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Le personnage de roman du XVIIIe siècle à nos jours

Par   •  13 Novembre 2018  •  7 492 Mots (30 Pages)  •  419 Vues

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L’entrée dans l’univers du roman

La longue métaphore filée qui indique le moment où l’histoire commence, la mi-journée (« le soleil avait achevé plus de la moitié de sa course », l. 1) inscrit le récit dans un registre épique. Dieux, personnages chevaleresques et êtres fantastiques pourraient peupler et animer cet univers.

Cette image grandiloquente laisserait donc penser à un récit héroïque si, très vite, l’auteur ne venait lui-même apporter malicieusement les clés de cette entrée parodique :

« Pour parler plus humainement et plus intelligemment, il était entre cinq et six quand une charrette entra dans les halles du Mans » (l. 7-8).

Le char du soleil qui avait contribué à construire le registre épique, renforcé par l’évocation des chevaux, « ils ne s’amusaient qu’à faire des courbettes » (l. 4-5), se transforme brusquement en charrette, un moyen de transport bien trivial et commun qu’on imagine brinquebalant car tiré par « quatre bœufs fort maigres » (l. 9), ce que renforce aussi l’évocation des « halles »(l. 8) dans lesquelles elle pénètre, un univers finalement réaliste situé avec précision, au Mans.

L’auteur semble jouer la carte de la complicité avec le lecteur auquel il s’adresse presque directement ; cela se confirmera plus loin dans le texte. Il s’agira de jouer avec les attentes du lecteur.

L’entrée en scène des personnages

On évoque d’abord l’attelage et le contenu de la charrette. Les personnages sont ensuite identifiés de la façon la plus neutre correspondant à un regard extérieur ; il y a là « une demoiselle » (l. 13), « un jeune homme » (l. 14), « un vieillard » (l. 28), trois personnages caractérisés de manière contrastée par leur apparence et leurs vêtements, entre ville et campagne pour la jeune fille, entre misère et bonne mine pour le jeune homme et, bien que décente, dans une grande pauvreté pour le vieillard. Mis en relation avec le titre et le thème de ce premier chapitre, (l’Arrivée des comédiens au Mans) ces trois personnages correspondent aux rôles convenus de la comédie représentés par le couple des jeunes amoureux et le vieillard qui s’oppose à leurs projets.

De ces trois personnages, celui du jeune homme est le plus développé. Son portrait est très construit, partant de son visage caché par « un grand emplâtre » jusqu’à ses pieds chaussés de « brodequins à l’antique ». L’énumération de chaque partie de son corps donne lieu à des précisions sur ses vêtements, en piteux état, et ses accessoires qui nous renseignent sur ses activités précédant le moment de cette histoire: les oiseaux qu’il porte en bandoulière pourraient être le résultat d’activités de braconnage « pies, geais et corneilles » (l. 17), l’emplâtre pourrait empêcher qu’on le reconnaisse ou soigner des mauvais coups reçus, à moins qu’il ne s’agisse de restes de maquillage, et enfin, ses brodequins crottés disent qu’il a battu la campagne par tous les temps.

Tous les détails de ses vêtements, leur caractère disparate, composite, la pauvreté des matières et le mauvais état de l’ensemble disent encore l’extrême pauvreté de la petite troupe.

Ce portrait cocasse pourrait être le symbole du comédien qui emmène avec lui ses rôles et sa vie. Le narrateur semble vouloir partager avec son public un regard amusé sur sa narration, l’inscrivant, comme on l’a vu, dans un univers épique pour rapidement passer à un registre burlesque et contrasté : les oppositions qui se succèdent sont pour la plupart nettement comiques et l’exagération en est un ressort fréquent.

Non content de cette connivence, il interpelle à travers ses commentaires son lecteur : « Pour parler plus humainement et plus intelligemment… » (l. 8) ; « Quelque critique murmurera de la comparaison à cause du peu de proportion qu’il y a d’une tortue à un homme ; mais j’entends parler… » (l. 32-33) ; « je m’en sers de ma seule notoriété. Retournons à notre caravane. » (L. 33-34).

En s’adressant ainsi au lecteur, il fait de lui son complice, mais il lui signifie également sa liberté de ton et lui donne en quelque sorte ses règles du jeu. Il n’hésite pas à rompre l’illusion du roman, il nous fait entendre sa voix d’auteur sans complexe.

Un univers théâtral :

Dès le titre le lecteur sait qu’il s’agit ici d’une troupe de comédiens. Chacun de personnages est vêtu des costumes des rôles qu’il peut interpréter, tenues disparates qui disent leur pauvreté aussi. D’autres détails évoquent les toiles peintes qui servent de décors tandis que coffres et malles doivent être emplis de costumes et d’accessoires. La comparaison des brodequins du jeune premier donne lieu à l’évocation des cothurnes des acteurs de l’Antiquité.

Enfin le vieil homme porte une basse de viole qui doit accompagner des intermèdes musicaux. Tout ici permet de restituer l’univers du théâtre et annoncer une représentation qui devrait avoir lieu dans les halles du Mans où arrivent les comédiens.

Synthèse

L’arrivée de cette petite troupe de comédiens est en soi un spectacle de comédie. Sur fond des halles du Mans, les personnages « entrent en scène » dans des costumes inattendus pour un spectacle imprévisible pouvant tenir à la fois de la farce et de la tragédie.

Le plan détaillé de votre explication pourrait être celui-ci :

I. je veux montrer que…le roman se présente comme une triple ouverture

1. Nous entrons dans le roman (la description d'un cadre-spatio-temporel)

2. Nous entrons dans la troupe (le premier contact avec les personnages et leur portrait)

3. Nous entrons au théâtre (tous les éléments qui nous ramènent au monde du théâtre)

II. je veux montrer que… c’est aussi un pacte de lecture

1. Nous rencontrons un auteur (traces de sa subjectivité)

2. Nous rencontrons une vision personnelle du roman (remarques sur sa conception de l'écriture)

Il s’agira toujours d’expliquer la manière dont le texte est construit et non de le résumer ou de raconter son contenu. C’est

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