Jean Marc Ela, Repenser la theologie Africaine, recension et critique!
Par Orhan • 19 Avril 2018 • 5 615 Mots (23 Pages) • 601 Vues
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C’est au bout de la refondation radicale du sens de l’évangile que l’on pourra rendre à l’homme sa mission primordiale définie par les ‘‘tria munera’’. Tel est selon l’étudiant l’idée centrale de la quatrième sous-partie intitulée : Restituer à l’être humain sa vocation de prêtre de la création. Cette dernière part de la problématique suivante : comment parler de Dieu en restant à l’écoute de la rue, du village, du quartier sans renoncer à la prétention de tenir un discours qui se veut scientifique ? Cette partie aborde la question écologique dont la gravité est évidente quand on sait que la forêt revêt une importance culturelle fondamentale pour les peuples d’Afrique. Cette situation de destruction de la forêt interpelle pleinement l’Église qui ne doit pas se limiter à l’écologie de l’âme. Ainsi, restituer à l’homme sa vocation de prêtre de la création signifie qu’il faut se demander comment mettre en valeur les ressources de la nature sans abîmer l’environnement dont l’être humain est une partie intégrante ? Cette question, affirme le panéliste est d’actualité dans les pays d’Afrique où les formes de pénurie et de précarité sont le fardeau quotidien de millions d’hommes et de femmes. Il faut donc que l’africain s’interroge sur le sens écologique de l’évangile. L’urgence de la question écologique oblige à relire la bible en tenant compte du contexte africain, ce qui peut susciter une culture du respect de la création comme l’a voulu le créateur.
Le panelliste pense enfin que c’est à partir de cette herméneutique nouvelle que l’on peut comprendre ce que veut dire croire en Jésus-Christ aujourd’hui, thème qui est aussi le titre de la cinquième et dernière sous-partie. Ce besoin part de la question que se posent les chrétiens d’aujourd’hui, à savoir faut-il encore croire ? Pour notre auteur, croire est avant tout une décision qui fait suite au constat que le christianisme est une religion de la parole et que dans cette parole, c’est Dieu qui parle en Jésus-Christ. Et demeurer en communion avec lui nécessite une démarche lucide et surtout libre et volontaire. Il s’agit d’un engagement fort qui nous ouvre à sa parole et nous fait comprendre l’évangile comme un message de liberté. La vérité qui libère est celle qui situe le mouvement de la foi en profondeur sur les chemins de liberté. Dieu est toujours à l’œuvre dans l’univers, quelle que soit la situation à laquelle l’homme fait face. S’il se situe dans une dynamique d’engagement libre et volontaire, il est libre. Croire en Jésus-Christ c’est d’abord situer la foi dans la trame même de l’histoire du croyant. Autrement dit, il faut abandonner cette attitude piétiste déconnectée des structures sociales et prêter attention aux maux des masses qui souffrent et aspirent à la libération. Cela entraîne immanquablement une nouvelle façon de croire qui implique d’abandonner l’humanité d’emprunt vécue par l’africain ; il doit apprendre à vivre la foi en Christ avec son âme africaine, c’est-à-dire une âme embarquée dans une culture et dans une histoire.
Panelliste n°2 : Jean Clément OBOUH FEGUE ETENDE
Le second panelliste avait pour mission de condenser la deuxième partie connue sous le titre de : Le Temps des païens. Pour lui, Jean-Marc ELA part de la tradition vétérotestamentaire pour montrer que le dépassement de la théologie de l’élection à travers l’ouverture à l’autre n’annule pas l’élection d’Israël comme peuple de Dieu, mais nous introduit plutôt dans la vision universaliste du salut. En ce sens, Israël a donc pour fonction, de représenter tous les peuples, voilà pourquoi « ce qui est arrivé et arrive en Israël est un signe pour les nations ; cela les concerne toutes »[1]. Le Temps des païens est donc celui des nouveaux acteurs de la mission, temps d’une Eglise, celle d’Afrique en particulier, appelée à être un signe d’espérance au milieu d’un continent généralement saturé de tristes nouvelles. Le temps des païens est également celui du langage de la foi de l’homme devant Dieu, une foi qui est Vie contemplative et mission[2], c’est-à-dire voir, avec quel langage, faut-il, en assumant la réalité, redire la foi ?
Pour ce qui est des nouveaux acteurs de la mission,[3] poursuit l’étudiant, Jean-Marc ELA commence d’abord par rappeler que la mission est une, celle du Christ et de l’Esprit ; c’est à cette mission que l’Eglise prend part à chaque étape de la proclamation de Bonne Nouvelle. L’enjeu ici selon notre auteur est de « sortir » d’un lieu de mission à l’autre, même s’il admet que cela a toujours été « un temps d’épreuve pour le christianisme. »[4] Ensuite, l’auteur montre comment l’appel universel au salut s’enracine dans l’Ancien Testament, puis il établit les liens qui existent entre Jésus, les païens et l’invention du christianisme[5]. Ainsi, partant d’Is 45, 1, Jean-Marc ELA affirme que « Dieu voit dans un païen, Cyrus, roi de Perse, qui ne connait pas Dieu, un instrument dont il se sert (…) comme il l’a fait pour Moïse »[6] dans Ex 3, 10. L’enjeu ici est le refus de toute forme d’exclusivisme, car même si Jésus est d’origine juive, il ne s’enferme pas dans la prison d’une tribu, d’une race ou d’un sexe ; d’ailleurs il n’hésite pas d’introduire des femmes étrangères dans sa généalogie (cf Mt 1, 5-6 ; Rt 4, 12-22). En reprenant les mots de Baba Simon qui disait : Jésus-Christ c’est l’homme, notre auteur atteste avec l’évangéliste Luc que « Jésus est solidaire de tout être humain »[7]. Dès lors, « il ne suffit plus d’appartenir à l’Israël selon la chair pour avoir part aux biens des temps messianiques. Seules la conversion à l’évangile et à la foi en la personne du Fils de Dieu fait homme permettent d’entrer en possession de ces biens »[8]. La vocation de Paul en est une belle illustration, car selon l’auteur, « en se faisant voir à Paul (Ac 26, 16), Jésus ressuscité fait de lui un instrument de choix dans la mission au loin, vers les païens (Ac 22, 21 ; 26, 26). En rigueur de termes, Paul est le témoin le plus imprévisible : celui que personne n’attendait vraiment pour cette mission d’ampleur universelle »[9].
Aussi, l’auteur fait-il remarquer que, à travers la rencontre entre Philippe et l’Ethiopien, c’est le christianisme qui part en direction du sud, vers l’Afrique, bien avant l’Asie et l’Europe. Il nous invite à l’écoute de l’Esprit dans ce nouveau tournant où il faut s’interroger sur l’intervention des acteurs indigènes dans l’évangélisation du continent noir. N’est-ce donc pas l’heure
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