Nos souvenirs nous appartiennent-ils totalement?

...

Nos souvenirs ne seraient personnels qu’en apparence, car les souvenirs personnels et les souvenirs collectifs s’articulent entre eux. Ne parvenons-nous pas, la plupart du temps, à penser et à nous souvenir en commun d’événements passés ? Certes, mais lorsque ce « souvenir commun » est relaté par chacun de nous, n’en avons-nous pas chacun un souvenir précis et individuel ? Avec nos propres émotions, notre caractère propre, notre état psychique, ne relatons-nous pas les circonstances d’une manière différente bien que nous parlions du même événement ? Si les « souvenirs individuels » des vétérans de la deuxième guerre mondiale ont permis de former des « souvenirs collectifs », chaque individu en gardera un souvenir particulier qui lui est propre. Après tout, un souvenir n’est-il pas avant tout une histoire qu’on se raconte à nous-mêmes, comme le pense Simon-Daniel Kipman, psychiatre et psychanalyste ? A force de le ressasser en mémoire ne reconstruisons-nous pas une autre scène ? Effectivement, il ne faudrait pas croire que nos souvenirs soient fixes comme des photographies qu’on observe. En réalité, nous les recomposons tout au long de notre existence chaque fois qu’ils nous reviennent à l’esprit, en changeant des détails et nous leur donnons, sans le vouloir, une autre interprétation que celle initiale.

Pour conclure, la notion de « souvenir » reste jusqu’à nos jours un sujet assez controversé de part la complexité qu’il suscite chez les psychologues et les psychanalystes. Si pour certains, nos souvenirs nous appartiennent en totalité parce qu’ils ne ressemblent pas à ceux des autres, et que pour d’autres les souvenirs «individuels » ou « personnels » n’existent pas mais se confondent avec les souvenirs « collectifs », je dirais qu’entre ces deux camps il n’existe qu’un pas. En fait, qu’on les appelle « personnels » ou « collectifs », nos souvenirs sont empreints d’une certaine singularité, de sentiments et d’émotions particulières qui dépendent d’un individu à l’autre, et c’est pourquoi nos souvenirs restent totalement les nôtres.