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L’État doit-il et peut-il être géré comme une entreprise similaire aux autres ?

Par   •  11 Octobre 2018  •  5 587 Mots (23 Pages)  •  552 Vues

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Enfin, il faut considérer l’entreprise comme un « tout » qui gère son territoire. À l’inverse, l’entreprise est « unique », mais reste subordonnée à l’État. À partir de ce postulat, on peut dégager le principe de responsabilité de l’Etat vis-à-vis de ses citoyens. Ce principe de responsabilité implique des obligations de part et d’autre. L’Etat est un « tout » qui a pour objet de gérer et d’organiser son territoire. De l’autre côté, l’entreprise une « pièce » du territoire qui a pour objet la production de biens et de services. Les intérêts des deux divergent donc et c’est pour cela que leur sentiment de responsabilité envers les citoyens ou les salariés ne sera pas similaire. L’État aura pour mission principale de satisfaire l’intérêt général, ce qui signifie la satisfaction des besoins du plus grand nombre. La responsabilité dans les faits se traduira par les droits régaliens envers les citoyens. A contrario, l’entreprise pourra décider de ne satisfaire les besoins que d’une tranche de la population, car sa mission est différente et se déroule avant tout dans la sphère du privé. Sa responsabilité ne sera pas générale puisqu’elle s’appliquera essentiellement à ses salariés et à ses clients. Dans cette optique, l’État ne peut donc pas être géré comme une entreprise similaire aux autres, car son domaine de compétences et d’intervention est bien plus vaste que celui d’une entreprise.

On remarque des différences notables en termes de pouvoirs et de devoirs de l’État par rapport à l’entreprise. L’État se distingue par son pouvoir de coercition, nettement plus important que celui de l’entreprise. Il est également régi par un système bureaucratique. En outre, cela peut nous amener à nous poser la question de l’influence de l’un sur l’autre dans la mesure où il est avéré que les grandes entreprises peuvent parfois prendre le pas sur le pouvoir politique des États grâce à un lobbying important. À partir de là, on observe qu’en tenant compte d’intérêts divergents, la responsabilité n’est pas la même, ce qui implique des différences importantes de gestion. L’État dès lors se caractérise par sa singularité et par un modèle très difficile, voire impossible à reproduire.

Pour confirmer cette approche, nous allons observer dans une seconde sous-partie que les pouvoirs et devoirs sus-cités sont seulement l’apanage de l’État et n’impliquent donc pas l’entreprise.

- …qui n’incombent pas à l’entreprise

Le risque à considérer l’État comme une entreprise similaire aux autres, c’est le risque de tomber dans les travers de cette gestion. S’il y a un exemple pour conceptualiser ce mode de pensée, c’est la comparaison que l’on peut faire de l’État avec une entreprise dans une situation de monopole. Une entreprise qui dispose d’un monopole sur un marché donné va presque donner le la de l’offre et de la demande. Cela signifie qu’elle part avec un avantage concurrentiel sur la concurrence et qu’elle est plus ou moins libre de fixer les prix qu’elle souhaite. Cette manière d’agir aura des répercussions sur les clients finaux. Plus largement, dans un cadre monopolistique, l’entreprise subit beaucoup moins de contraintes que lorsque la concurrence est exacerbée. Sans cette contrainte, l’entreprise peut agir à son gré. Pour l’État, le raisonnement est le même. Un Etat qui fait fi de la contrainte, et qui dispose d’un « monopole » sur sa population, est un État totalitaire. C’est donc là le risque de considérer l’État comme une « simple » entreprise, car on en oublie sa complexité. Dans un État démocratique, le gouvernement doit respecter les droits des citoyens et c’est pour cela que l’État totalitaire se rapproche le plus d’une situation de monopole vis-à-vis de ces derniers. Dans cette optique, la contrainte envers le citoyen ayant disparu, l’échiquier se renverse : l’État disposera de tous les instruments de contrainte et pourra exercer un monopole de la violence illégitime. Pour cette raison, gouverner l’Etat comme une entreprise comporte de grands risques étant donné que les facteurs qui rentrent en ligne de compte, les législations et les principes sont différents. L’entreprise, même en situation de monopole, connaîtra des limites à son pouvoir alors qu’il n’est pas certain que cela soit le cas pour l’État.

Selon Jean-Jacques Rousseau, les individus, au sein de l’État, vont inconsciemment signer un contrat social. Le citoyen aura donc des obligations et des devoirs envers l’État (lois, devoirs civiques, etc.). En contrepartie, l’État aura également des obligations envers ses citoyens, notamment par l’intermédiaire des droits régaliens. Pour l’entreprise, le procédé diffère de telle sorte que le travailleur va mettre à disposition sa force de travail pour l’entreprise. L’entreprise devra le rémunérer à hauteur de son travail. Les obligations ne sont pas seulement financières, mais elles intègrent aussi une dimension sociale. Dans la sphère privée, le salarié signe un contrat de travail, et est donc conscient des conditions qui vont avec. L’entreprise a alors le primat de l’autorité qui est légitime et légitimé, car le salarié en est pleinement conscient. Le contrat social demeure aussi présent, de par la bureaucratie et de la hiérarchie en place, mais il est plus ténu. De fait, les contrats approuvés inconsciemment ou consciemment par l’individu ne sont pas les mêmes. La question du respect de ce contrat est tout aussi distincte. Pour cette raison, l’entreprise n’a donc pas à gérer l’intérêt global d’une nation. Son échelle de décision étant moindre, elle peut faire des choix qui vont l’avantager alors que l’État reste toujours dans le cadre du satisfecit général. Toutefois, l’entreprise doit respecter les contraintes fixées par l’État, auquel cas ce dernier peut se substituer à elle, notamment en matière de droit du travail. Dans le cas du citoyen, la subordination du citoyen est de facto conçue. Dans le cas du travailleur, la subordination est acquise, car elle s’effectue par le contrat du travail. Encore une fois, le sens varie entre les deux notions, ce qui accentue la singularité de l’État par rapport à l’entreprise. Hors même de la structure, le destinataire de la norme peut percevoir les choses de manière différente.

En matière de décentralisation, depuis les années 80, l’État a pris de multiples mesures pour procéder à des transferts de compétences de l’Administration centrale jusqu’aux collectivités territoriales. Ce transfert de compétences suppose donc une meilleure répartition

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