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Compte-rendu d'Islam Pride

Par   •  24 Octobre 2018  •  2 500 Mots (10 Pages)  •  392 Vues

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Enfin, l’auteure termine son ouvrage par une scène gravée dans sa mémoire. Aux premiers jours de l’indépendance de la Tunisie, Bourguiba pose un geste ayant marqué cette époque. Au milieu de la foule, il s’approche vers une femme et « […] soulève les pans de son voile, et il le lui enlève doucement, comme le sacre d’un baptême, laissant apparaître son visage radieux.» (Béji, 2011) Cet instant historique présente la liberté dévoilée de la femme où elle fut « […] couronnée comme une reine.»(Béji, 2011) Ainsi, il est primordial de remonter ce moment à la surface de notre conscience et rendre hommage au succès de cet homme révolutionnaire. Pour conclure, elle invite les suffragettes du voile à s’inspirer de cet évènement mémorable pour réaliser qu’elles ont une mission plus haute à accomplir, car elles retrouveront « […] le sens de [leur] croyance, non pas derrière le voile, mais devant le voile». (Béji, 2011) De plus, elle rappelle que ce geste doit se faire de leur propre gré puisque le respect du choix de la femme est une notion primordiale.

À travers son ouvrage, Hélé Béji, opte pour une démarche à la fois critique et généreuse. D’un côté, elle décrit le voile comme une pathologie et de l’autre elle perçoit ces femmes qui portent le voile comme des représentantes d’une autre façon d’être dans le monde. En effet, ces femmes sont porteuses d’une autre façon d’habiter le monde, et cela est très précieux. L’auteure ne veut pas critiquer ces femmes-là, au contraire celles-ci ont un savoir-vivre important ce qui fait en sorte qu’on devrait les écouter au-delà de la question du voile. Selon Hélé Béji, le fait de les écouter constitue la richesse du mouvement des femmes, car en défendant les femmes nous défendons l’ensemble de la société ancienne et nouvelle pour espérer un jour mettre fin à cette guerre. Il est donc possible de constater une modération intéressante au sein de son argumentation ; un conflit entre le cœur et l’esprit. Dans son cœur elle est contre le port du voile, mais dans son esprit elle n’est pas en mesure de l’interdire.

Le thème qui nous semble crucial et que l’on souhaite maintenant développer puisqu’il permet d’approfondir notre compréhension sur cette œuvre est celui de la coupure au sein du féminisme. Cet argument central permet de regrouper les autres thèmes abordés et tisser des liens intéressants. Les femmes, en dépit de leurs différentes cultures ou religion, ont fait une révolution identique qui s’est illustrée par son caractère singulier, unique, universel. Cette révolution, la moins destructrice que l’humanité n’ait jamais connue, se distingue de celle des hommes : pacifique, sans crime, pas de vandalisme, etc. De ce fait, les femmes ont mené une révolution saine où elles se sont libérées de l’interdiction du monde et ont obtenu le droit de désirer ce monde. Cette émancipation glorieuse a créé une union féminine. Le voile vient rompre cette union. En dépit de la contre-offensive progressiste, la vague des suffragettes du voile croît en puissance. De ce fait, l’auteure identifie une conséquence reliée à ce phénomène : il n’y a plus un peuple de femmes, mais deux peuples féminins dressés l’un contre l’autre. Ces femmes qui s’étaient «distinguées par leur humanisme se livrent un combat sans pitié qu’elles avaient épargné aux hommes.» (Béji, 2011) Ce féminin universel où la femme ne cherche pas le pouvoir, mais la souveraineté n’existe plus à cause de cette guerre du voile. Cette guerre qui se dessine entre les femmes est nouvelle puisqu’il n’a jamais eu lieu auparavant. Au fur et à mesure, les femmes commencent à se diviser ; les femmes voilées et les femmes non voilées. Nous sommes en présence d’une guerre interféminine. Avant les femmes s’unissaient pour se protéger et actuellement elles cherchent volontairement à déclencher des conflits entre elles. Par conséquent, il est possible de constater un conflit grave, un rapport antagonique entre les modernes et les antimodernes ayant deux visions inconciliables de l’identité féminine. Hélé Béji déplore cette coupure au sein du féminisme et d’après elle c’est malheureux étant donné que cette division remet en question la force du féminisme : « cette division insurmontable ruine le réconfort d’appartenir au monde des femmes, à cette famille humaine qu’est le peuple des femmes.» (Béji, 2011) Auparavant, l’humanité était divisée à cause des hommes, alors qu’aujourd’hui les femmes sont la cause de leurs propres guerres civiles. Est-ce le résultat de l’émancipation des femmes? Ces femmes ont donc perdu la compassion qu’elle avait pour son propre sexe et cette faculté d’identification envers les autres femmes, qu’elles avaient dans les moments dramatiques de l’histoire.

Suite à ces constats, l’auteur se demande comment éviter la guerre civile des femmes et comment retrouver cet humanisme qui avait conduit à une révolution exemplaire. Parmi les façons d’y remédier, il faut d’abord que la critique du voile ne soit pas guidée par la peur de l’islam, mais par le constat clairvoyant des failles de la modernité. Le fait d’associer la modernité comme une source du Bien et l’islam comme son mal ne fait qu’empirer la situation. « Défendre la modernité en accusant la seule tradition, c’est créer une division irrémédiable du monde des femmes.»(Béji, 2011) L’islam ne menace guère la société moderne, cette société est plutôt menacée par ses propres dérélictions formant des concurrences et des guerres de toutes contre toutes. Or, Hélé Béji offre un discours universel qui a pour but de réunir les femmes du monde entier.

Ce thème de la coupure au sein du féminisme est crucial puisqu’il permet d’inscrire la question du voile non seulement par une photographie du présent (démarche sociologique), mais par également par une regard historique plus long. La perspective du féminisme permet de replacer cette question dans une perspective historique ce qui permet de mieux comprendre la critique de l’auteure à l’égard du voile. Elle appuie son argumentation à l’aide d’un regard historique au sujet de l’émancipation de la femme tunisienne. Elle fait référence au 13 août 1956 ; une date révolutionnaire où la libération de la femme eut lieu grâce à l’ouvrage de Bourguiba. Au fur et à mesure, la situation féminine connaît un essor remarquable, notamment au moment où l’État supprime le mot «obéissance» appliqué à la femme dans le Code de la famille. Cette émancipation de la femme tunisienne servira plus tard d’exemple et de modèle aux autres pays arabes. Ce contexte historique est pertinent dans

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