L’IDE appartient à une trilogie sociale
Par Junecooper • 20 Décembre 2017 • 3 074 Mots (13 Pages) • 489 Vues
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l’impératif présent : « restez, restez » ; mais
T, pour sa part, utilise souvent l’impératif (« modérez-vous » ; "consolez-vous »), il pose des questions à C, et
au subjonctif). On remarque tout un jeu sur les marques de la personne, où C et E sont alternativement sujet et
objet : ELLE / MA / MOI, JE emphase / LUI / ELLE / M’ / ELLE = sorte de pacte initial.
c’est la seule réplique qu’elle lui adresse directement.
veille à utiliser les prénoms afin de bien rappeler les rôles joués. D’ailleurs, c’est lui qui énonce les règles du
jeu à l’aide de tournures souvent impersonnelles, comme « il faut que » ; « il est nécessaire que » ; « qui se
doit ».
b) Le volume de parole :
On remarque la prédominance de T, et surtout de C (tirade finale) ; alors qu’E n’intervient que trois fois très
C’est C qui ouvre et ferme l’extrait : sa parole s’y déploie et cependant C affirme pour finir qu’elle débute !
brièvement = en perdant son nom, elle a perdu la parole, donc le pouvoir.
Cette prise de parole est donc une explosion ; l’action, en apparence, n’a pas progressé, le portrait est
simplement ébauché (=sorte de brouillon)
3. Une situation insolite :
Discrétion d’E qui résiste presque en silence
Circulation particulière des échanges
Personnage de T qui parle d’autorité à la servante comme à la maîtresse
Discours abondant de C avec l’acte provocateur du portrait : E doit se voir dans les propos de son ancienne
esclave comme dans un miroir pour s’amender
L’affrontement maîtresse / esclave est décidé hors des deux protagonistes et se déroule paradoxalement pour
le bien de tous !
Transition : étudions à présent le personnage de T qui est à l’origine de cette situation de communication si particulière.
II/ Le personnage de T :
C’est un personnage original, essentiel pour l’action et l’analyse du rapport d’autorité. En effet, c’est un ancien esclave,
son nom vient de la commedia dell’arte mais malgré cette origine, il n’est ni un serviteur ni un personnage comique.
1. La mission de T :
Dans les expressions impersonnelles (voir ci-dessus) il énonce le règlement en vigueur et ses conditions
d’application.
Il s’agit de la loi de l’île, promulguée autrefois par les esclaves révoltés et qui prétendent rééduquer tous les
maîtres naufragés !
2. La « technique » de rééducation :
Il donne corps à la colère de C et lui propose un exutoire : brosser un portrait corrosif de sa maîtresse
Celui-ci doit se faire devant E (« devant la personne que l’on peint »)
La démarche est clairement exprimée : « qu’elle se connaisse, qu’elle rougisse de ses ridicules, si elle en a, et
qu’elle se corrige » = rythme ternaire qui souligne les trois étapes successives et les liens de cause à effet +
gradation qui insiste sur le progrès moral la reconnaissance de la faute conduit à une transformation morale.
3. Les valeurs de référence :
Le projet de T s’appuie sur des valeurs implicites : l’individu, égaré dans des excès monstrueux par l’abus de
pouvoir, peut évoluer, si la raison reprend ses droits.
On retrouve les idées phares du XVIIIème siècle : l’usage de la raison joint à l’usage de la sensibilité
(« rougisse » est du ressort de l’affect) pour accéder à la dignité et à l’humanité ; notion de progrès, foi en la
capacité de l’homme à s’amender.
Cependant T cherche l’équilibre, la justice et non l’égalité : les droits de chacun, la dimension humaine doivent
être respectés ; mais il ne s’agit pas d’une justice sociale qui modifierait la société, mais seulement d’une justice
morale = il faut qu’un maître soit un bon maître pour qu’un valet soit un bon valet.
Bilan : on remarque le calme et l’autorité du médiateur qui distribue les cartes de ce « jeu de rôles » (de nos jours nous
parlerions de psychodrame, et Trivelin serait le psychiatre ou le psychologue…), de ce « théâtre dans le théâtre », d’autant
plus qu’il orchestre ce passage malgré les difficultés (il doit éviter la fuite d’E et endiguer les excès verbaux de C)
Ainsi, le projet humaniste de T, on le comprend très vite, est central dans le projet de l’auteur, dans l’enjeu essentiel de la
pièce.
Mais T a besoin de C pour mener à bien sa mission et c’est sur elle que repose la dynamique du passage.
III/ Le personnage de Cléanthis :
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