La Beauté, une histoire de goût
Par Ramy • 1 Octobre 2018 • 2 298 Mots (10 Pages) • 641 Vues
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Axe 2 : LE GOUT ET LE SENTIMENT DE LA BEAUTÉ , ET SA UNE DIMENSION INTELLECTUELLE
A) LE GOUT ET LE SENTIMENT DE LA BEAUTÉ
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Le goût semble distinct de la beauté. Seules les choses vues ou entendues sont belles. On ne parle pas d’une belle saveur. Au sens propre, le goût désigne premièrement un des cinq sens et deuxièmement les qualités de ce sens. On parle du goût d’un plat. Au sens figuré on dit troisièmement de quelqu’un qu’il a du goût pour quelque chose, c’est-à-dire qu’il a un désir ou un penchant pour quelque chose qui n’est pas nécessairement une saveur. Enfin, quatrièmement, dire de quelqu’un qu’il a du goût c’est estimer qu’il a le sens de la beauté. D’où vient cette métaphore ?
Le sentiment de la beauté n’est pas le simple plaisir qu’on peut nommer l’agréable. Ce dernier repose sur le désir. Il est relatif non seulement aux individus mais même à différents moments de l’existence de l’individu. L’agréable est l’objet d’une appropriation personnelle qui exclut autrui. Ce qui me plait n’a pas à plaire aux autres puisqu’il faut que je me l’approprie. Je puis même être satisfait que ce qui me plaît ne plaise pas aux autres. Et si me plaît ce qui plaît aux autres, c’est par le mimétisme du désir qu’on peut alors avec René Girard dans La violence et le sacré (1972) distinguer du besoin mais qui n’a rien à voir avec le goût. En effet, avoir du goût, c’est revendiquer la valeur de son jugement. La métaphore du goût peut provenir de la nécessité que le sujet lui-même éprouve la beauté.
La beauté, en première analyse, est indépendante du désir. On apprécie la beauté de ce qu’on ne peut désirer. On apprécie aussi ce qu’on peut désirer mais qu’on ne désire pas sur le moment. Et il arrive qu’on ne juge pas beau ce qu’on désire. Distinguer le beau de l’agréable comme Kant le soutient dans la Critique de la faculté de juger paraît donc essentiel. Est-ce à dire qu’on peut démontrer qu’une chose, une personne ou une œuvre est belle ? La métaphore du goût s’explique-t-il par l’impossibilité de démontrer la beauté ?
La beauté a un privilège sur les autres Formes ou Idées : c’est la seule qui se manifeste dans le sensible et qui permet à l’âme, par l’émotion qui est la sienne, de sentir que la vérité est ailleurs. Cette intuition de la beauté variable selon les hommes explique la relativité des jugements de fait mais implique son illégitimité en droit. Qui a vu la beauté la connaît et la reconnaît dans les choses belles. Mais elles ne le sont pas toutes au même point et ne peuvent l’être pleinement sans quoi elle serait la Beauté elle-même. Il y a donc dans toute chose, dans toute œuvre, dans toute personne une certaine absence nécessaire de beauté qui peut être ce qu’un individu saisit. Il est clair qu’une telle conception exclut que la Beauté puisse être de l’ordre du goût. Platon exclut que la beauté dans l’hypothèse où elle produit du plaisir puisse être autre que visuelle ou auditive comme on le voit dans l’Hippias majeur.
B) LA BEAUTÉ AIT UNE DIMENSION INTELLECTUELLE[pic 5]
La beauté ait une dimension intellectuelle peut plutôt se penser comme harmonie, adéquation des parties et du tout, des moyens et des fins. À ce compte, la beauté serait l’objet d’une saisie au moins confuse d’une relation intellectuelle. On peut comprendre que les mathématiciens parlent de la beauté ou de l’élégance d’une démonstration qu’ils sont les seuls à percevoir. En droit, quiconque peut, en faisant des mathématiques, arriver à cette perception. Le plaisir que suscite la beauté serait de nature plutôt intellectuel. Il faut le distinguer des plaisirs dus au prestige social, aux évocations, etc. Par exemple, un morceau de musique incompris peut plaire parce qu’il évoque un souvenir, une personne, etc. Il peut plaire parce qu’il a une valeur sociale qui classe celui qui le goûte ou tout au moins le prétend. Ce n’est pas alors un plaisir esthétique. Kant en ce sens a eu raison, dans la Critique de la faculté de juger (§ 16 et § de distinguer la beauté libre de la beauté adhérente. On peut ajouter à l’idée que dans la beauté adhérente se mêle un concept de l’objet, qu’elle mêle surtout des plaisirs de nature diverse.
C) MAIS LA BEAUTÉ A UNE DIMENSION SENSIBLE. N’EST-CE DONC PAS UNE DIMENSION ESSENTIELLE ?[pic 6]
On peut concilier la dimension intellectuelle et la dimension sensible à la façon de Hegel dans son Esthétique en prenant comme modèle de toute beauté l’œuvre d’art. En elle la beauté se situe dans l’adéquation entre l’idée et son expression sensible. Dès lors, l’œuvre d’art est le modèle de toute beauté en ce sens qu’en elle la possibilité même de la beauté se réalise. Et la beauté non artistique en est dérivée en ce sens que la nature ou les personnes et les objets techniques sont considérées comme beaux lorsqu’ils sont considérés à la façon des œuvres d’art.
Penser la beauté à partir de l’œuvre d’art, c’est dès lors donner à l’idée non pas le sens général d’idée, mais celle d’un contenu. Il est dans ce que les peuples considèrent comme fondamentales. On comprend ainsi la diversité des œuvres d’arts et la diversité des formes de la beauté. Il y a dès lors une incontestable dimension culturelle de la beauté si par culture on entend l’ensemble de ce qu’un ou plusieurs peuples particuliers héritent. Là encore, la métaphore du goût se comprend comme expérience. Elle n’apparaît nullement nécessaire.
Toujours est-il que la beauté est appréhendée sans que les idées des œuvres d’art soient nécessairement comprises comme telles à supposer qu’il soit possible de les comprendre.
Il n’est donc pas absurde de penser que la beauté est affaire de goût, c’est-à-dire d’une capacité sensible ou qui a une dimension de sensibilité dans l’appréhension de la beauté des œuvres. Certes, la compréhension la favorise. Mais elle n’en est qu’une dimension.
Ne doit-on pas alors soutenir le relativisme qui s’appuie sur le vieux proverbe : « des goûts et des couleurs on ne discute pas » ? Mais justement, n’est-ce pas des goûts qu’on discute par excellence ?
Le goût esthétique est bien subjectif mais n’est en aucun cas relatif comme le goût des sens. Au contraire, il exige l’universalité. Il exige d’être cultivé, mais il se fonde
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