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Complainte d'un autre dimanche - Jules Laforgue

Par   •  30 Juin 2018  •  1 694 Mots (7 Pages)  •  534 Vues

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Au vers 6 est évoqué un « couchant », le soleil couchant étant un élément récurrent du topos lyrique, souvent sujet d'admiration du poète par sa splendeur mais qui est ici dénigré par l'adjectif péjoratif « mal bâti ». On retrouve également le ciel au vers 10 mais il est ici défini comme « crû » adjectif qui vient du latin cruor qui signifie sang : l'auteur brise alors avec le topos du ciel majestueux en revenant à des réalités primitives. Le ciel est alors vide, pas de présence de Dieu, pourtant le dimanche est le jour du seigneur.

B) Description péjorative du paysage

Un vide du paysage exprimé le peu d'éléments le constituant : « cinq arbres » , « une buanderie », « les tuiles ». D'autant plus que les adjectifs utilisés sont majoritairement péjoratif, le thème de la saleté est récurrant : « les tuiles sales » ou au travers d'un langage primitif, voire trivial qui rappelle les chansons populaires comme « suppurant » ( au vers 6). Le paysage est bousculé par une rafale au vers 9 : le seul mouvement dans ce paysage, la seule vie.

Mais ce paysage semble être marqué par le temps qui passe : les tuiles sont salies par le temps. Le thème de la maladie est également introduit par le poète : le terme « livide » remplace le « liquide » attendu après suppurant et est répété au vers 10. Un hôpital est évoqué au vers 8 : Val-de-Grâce. Puis le poète parle d' « agonie » au vers 15. Le vide du paysage est meublé par des « bandages livides » au vers 10, soit seulement par quelque chose de superficiel, panse seulement ne soigne pas le vide, qui reste malade « livides » donc inefficace. Une décomposition du paysage jusqu'à la mort : « squelettes de glycine » ce qui introduit la mort, la putréfaction dans ce paysage. Au fur et à mesure que la description avance, l'intensité de la parole poétique augmente, on retrouve une série d'exclamations à partir du vers 12 et la décomposition s'opère jusqu'à l' « agonie » au vers 15.

Cette maladie présente tout au long de ces deux strophes est peut-être une maladie du poète, un poète qui projette son état d'âme sur le paysage qu'il observe, au vers 13 il s'exclame « Ô lendemains de noce ! » qui évoque un ennui par rapport à un amusement auparavant. L'ennui du poète se ressent donc dès ses strophes par la description d'un paysage vide, mais peut-être est-ce aussi une certaine critique de sa propre écriture poétique : une poésie qui serait vide, saccadée, « mal bâti » et dont le seul mouvement est une certaine violence comme le suggère « en proie à des rafales encor plus mesquines ! » au vers 12.

IV - Stophe 4 et 5 : Etat d'âme du poète

Le sujet- poète est finalement introduit au vers 16 avec la première personne «je », il exprime alors son ennui et une remise en question « qu'est ce que je fais dans cette chambre ? » cette interrogation au discours direct montre que c'est le poème qui s'exprime, qui se plaint, il veut faire entendre ses interrogations. L'ennui qu'il éprouve fait qu'il écrit, il est donc bien question de son écriture poétique dans ce poème. Il exprime son ennui en se dénigrant lui même, il se décrit comme une « sordide limace » au vers 17, il se représente à travers l'image d'une bête. Au vers 18, il exprime son impassibilité face au mouvement de la vie la citation « sous ce scaphandre » affirme qu'il il se dote d'un scaphandre pour une plongée sous-marine, son poème est une plongée sous-marine, une plongée dans les méandres de l'océan qui signifie souvent une certaine obscurité. Il considère que sa parole est vide, il se répète « tu te ressasses » qui n'a pas de sens « sans fin » . Il se confine dans son ennui, dans une certaine dépression « un qui garde la chambre ? », il est inactif. Il exprime son ennui à travers un langage familier comme le montre l'emploi du pronominal au vers 19 mais aussi dans une certaine musicalité avec une allitération en « s » « scaphandre », « ressasse », « sans fin », « seras ».

L'antépiphore du vers 21 marque la fin du poème, il répète le premier vers du poème mais cette fois au passé simple pour exprimer une réalité révolue, cet ennui atténué par la disparition de « très » est fini, il faut passer à autre chose, à une autre parole poétique.

CONCLUSION :

Ce poème montre que le poète se démarque de la poésie de son temps, il déconstruit le topos de la nature qui inspire la mélancolie dans la poésie lyrique par une description d'un paysage urbain, un paysage qui se décompose et qui devient une allégorie de lui mais aussi de sa poésie. A travers cette description, le poète fait une caricature de sa poésie, une poésie ennuyante, vide. Il exprime sa recherche d'une nouvelle poésie, d'un nouveau langage en prenant des libertés en développant des mots nouveaux, néologismes mais aussi en rompant avec la versification classique. Il bouscule alors les codes de la poésie lyrique, poésie de ses prédécesseurs romantiques.

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