Evolution de la notion d'entrepreneur et de firme
Par Andrea • 17 Janvier 2018 • 3 279 Mots (14 Pages) • 636 Vues
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font ni bénéfices, ni pertes», ce qui fait perdre tout sens à cette notion.
Mais la vision de Walras fait écho à celle de Schumpeter, qui fera de la recherche du profit un motivation secondaire de l’entrepreneur. Schumpeter qui par ailleurs considérera Léon Walras comme «le plus grand des économistes» dans son Histoire de l’analyse économique.
II – La consécration du rôle de l’entrepreneur chez Schumpeter
Un contemporain de Schumpeter, Frank Knight, économiste américain, est principalement connu pour sa distinction entre risque et incertitude ce qui permet l’analyse de l’amplitude des marges de profit de l’entrepreneur. En effet, Knight nous explique que deux variables se présentent à l’entrepreneur : le risque, assurable, et l’incertitude, non assurable. L’incertitude n’est pas assurable dit-il car elle est incalculable, aussi bien par le raisonnement que par les statistiques, il nous est donc impossible de l’évaluer. Le profit réalisé par l’entrepreneur sera alors aussi élevé que l’est l’incertitude. Cette incertitude est liée à l’évolution économique selon Knight.
Les fluctuations de l’économie font partie intégrante de la vision schumpéterienne de l’entrepreneur. Il les utilise notamment dans son analyse des cycles Kondratiev pour expliciter la notion d’innovation, en relation étroite avec celle de l’entrepreneur chez Schumpeter. En effet, l’économiste russe Nikolaï Kondratiev théorisa ses cycles économiques, soit un ensemble de phases d’expansion et de récession se répétant à l’identique dans le temps, en 1926. Il distingue des cycles d’une cinquantaine d’années, chacun divisé en 2 phases : une phase d’essor des investissements, de la production et des profits (A), et une seconde phase d’épuisement des industries motrices (B), qui peut se traduire par une récession voir même, une dépression. Schumpeter dans son analyse, nous explique qu’au début de ce que nous appellerons la phase A il y a des «grappes d’innovations» et donc d’entrepreneurs. L’innovation dans le vocabulaire schumpéterien c’est l’exécution d’une nouvelle combinaison productive. Ces innovations peuvent être de produit ou de marché et ainsi augmenter l’offre. Il rejoins ici Jean-Baptiste Say et la fameuse «Loi de Say», soit l’offre qui crée sa propre demande (même si cette formulation sera attribuée à John Maynard Keynes par la suite). Mais l’innovation peut également être de procédé, d’organisation, ou dans le choix des matières premières. Dans ce cas, c’est la productivité qui augmente, faisant baisser les coûts de l’entreprise et ainsi augmenter son profit. Le profit est le revenu dominant dans une économie capitaliste. Schumpeter était un économiste hétérodoxe : partisans du capitalisme, il était pourtant convaincu de sa disparition. C’est d’ailleurs dans la suite de son analyse des cycles Kondratiev qu’il l’expose. La diffusion du progrès technique entraîne de l’inflation, ce qui permet la rentabilité des entreprises non innovatrices. Mais au bout d’un certain temps, on peut observer une baisse de la hausse de la productivité ainsi qu’une saturation des marchés, le taux d’équipement avoisinant 100%. On entre alors dans la phase B du cycle : la baisse de la demande entraîne de la concurrence des prix, une déflation, et plonge l’économie dans la récession.
Arrive alors la définition de l’entrepreneur selon Schumpeter : c’est celui qui tente désespérément d’empêcher le retour à l’économie stationnaire. Pour cela, il définit les caractéristiques propres qu’il voue à l’entrepreneur : ce n’est pas nécessairement un savant ou un capitaliste mais plutôt un aventurier passionné qui «nage à contre-courant», c’est le Révolutionnaire de l’économie. Schumpeter distingue cependant l’inventeur, qui découvre ou élabore, de l’entrepreneur qui introduit sur le marché. Il nous dit que l’entrepreneur nage à contre-courant car pour lui, l’entrepreneur est un pionner qui par la suite, ouvre la voie à de nouveaux entrepreneurs. Le fait qu’il soit le premier sur le marché lui permet de réaliser une «rente de monopole» soit un profit élevé puisque étant en situation de monopole il peut fixer un prix très haut. L’espérance de profit dans ce secteur incite d’autres entrepreneurs à l’imiter, conduisant à une «tempête de destruction créatrice» selon les mots de l’économiste autrichien. «Tempête» car l’innovation est un processus cumulatif. Mais c’est aussi source d’obsolescence des anciens biens, il y a donc destruction technique mais aussi économique (licenciements, faillites...). Cette destruction s’illustre dans cette citation de Schumpeter : «Le nouveau ne sort pas de l’ancien mais apparaît à côté de l’ancien, lui fait concurrence jusqu’à le ruiner.», parue dans Capitalisme, socialisme et démocratie. Enfin, l’innovation est «créatrice» car il y a création technique et économique (de marchés, d’entreprises, d’emplois..).
On peut néanmoins pointer quelques limites à cette définition pourtant conséquente de l’entrepreneur schumpéterien. D’abord la fonction de l’entrepreneur ne peut se limiter à exécuter des combinaisons nouvelles, l’entrepreneur doit établir des stratégies à moyen et long terme. De plus, malgré les nombreux qualificatifs apportés par Schumpeter, on ne sait pas vraiment quel est le «talent» de l’entrepreneur, ni comment l’identifier. Pour finir, cette fonction n’est pas nécessairement incarnée par une personne physique, mais peut être une entité à part entière. C’est le cas des nouvelles conceptions de l’entrepreneur, qui sont abordées dans les termes de firme plutôt que d’entrepreneur.
III – L’entrepreneur, de personne physique à entité abstraite
Dans un article de 1937, Ronald Coase économiste britannique, se questionne sur la nature de la firme. Il en ressort que c’est un «mode de coordination économique alternatif au marché» où la coordination des comportements passe par la hiérarchisation et non pas par les prix car cela entraînerait des coûts de transaction. La firme selon Coase est donc caractérisée par l’existence d’un pouvoir d’autorité qui s’illustre dans la hiérarchisation. La question de la nature de la firme est fondamentale et a entraîné une nette séparation des économistes sur ce sujet. Il y a tout d’abord les partisans de Coase qui perçoivent la firme comme un «nœud de contrat» et ceux qui placent les relations entre individus au centre la firme et en font donc un «lieu de compétences
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