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Impartialité du juge des enfants

Par   •  14 Octobre 2017  •  1 992 Mots (8 Pages)  •  741 Vues

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A) Une exception au principe de séparation des fonctions d’instruction et de jugement

L’ordonnance du 2 février 1945 constitue le texte de référence fixant les règles et principes applicables en matière de justice pénale des mineurs. La raison pour laquelle les mineurs délinquants sont soustraits aux juridictions pénales de droit commun est donc clairement énoncée : l’enfance délinquante nécessite d’être protégée en même temps que punie, et le particularisme de sa situation exige d’en confier le traitement à des magistrats spécialisés, tant au stade de l’instruction qu’à celui du jugement.

En vertu du principe de spécialisation qui préside à l’ordonnance du 2 février 1945, l’instruction des affaires impliquant la participation d’un mineur comme auteur d’une infraction est partagée entre le juge des enfants et le juge d’instruction. Si ce dernier est obligatoirement compétent pour les crimes commis par les mineurs, il partage une compétence concurrente avec le juge des enfants pour l’information des délits et contraventions de cinquième classe. Par exception au principe de séparation des autorités d’instruction et de jugement, le juge des enfants peut donc assurer l’instruction et le jugement des affaires délictuelles et contraventionnelles impliquant des mineurs.

La loi prévoit que tous les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des infractions dont ils ont été reconnus coupables. Le jugement de ces mineurs délinquants relève exclusivement de juridictions spécialisées : le juge des enfants, le tribunal pour enfants, le tribunal correctionnel pour mineurs et la cour d’assises des mineurs. Le juge des enfants est compétent pour connaître des contraventions de 5e classe et des délits punis d’une peine inférieure à sept ans d’emprisonnement commis par les mineurs. Le tribunal pour enfants (TPE), composé du juge des enfants et de deux assesseurs, connaît des délits ou contraventions de 5e classe commis par tous les mineurs, ainsi que des crimes commis par les mineurs de moins de 16 ans.

En l’espèce, le juge des enfants est compétent pour l’instruction et le jugement d’une affaire s’il est accompagné de deux assesseurs. Ce qui est le cas dans cet arrêt et qui justifie la décision de la Cour de cassation mais il est vrai que cette règle est discutable et donc critiquable en vertu du principe d’impartialité.

Depuis l’ordonnance de 1945, le fonctionnement de la justice pénale des mineurs a fait l’objet de critiques croissantes et de multiples réformes. Les textes se sont empilés au point de former un ensemble désormais illisible, souvent incohérent et parfois contradictoire. Une réforme de l’organisation de notre justice pénale des mineurs paraît urgente, non seulement afin d’en clarifier le fonctionnement, mais encore dans le but de redéfinir les règles et principes juridiques applicables à l’enfance délinquante.

B) L’avenir de cette exception face au Conseil Constitutionnel

Saisi sur question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la composition du Tribunal des enfants le 8 juillet 2011. Statuant en premier lieu sur la présence de deux assesseurs aux côtés du Président, le Conseil conclut que cette disposition est conforme à la Constitution. En effet, si les assesseurs ne sont pas magistrats, ils n'en sont pas moins des professionnels expérimentés en matière d'enfance. Ils présentent donc les qualités d'indépendance et de compétence qui découlent de l'article 6 de la Déclaration de 1789.

En l’espèce, la décision du Conseil Constitutionnel sur le point de vue de la composition du tribunal ne permet pas de soulever une impartialité du jugement mais il faut alors se demander si celle-ci a un effet sur les fonctions du juge des enfants et donc du Président du tribunal des enfants.

Le Président du Tribunal des enfants étant également juge des enfants, il peut avoir eu à connaître de l'affaire. Il peut s'être prononcé sur la culpabilité, ou s'être forgé une conviction. En tout état de cause, il connaît le mineur, et pourrait prononcer des mesures plus adaptées à sa personnalité que ne le ferait un juge qui ne le connaît pas. Le Conseil déclare inconstitutionnels les articles L. 251-3 et -4 du Code de l'organisation judiciaire. En vertu du principe de séparation des pouvoirs, de telles dispositions doivent être déclarées non conformes à la Constitution. Notons que l'inconstitutionnalité est différée au 1er janvier 2013.

En l’espèce, cette solution apporte une solution importante puisque le juge des enfants n’a désormais pas le droit d’intervenir dans l’instruction et dans le jugement. Elle conforte alors la place des droits fondamentaux dans le procès, y compris dans celui du mineur.

En revanche, elle risque de poser des difficultés dans les petits tribunaux, où le nombre de magistrats est restreint. Espérons que l'inconstitutionnalité n'aura pas pour effet pervers de déspécialiser le Tribunal, en aboutissant à ce qu'il soit présidé par un juge non spécialisé.

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