autorité administrative concernant le versement d’un avant à caractère pécuniaire ne peut justifier le retrait à tout moment d’une telle décision. Donc le choix du Conseil d’Etat dans notre affaire de ne pas tenir compte du fait que M. A ne remplissait pas les conditions nécessaires pour se voir attribuer la prime en question afin de contrer la décision de l’ONCFS de retirer cette prime se justifie par la jurisprudence Mme Soulier.

La jurisprudence est donc une nouvelle fois très protectrice des droits acquis par les administrés donc au nom du respect de ces droits, toute remise en cause d’une décision individuelle créatrice de droits doit être impossible sauf en cas d’illégalité ; dans ce cas l’abrogation ou le retrait n’est possible que dans un délai de quatre mois.

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