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J'ai l'esprit tout ennuyé, Odes, Pierre de Ronsard

Par   •  16 Octobre 2018  •  2 785 Mots (12 Pages)  •  1 547 Vues

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« De l'Orque qui ne pardonne,

Tant il est fier, à personne. »

qui témoignent de l’incapacité du poète à exprimer ces idées, où les virgules sont des soupirs d’effrois face aux questionnements sur le temps. La perturbation du lecteur passe aussi par des jeux sonores, notamment les allitérations en « t »

« J'ai l'esprit tout ennuyé

D'avoir trop étudié

Les Phénomènes d'Arate ;

Il est temps que je m'ébatte

Et que j'aille aux champs jouer. »

Qui créent chez le lecteur, dès les premiers abords, un sentiment ou une impression de malaise, de mal-être. C’est inévitablement l’effet recherché par le poète qui rapporte un aspect négatif à l’ennui, ceci lui permettant de l’appuyer. Il est également intéressant d’analyser certaines exclamations, tel que « c’est trop vécu ! », les mots de la fin, qui ont évidemment une importance ici, celle de laisser le lecteur sur l’impression désirée par le poète, à savoir l’homme mourra quoi qu’il advienne ( memento mori ).

La progression thématique nous amène alors, après l’expérience de l’étude, à l’expérience des plaisirs pris dans la nature. Dans un premier temps, il y a une rupture radicale avec les énoncés précédents, et par la suite, la présentation de la condition humaine nouvelle vécue dans la nature. En effet, les rimes sémantiques « friande/viande » ou encore « j’aime/crème » nous annonce les thèmes rapportés à cette nature. Les champs lexicaux de la nourriture « vin » « viande » , de la nature « feuilleuse » « antre » dans les troisième et quatrième strophes révèlent les principaux éléments rapportés à cette seconde expérience. Tout d’abord, il nous faut analyser, comme pour l’expérience de l’étude, la temporalité ainsi que le lieu où elle se déroule. Ici, tous deux sont spécifiés. D’une part, la temporalité est explicitée par l’utilisation d’indicateurs temporels, principalement les redondances du terme « été » qui plonge le lecteur dans une saison des plus plaisantes, où oisiveté et divertissement dominent. Ceci est mis au service de la volonté du poète à convaincre le lecteur de s’essayer à cette seconde expérience, qui part ailleurs, est une expérience des plus faciles. En effet, il faut rappeler ici le contexte culturel de l’époque. Nous sommes au XVIème siècle, les populations sont en grande majorité illettrée. Ainsi , la première expérience, celle de l’étude, est l’une des plus difficiles, ce qui est éventuellement à l’origine de l’ennui qu’elle procure. Seulement, la seconde se rapporte à la nature, un milieu qui nous entoure et qu’il est facile de rejoindre. De ce fait, l’homme est d’autant plus susceptible de prendre plaisir dans la nature que dans l’étude . Aux côtés de celle idée, nous retrouvons les indicateurs de lieux

« Sur le bord d’un ruisseau »

« Antre sauvage »

Qui permettent de situer l’action, l’expérience, dans un contexte fort plaisant, celui de la nature calme, accueillante et bienveillante, ce qui crée chez le lecteur une atmosphère favorable à son adhésion à cette expérience. Ce qui ici va permettre réellement d’insister sur ce plaisir est le choc, la rupture créée avec les premières strophes. En effet, aucune transition n’est employée dans le passage de la première expérience à la seconde. Ainsi, le poète montre au lecteur ce qu’il y a de désagréable en premier lieu ( étude,ennui,mort ) afin que ce dernier soit d’autant plus convaincu du second mode de vie décrit et expérimenté. Par ailleurs, contrairement aux premières strophes, il n’y a ici aucun questionnement, aucune ambiguïté, montrant que le plaisir pris dans cette nature est en réalité ce qui convient à l’homme dans sa manière d’être, lui permettant de rester serein d’esprit tout en jouissant d’une vie plaisante. Ici à nouveau s’impose à nous l’analyse de l’emploi de « nous » et « je » dans le poème. Nous avons vu précédemment que l’emploi du pronom nous et ce qui y réfère est en réalité un procédé utilisé par le poète pour montrer l’universalité de ce qui est vécu. Ici , « je » a également une importance primordiale. En employant ce pronom, le poète Ronsard suggère que le lecteur ne partage pas ce plaisir avec lui, et donc qu’il n’a auparavant pas tenté de suivre ce mode de vie. De ce fait, Ronsard expérimente ce qu’il en est et partage ses ressentis par rapport à cette manière d’être au monde. Les redondances de ce pronom, aux côtés du fait que le narrateur est omniprésent dans le poème, sujet de la majorité des phrases, montre que le poète est seul à s’essayer à ce mode, et qu’il peut donc, par sa plume, en retranscrire les résultats, ce qui représente un procédé fort intéressant témoin de la démarche scientifique suivie dans le poème.

Ainsi, s’attarder sur ce plaisir pris dans la nature est quelque chose de primordial pour nous. Il s’agit en effet du résultat de la seconde expérience. Tout d’abord, les différentes accumulations :

« Achète des abricots,

Des pompons, des artichauts,

Des fraises et de la crème . »

Témoignent de ce plaisir. Aux côtés de cela, nous pouvons remarquer que les cinq sens sont présents dans l’extrait , notamment dans la troisième strophe :

« Sache où le bon vin se vend ;

Fais rafraîchir la bouteille,

Cherche une feuilleuse treille

Et des fleurs pour me coucher.

Ne m'achète point de chair,

Car, tant soit-elle friande,

L'été je hais la viande ; »

Où l’olfactif « antre » , le goût «vin » , le toucher « coucher » , l’odorat « fleur », l’ouïe « bruit de l’eau » sont rappelés. Ceci révèle la communion existant entre poète et nature le moment de l’expérience, insistant à nouveau sur ce plaisir pris dans cette nature. Par ailleurs, les différents jeux sonores tel quel les allitérations en « f » :

« Fais rafraîchir la

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