L'histoitr de l'immigration
Par Ninoka • 9 Janvier 2018 • 5 658 Mots (23 Pages) • 496 Vues
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Mais "la main-d’œuvre coloniale était insuffisante en nombre et surtout en qualité pour satisfaire aux besoins du pays"[11]. Comme il l'avait fait pour les travailleurs coloniaux, l'État prend en main le recrutement de la main-d’œuvre européenne. Les autorités françaises concluent des accords avec la Grèce, l'Italie, le Portugal et l'Espagne. "Au total, le nombre des ouvriers étrangers européens contrôlés à leur passage aux frontières, recrutés collectivement, introduits en France ou entrés spontanément pourvus d'un contrat de travail et placés soit par le ministère de l'Agriculture soit par celui de l'Armement s'élevait à plus de 225 000 "[12].
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Les impératifs de guerre avaient entraîné pour la première fois l'intervention de l'État. Sous son égide, près d'un demi million de travailleurs coloniaux et européens, placés pour la plupart dans les usines de guerre et dans l'agriculture, avaient franchi la frontière française. L'ingérence nouvelle de l'État, loin de s'amoindrir avec la fin de la guerre, allait se préciser.
- L'ENTRE DEUX-GUERRES
La France a payé un lourd tribut à la guerre. Sortie victorieuse du conflit, elle n'en est pas moins complètement exsangue. Les pertes humaines sont évaluées à 1 400 000 morts, le nombre des invalides se monte à 1 000 000 de personnes[13]. Les pertes matérielles viennent ajouter à l'horreur de la guerre[14]. Le pays est complètement détruit, il faut reconstruire. Mais la main-d’œuvre se fait d'autant plus rare que la population la plus touchée par la guerre est la jeunesse[15].
Jamais la France n'avait autant manqué de bras. Mais où trouver la main-d’œuvre nécessaire à la reconstruction ?
Comme elle l'avait fait en tant de guerre, elle regarde vers ses voisins européens. Nombre d'entre eux se trouvent dans une situation économique catastrophique et accusent un excédent de main-d’œuvre. "Sans doute la guerre avait fauché des millions d'hommes, mais elle en laissait un plus grand nombre encore sans emploi et sans ressources".[16]
D'un côté, il y a une France où la main-d’œuvre fait cruellement défaut, de l'autre, des pays incapables de subvenir aux besoins de leurs ressortissants.
L'é-immigration apparaît comme la seule solution tant pour les pays "exportateurs" que pour la France.
- La mainmise de l'État et des organisations patronales
Les Pouvoirs Publics relayés par les organisations patronales vont mettre en place de véritables structures d'embauches. Des conventions de main-d’œuvre sont signées avec les pays fournisseurs. Entre 1919 et 1930 , pas moins de neuf pays européens[17] ont conclu avec la France des accords d'émigration-immigration[18]. De leur côté, les groupements patronaux s'attellent à la tâche. Créant leurs propres missions de recrutement, ils font venir en France la main-d’œuvre nécessaire à la reconstruction. "Dès janvier 1919, [le Comité central des Houillères] s'accorde avec Rome pour “importer” 7 000 mineurs italiens"[19]. "[...] À la fin de 1923, tout près de 60 000 ouvriers mineurs, [Polonais pour la plupart]"[20], ont été introduits par ce même comité.
En mai 1924, la réunion du Comité central des Houillères et de l'Office central de la main-d’œuvre agricole donne naissance à ce qui allait devenir la première filière privée de recrutement d'après guerre : la Société Générale d'Immigration (S.G.I.). Véritable organisation de recrutement parallèle, elle envoie des missions, ouvre des bureaux dans nombre de pays européens, assure le contrôle sanitaire et professionnel, l'embauche et le transport des travailleurs qu'elle remet aux employeurs en échange d'une contribution financière[21] .
Entre 1924 et 1931, la Société Générale d'Immigration a acheminé vers la France près d'un demi-million de travailleurs étrangers, lesquels, ajoutés aux centaines de milliers d'autres introduits par les Pouvoirs Publics, portent à 2 000 000 le nombre des entrées contrôlées entre 1920 et 1931[22], plaçant du même coup la France en tête des pays d'immigration[23].Les Italiens représentent 30% des entrées loin devant les Polonais 20 % et les Belges 18 %[24].
Mais L'immigration collective et organisée ne doit faire oublier ni l'immigration individuelle qui demeure conséquente après 1918[25], ni la masse des réfugiés[26] : anti fascistes italiens, rescapés du génocide arménien, qui trouvent asile en France au lendemain de la guerre. Pour ces laissés-pour-compte de l’histoire commence la dure loi de l’exil. On dénombre ainsi 64 000 Russes blancs et 65 000 Arméniens en France à la fin des années vingt[27]. Arrivés dans des conditions de dénuement total, marqués psychologiquement, l'installation en France se fait très souvent dans la douleur.
La guerre a apporté de profonds bouleversements tant dans la composition de l'immigration que dans sa nature. En une seule décennie, de 1921 à 1931, la population étrangère est passée de 1 400 000 à près de 3 000 000, faisant de la France le premier pays d'immigration au monde relativement à sa population. Aux immigrations traditionnelles de voisinage sont venues s'ajouter des immigrations plus lointaines ; Tchèque, Hongroise, Polonaise et plus politisées ; Russe, Arménienne. Voulue, encouragée, provoquée même par l'État et le patronat en période de pénurie, l'immigration, et plus précisément les immigrés, vont très vite devenir le bouc émissaire de la crise économique.
- La crise économique et le reflux des immigrés
Dans les années 1930, dans un contexte de crise économique et de chômage favorables à la montée des sentiments xénophobes, de nombreuses voix s'élevèrent pour protester contre la présence étrangère.
Le peuple français se prononçait majoritairement contre l'immigration et pour la préférence nationale[28]. Il exprimait parfois de manière très explosive son hostilité. Des rixes éclatèrent un peu partout en France, "des italiens se firent tuer en Savoie, des Marocains à Lyon, des Polonais en Flandre"[29].
Latent en période
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