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V. Hugo - L'expiation | Analyse

Par   •  27 Avril 2018  •  1 882 Mots (8 Pages)  •  974 Vues

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Puis ils finissent par disparaitre totalement pris en « la plaine blanche » et « le ciel noir ». La mort se rapproche progressivement dans le texte : au début il s’agit des chevaux (v.11) puis des hommes statufiés (v.13-14).

Au vers 21, la vie même est niée : « ce n’était plus des cœurs vivants » et les hommes deviennent « de ombres ». Enfin, la mort atteint chacun individuellement « chacun se sentait mourir ».

Le registre principal est épique, et on peut en retrouver plus caractéristiques : l’exaltation d’un groupe, ici la grande armée « rassemblée derrière un homme ou une cause représentée ici par l’Empereur et l’aigle, sort d’allégorie de l’empire Napoléonien. L’importance des pluriels participent à l’amplification. Hugo fait une utilisation intéressante de cette caractéristique épique, car tout en exaltant le courage et la dignité de ces hommes, ils montrent leur fragilité face aux éléments contre lesquels ils ne peuvent monter leurs qualités guerrières.

La confrontation du héros à des obstacles surhumains, des déchainements cosmiques, la grande armée se bat, non contre les Russes, mais contre « l’âpre hiver ». Les éléments naturels sont personnifiés, le ciel et la neige deviennent des personnages à part entière et même « la solitude vaste » se transforme en allégorie du châtiment en devenant « muette vengeresse » et donne ainsi un sens métaphysique à l’évènement historique.

Le recours à l’amplification est constant, par différents procédés : l’anaphore de « il neigeait » qui suggère tout la puissance de la neige. Les répétitions, « blancs », « immense » ; les accumulations « après la plaine blanche, une autre plaine blanche », « les boulets, mitrailles, obus ». Le vocabulaire hyperbolique avec « partout, toujours, épouvantable » axe la recherche de ce qui peut être impressionner le lecteur et susciter son émotion son émotion ou admiration : les oppositions « hier la grande armée maintenant troupeau », « ce n’est plus/ c’était » les contrastes de couleurs « noirs, blancs », les images fortes, les blessés dans le ventre des chevaux, les clairons statufiés, la procession d’ombres, le linceul de neige ; les verbes d’actions mis en valeurs par les rejets, « pleuvaient et sifflaient » . L’apostrophe exclamative de l’auteur qui commente l’évènement exprime son émotion « sombres jours ! » Hugo utilise ici le registre épique de façon paradoxale, puisqu’il raconte une défaite et l’anéantissement d’une armée =, ce paradoxe va lui servir à tirer le sens de cet évènement à lui donner une valeur prophétique. Le sens moral métaphysique de ce passage est essentiellement par les vers 1 et 25, la retraite de Russie est bien une expiation de l’appétit de conquête de Napoléon comme le suggère l’oxymore du premier vers « vaincre, conquête » et montre comment le retournement du sort punit l’Empereur. C’est parce qu’il a passé sa conquête à trop s’aventurer sur un territoire trop vaste, qu’elle se transforme en défaite désastreuse. De même, la fin du passage transforme « la solitude vaste » en « vengeresse », en allégorie de l’expiation, le poète insiste alors sur l’opposition de la gloire passée et le désastre présent, entre hier et maintenant au vers 8 d’où la désagrégation de cette armée de vainqueurs (v.7-9-21). Le vers 2 joue également avec l’allégorie de l’aigle, symbole de l’Empire qui baisse la tête. Les hommes, eux-mêmes s’interrogent sur le sens de cette défaite et restent « pensifs ».

Hugo montre toute sa compassion vis-à-vis de ces soldats qui n’ont pas démérité mais sont les victimes tragiques de l’Histoire, et il met en valeur tout au long du passage, leurs impuissance face à des phénomènes qui les dépassent : les grenadiers, figure de courage et de fidélité sont « surpris d’être tremblants et ne comprennent pas contre quel ennemi se battre », les effets de rimes sont à ce propos intéressants, puisqu’ils opposent hommes et phénomènes naturels « givre, cuivre » « blancs, tremblants », « grise, bise » « linceul, seul » leurs destins apparait fixé d’avance sans aucune chance de sortir de cette « solitude vaste ». Le poète évoque donc avec émotion, ces hommes promis à une mort cruelle et dérisoire pour un soldat courageux qui meurt de froid et de faim après avoir conquis Moscou. C’est la folie cruelle de la guerre et l’ambition démesurée des conquérants qui sont dénoncés ici.

Hugo a mis ici tout son talent poétique au service d’une vision grandiose, et impressionnante de l’épisode de la retraite de Russie en lui donnant le sens métaphysique d’une expiation, il montre la guerre comme le fléau dont les hommes, malgré le courage ne sont que les victimes impuissantes tout en exprimant son émotion et sa compassion devant le sort cruel et absurde des soldats de la grande armée qui rejoint aussi, dans cette scène épique et tragique, la tradition antique qui voyait les désastres de la guerre, le châtiment divin de l’orgueil qui pousse tout être humain à désirer toute la puissance et a outre passer ses justes limites et qui finit par susciter sa propre ruine.

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