Décentralisation et territorialisation de l'action publique au Maroc
Par Junecooper • 21 Novembre 2018 • 13 892 Mots (56 Pages) • 633 Vues
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Cependant, le terme subit des modifications de sens depuis quelques décennies sur ses deux fondations administratives et politiques. La première transformation apparaît dans les années 80 et 90 avec la place croissante que prennent, dans les études sur l’action gouvernementale, les analyses consacrées aux conditions de mise en œuvre des politiques publiques à l’échelon local. Le second changement, plus contemporain, est lié à la responsabilisation croissante des collectivités locales.
À cet effet, nous pouvons redéfinir le territoire comme étant : « un construit socio-économique produit par les interactions entre les acteurs locaux: économiques, techniques, sociaux, institutionnels qui participent à résoudre un problème productif ou à réaliser un projet de développement collectif » (B. Pecqueur).
- Territorialisation
En géographie, la territorialisation est une approche des politiques publiques qui met l'accent sur les spécificités de chaque territoire, par opposition à une approche verticale organisant l'action publique par secteurs d'activités cloisonnés.
Une politique publique peut être à la fois territorialisée et thématique. Elle peut de manière générale concerner toutes les politiques publiques ou cibler une politique précise (ex: « Territorialisation de l'enseignement supérieur et de la recherche »[1]).
La territorialisation suppose une appropriation d'un territoire qui peut prendre plusieurs formes (« juridique[2], économique (la propriété) ou symbolique (le sentiment d'appartenance, de connivence »...)[3]. En toute logique, la gestion des ressources naturelles et du risque peut aussi être en partie territorialisée (pour le risque sismique ou d’inondation par exemple).
Dans le prolongement de l'acception géographique du terme, on parle également de territorialisation des entreprises. L'ancrage territorial des entreprises est une forme de territorialisation.
Le concept est également utilisé en philosophie, notamment sous la forme négative par Gilles Deleuze et Félix Guattari (déterritorialisation).
- La territorialisation de l’action publique
D’abord, on entend par l’action publique toutes les interventions de l’Etat et des collectivités, avec les problèmes de coordination que pose un système à intervenants multiples, d’autant que les acteurs privés sont directement visés et concernés[4].
Alors, la territorialisation de l’action publique passe par la définition et la mise en œuvre d'une stratégie de développement qui permet d'adapter les politiques sectorielles aux enjeux locaux et donc aux contraintes et opportunités locales et à leurs évolutions (on parle par exemple de territoires « en mutation » ou « en recomposition »).
Plus globalement, la territorialisation désigne un processus visant une construction du « territorial » ; où le territorial est une représentation du territoire, c'est-à-dire, une construction identitaire par différents acteurs sur plusieurs échelles.
Elle a un impact sur la construction et l'évaluation des programmes et des processus décisionnels ainsi que sur l'organisation des services.
- Décentralisation et déconcentration de l’action publique
- La déconcentration
La déconcentration désigne un mode d'organisation de l'administration dans lequel certains pouvoirs sont délégués ou transférés d'une administration centrale vers des services répartis sur le territoire, dits services déconcentrés ou services extérieurs. Le but est d'améliorer l'efficacité de l'Etat en décongestionnant l'administration centrale et en accélérant les prises de décisions au niveau local.
Au Maroc, la déconcentration est fondée sur le principe de subsidiarité (lois organiques relatives aux collectivités territoriales, 2015) qui fait que l'échelon le plus élevé ne doit assurer que les missions ne pouvant être exercées à un niveau inférieur.
À la différence de la décentralisation, les services déconcentrés dépendent directement du pouvoir central et font partie de la même personne morale que celui-ci.
Considéré comme un aménagement technique de la centralisation, la déconcentration a été jugée insuffisante pour mener à bien la modernisation de l'Etat. En conséquence, le législateur a développé la décentralisation vers les collectivités territoriales qui, elles, disposent de leur propre personnalité morale.
- La décentralisation
Nous pouvons définir la décentralisation comme étant une politique de transfert des attributions de l'Etat vers des collectivités territoriales ou des institutions publiques pour qu'elles disposent d'un pouvoir juridique et d'une autonomie financière. Le transfert de ces attributions, qui restent néanmoins sous la surveillance de l'Etat, permet à ce dernier de décharger ses administrations centrales et de confier les responsabilités au niveau le plus adapté.
On distingue en général :
- La décentralisation territoriale :
Elle permet à des représentants élus (Conseil régional, Conseil départemental ou Conseil municipal) de régler des affaires administratives. Le préfet est chargé de vérifier la légalité des décisions prises par ces autorités locales.
- La décentralisation fonctionnelle ou technique :
Elle permet à des établissements publics à vocation spéciale comme les universités et les hôpitaux, de disposer d'une certaine autonomie administrative, avec leurs propres organes de décision (ex : conseil d'administration) et un budget autonome. La collectivité de rattachement assure néanmoins un pouvoir de contrôle.
- La gouvernance
La gouvernance désigne l'ensemble des mesures, des règles, des organes de décision, d'information et de surveillance qui permettent d'assurer le bon fonctionnement et le contrôle d'un Etat, d'une institution ou d'une organisation qu'elle soit publique ou privée, régionale, nationale ou internationale.
Selon l'IT Governance Institute, la gouvernance a "pour but de fournir l'orientation stratégique,
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