Être conscient est-ce subir sa conscience?
Par Christopher • 9 Novembre 2018 • 1 233 Mots (5 Pages) • 645 Vues
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dont il a conscience, sans se questionner quant à leur cause externe. Il subit donc cette conscience partielle puisqu’il vit dans l’illusion de la liberté, elle-même véhiculée par cette incapacité à se rendre compte de l’origine des désirs et appétits qui animent l’homme. Cette conscience subie et partielle, puisque déterminée par ces causes extérieures dont les hommes ne savent rendre compte, éloigne l’homme de la connaissance de soi et de la vérité.
Cette conscience subie nous empêche-t-elle d’être libre en tous points ? Si toute conscience est déterminée, elle offre toujours néanmoins la possibilité d’une prise de recul qui est, en soi une forme de liberté.
La conscience humaine peut être envisagée comme la mise en relief de la conscience immédiate grâce à la conscience réflexive (on ne peut percevoir sans percevoir que l’on perçoit). Comme le montre Locke dans ses travaux et notamment dans ses Essais sur l’entendement humain, l’homme a la capacité de « se considérer soi-même comme soi-même ». En effet, contrairement aux autres êtres vivants, l’homme peut s’identifier, par rapport aux autres, comme une personne singulière et délimitée, là où la pierre de l’exemple de Spinoza ne le pourrait pas. On appellera cela la conscience de soi. L’homme parvient à s’identifier à lui-même quel que soit l’environnement où il se trouve. Il a même conscience de lui-même dans le temps, malgré ses évolutions. La conscience n’est donc pas uniquement déterminée par des causes externes. Dans quelle mesure cette conscience de soi permet-elle d’atteindre une forme de liberté ?
Indubitablement, la liberté passera par une prise de recul, une distance que nous établissons entre notre personne et la conscience de notre personne. Il ne s’agit plus seulement d’être conscients de nos actes mais d’en analyser les causes profondes. Pour cela, il faut d’abord accepter que nous sommes ignorants. La capacité à surmonter l’illusion et donc à dépasser notre conscience partielle, qui est une étape primordiale d’accès à la liberté, en découle. C’est à ce prix que l’individu sera capable d’identifier ce qui le détermine, et se rendre compte que telle ou telle chose influe sur ses choix. Cette prise de distance requiert un gros travail d’introspection ainsi que d’analyse du sens de ses comportements. La liberté passe, dans un sens, par l’abandon du sentiment de liberté initial qui maintient l’homme dans l’illusion que ce dont il a conscience lui permet d’être libre. Dans la prise de recul, grâce au travail d’introspection et de questionnement qui rend possible une meilleure connaissance de soi, et donc de ce qui nous détermine, la conscience s’élargit. Elle n’est plus limitée à la conscience superficielle de ce que nous ne pouvons, en fait, que subir. Cette conscience plus large permet alors d’agir sur le monde, non plus simplement de le subir (comme la pierre, qui a conscience de ses mouvements mais ignore l’action du vent) mais de le transformer.
En définitive, il semble difficile, initialement, de considérer la conscience autrement que comme une conscience subie. Déterminé par des causes extérieures, l’homme vit dans une illusion de liberté du fait de sa conscience partielle. La conscience ne saurait cependant se limiter à la conscience de ce que nous ne pouvons que subir. Il est possible de se connaître soi-même comme soi-même, en tant qu’être singulier, en dépit de causes externes comme le temps qui passe. Elle ne dépend donc pas entièrement des forces extérieures qu’exerce sur nous le monde dans lequel nous vivons. Ainsi, une prise de distance par le biais de la conscience de soi peut, après un long travail sur soi, aboutir à une plus grande liberté, où l’on cesse de simplement subir ce dont on a conscience.
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