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Fiche de lecture de Voyage Au Bout de la Nuit, Louis Ferdinand Céline

Par   •  3 Mai 2018  •  5 636 Mots (23 Pages)  •  897 Vues

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Dans ces voyages, Bardamu retire la certitude que tout homme ne cherche qu’à nuire à autrui. En affirmant que « Faire confiance aux hommes, c'est déjà se faire tuer un peu », Bardamu expose pleinement son idée. Lorsqu’il fait route vers l’Afrique à bord d’un navire, il devient rapidement le souffre-douleur des autres passagers, et se retrouve victime de la bêtise et des pulsions animales des autres hommes libérées par la longueur de la traversée. Mais il réussit à se tirer de la mauvaise passe grâce à son talent d’orateur et à quelques tournées. En faisant confiance à ces individus, Bardamu se retrouve au milieu de cette sauvagerie humaine. Pourtant innocent de toute forme d’irrespect envers les passagers, son accueil sur le bateau est la preuve de cette nuisance humaine. En Afrique il rencontre des Noirs et des Blancs qui ne cessent de faire preuve d’agressivité: "Les indigènes eux, ne fonctionnent guère en somme qu'à coups de trique, ils gardent cette dignité, tandis que les Blancs, perfectionnés par l'instruction publique, ils marchent tout seuls ». Puis, après que Bardamu se soit engagé dans l’armée, il se rend compte peu à peu que les hommes au tour de lui, lui sont hostiles et nuisibles. Céline démontre avec une puissance littéraire étourdissante « l’imbécillité infernale » de cette immense, universelle moquerie qu’est la guerre : « La guerre en somme c’était tout ce qu’on ne comprenait pas. ». Il parle des Hommes comme des êtres contenant « des volontés homicides énormes et sans nombre ». De plus, il dit qu’« il existe pour le pauvre en ce monde deux grandes manières de crever, soit par l'indifférence absolue de vos semblables en temps de paix, ou par la passion homicide des mêmes en la guerre venue. » Cela signifie bien que tout homme cherche la destruction d’autrui: cet aspect est incarné dans la nature humaine, ce qui peut inquiéter fortement les individus de la société.

Bardamu est stigmatiser par plusieurs faiblesses de la Nature humaine: l’inconscience, l’angoisse, la rebellion et la misanthropie. Son inconscience se manifeste lorsqu’il se précipite dans l’armée. Il ignore complètement les risques auxquels il s’expose, ce qui fait preuve d’absurdité et d’irrationalité. Le lecteur peut tout d‘abord juger que c’est un acte héroïque, mais une fois arrivée au front, le personnage regrette pleinement sa décision et ne souhaite que fuir et partir loin de cette guerre. L’angoisse est perçue tout au long du roman. Plusieurs de ces paroles renvoient à l’angoisse présente lorsque l’on songe à l’absurdité des humains dans la société. Par exemple, lorsque Bardamu se demande « Pourquoi s’arrêteraient-ils? » (en parlant de la guerre), ces paroles suscitent la panique et l’affolement du lecteur. Puis il devient traumatiser par la guerre, quitté l’armée et rentre dans un hôpital psychiatrique. La rebellion constitue la force mentale de Bardamu. Il critique tout l’armée à travers des propos à la fois ironiques et agressifs: « cette bouffonnerie tragique », « cette imbécillité infernale », « cette croisade apocalyptique », qui caractérisent pleinement la situation de guerre. Le personnage est aussi contre l'absurdité des ordres puisque pendant la nuit, les officiers donnent aux soldats des missions de reconnaissance. Or, ces missions qui ne mènent ces soldats nulle part, apparaissent comme un suicide ou un massacre volontaire. Il critique des grades qui n’ont pas a faire « le sale boulot et ne manquent de rien », mais malgré sa haine, il reste passif. Bardamu est incapable d'imaginer un quelconque avenir, ou un revirement de situation; il souhaite simplement revenir en arrière, avant la guerre. Enfin, Bardamu n’entreprend aucuns projets, car il ne fait pas confiance à l’humanité misanthrope et pessimiste. Au final, il s’avère être un personnage pathétique et incarne toutes les personnes qui ont été affectées psychologiquement pas la guerre.

Bardamu dénonce de nombreux déterminisme économiques et sociologiques: le patriotisme, le colonialisme, le capitalisme, le despotisme et l’idéalisme. Selon Céline, le patriotisme est l'une des nombreuses fausses valeurs dans lesquelles l'homme s'égare. Cette notion est visible notamment dans la partie consacrée à la Première Guerre mondiale, au front, puis à l'arrière, où Céline s'est fait hospitaliser. Il critique le patriotisme exacerbé de la nation en guerre, se moque des élans patriotiques d’un des patients de l’asile, qu’il perçoit comme le meilleur moyen de rester éloigner des combats et du tribunal militaire en s’attirant la sympathie du directeur des lieux, grand décideur de l’état de ses patients et de leur maintien à l’asile. Le colonialisme est le deuxième aspect idéologique de cette œuvre. et se remarque surtout lors du voyage de Bardamu en Afrique. Il qualifie le colonialisme de « mal de la même sorte que la Guerre » et en condamne donc le principe et l'exploitation sur place des colons, et dresse un portrait extrêmement caricatural des occidentaux là-bas. Le capitalisme est repérable dans la partie consacrée aux États-Unis, lors du voyage à New York, puis à Détroit, principalement au siège des usines automobiles Ford. Il découvre les affres du travail à la chaîne asservissant, destructeur physiquement et mentalement. Le despotisme se retrouve à plusieurs reprises, lorsque l'absurdité d'un système hiérarchique est mise en évidence: à la guerre, aux colonies, à l'asile psychiatrique. L’obéissance est décrite comme une forme de refus de vivre ou d'assumer les risques de la vie. Lorsque Céline défend son envie de déserter face à l'humanité entière, résolument décidée à approuver la boucherie collective, il affirme ainsi la primauté de son choix devant toute autorité, même morale. Cette vision teintée de désespérance se rapproche de la pensée nihiliste. Enfin, l’idéalisme est dénoncé lorsque Céline exprime son refus total de l’idéal et des sentiments. La question de Bardamu, et donc celle de Céline, est de découvrir ce qu'il appelle la vérité. Une vérité biologique, physiologique, qui affirme que tous les hommes sont mortels et que l'avenir les conduit vers la décomposition. C'est pourquoi l'œuvre peut apparaître comme totalement désespérée.

Céline dénonce l’hypocrisie du monde à travers un personnage qui critique la société et l’Homme meme. Au début du roman, Ferdinand Bardamu est en quête d’héroïsme et décide de s’engager dans la guerre contre les Allemands. Mais très vite, il comprend l’imposture et le non sens de cette tuerie cruelle et sans limite.

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