Lien de causalité
Par Junecooper • 11 Janvier 2018 • 4 812 Mots (20 Pages) • 758 Vues
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Cassation a dit qu’il y a deux causes possibles : la négligence du propriétaire et le vol du chéquier. Elle a alors considéré qu’il fallait retenir comme seule cause du dommage le vol et non la négligence (arrêt de la 2ème civ. 7 décembre 1988).
(2)Parmi les différents éléments qui peuvent constituer la faute, la jurisprudence montre une tendance des juges à retenir souvent comme cause du dommage l’évènement le plus proche dans le temps = la causa proxima.
Exemple : un locataire cause un incendie et le bailleur doit remettre les lieux en état. Les travaux entrepris sont mal effectués. Une inondation est provoquée chez le voisin du dessous. Il y a deux causes possibles : l’incendie et les travaux mal effectués. La Cour a considéré ici que les travaux étaient seuls pris en compte et que le premier locataire n’était pas responsable du dommage causé au voisin. (3ème ch. civile 19 février 2003).
On considère qu’il faut retenir la responsabilité de la dernière personne qui a commis le dommage. C’est assez problématique pour la victime. Souvent, la dernière personne à pouvoir éviter que le dommage arrive est la victime elle-même. On se retrouve à devoir réduire la possibilité pour la victime d’obtenir réparation.
Exemple : les procès contre l’industrie du tabac. On a des preuves que cette industrie a longtemps utilisé des substances nocives. Des consommateurs ont voulu se retourner vers les fabricants. La dernière cause est la consommation des cigarettes. La Cassation a considéré que la personne a choisi librement de consommer les produits et donc elle-même à l’origine du dommage (20 nov. 2003 1ère civ).
On peut résumer de cette manière :
⦁ Elle va utiliser les théories selon le résultat auquel elle veut aboutir : indemniser ou non la victime.
⦁ Parmi les causes possibles de gravité différente, elle va avoir tendance à retenir la cause la plus grave.
⦁ Parmi les causes possibles, elle va avoir tendance à retenir celle la plus proche dans le temps de la réalisation du dommage.
2. Les questions complexes
Il y a d’abord la question des dommages causés en groupe, des préjudices en cascade et enfin des prédispositions de la victime.
⦁ Les dommages causés en groupe
C’est la problématique des dommages causés par une ou plusieurs personnes appartenant à un même groupe. On ne peut pas déterminer quelle personne est responsable. On peut alors envisager deux attitudes :
⦁ la charge de la preuve du lien de causalité pèse sur le victime : elle est incapable d’identifier la personne à l’origine de son dommage, la demande de la victime doit être rejetée.
⦁ la victime, à défaut de pouvoir apporter la preuve de la personne à l’origine du dommage, établit qu’une des personnes du groupe est nécessairement à l’origine du dommage, on doit retenir la réparation du groupe tout entier. Il va falloir alors retenir une faute commune du groupe ou la garde en commun.
⦁ Les préjudices en cascade
On rejoint la problématique tenant au caractère direct du dommage. L’idée est qu’un même fait générateur peut produire des préjudices en cascade.
Exemple de Pothier : « je vais à la foire et j’achète une vache. Le vendeur me vend une vache malade = premier dommage car la vache malade ne me sert à rien. La vache, à mon domicile, contamine tout mon troupeau = deuxième dommage car mon troupeau est anéanti. Mon troupeau étant anéanti, je ne peux plus travailler = troisième dommage car je suis ruiné ».
Dommage 1 : vache malade
Dommage 2 : troupeau contaminé
Dommage 3 : ruine du fermier
Que peut-on demander au vendeur qui a vendu la vache malade ? Rembourser la vache malade, l’indemnisation de la perte du troupeau, la ruine du fermier ?
Il faut un moment où il faut arrêter le curseur et dire qu’il y a un lien trop indirect entre le fait générateur et le dommage causé.
La Cour de cassation a donc une approche assez casuistique du moment où il faut placer le curseur.
Exemple : un homme est blessé dans un accident de la circulation. Cet accident le laisse handicapé. 10 ans plus tard, sa maison brule. Comme il ne peut pas bouger rapidement, il va se retrouver coincé et va mourir intoxiquer. Ses enfants sont allés agir contre l’auteur de l’accident car sans l’accident, il ne serait pas mort.
La Cour a refusé car elle a considéré que la cause directe du dommage était l’incendie et a refusé de condamner l’auteur de l’accident de la circulation.
⦁ Les prédispositions de la victime
Quelle est l’influence des prédispositions de la victime sur le lien de causalité ? Peut-elle venir rompre le lien de causalité entre le fait générateur et le dommage ?
Exemples : un homme a des problèmes cardiaques et a déjà fait plusieurs infarctus. Il se retrouve dans un accident avec un choc léger mais étant cardiaque, ce choc va produire un nouvel infarctus qui lui sera fatal. Est-ce que l’auteur du choc léger est responsable alors que sans les prédispositions de la victime, cette dernière ne serait pas morte ?
Un individu est borgne et une personne lui crève par accident son autre œil. Est-ce que cette personne doit être responsable du préjudice d’être devenu aveugle ou du préjudice d’avoir crevé un seul œil ?
La jurisprudence a mis longtemps à adopter des solutions cohérentes. Elle adopte une triple distinction :
⦁ principe de base : dès lors que les prédispositions ne s’étaient pas antérieurement manifestées, le dommage devra être intégralement réparé – arrêt 2ème civ. 10 juin 1999 = le droit de la victime à obtenir l’indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection qui en est issue n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable.
⦁ Exception au principe : lorsque les prédispositions de la victime s’étaient manifestées antérieurement, on en tient compte et la réparation ne doit porter que sur le nouveau préjudice.
Exemple :
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