La symbolique d'Oedipe

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Cette culpabilité est encore renforcée dans le film de Pasolini par la lecture psychanalytique du mythe. Œdipe n'est plus le jouet des dieux mais de son propre inconscient. Dès lors, son caractère ambiguë d'être à la fois victime et bourreau est mis en valeur. C'est lui-même, ou du moins une part inconsciente de lui-même, qui est à l'origine de son malheur. C'est en tout cas le sens de l'une de ses dernières paroles, alors qu'il rentre à Thèbes après sa rencontre avec le berger « tout a été voulu et non pas imposé par le destin »

Œdipe est donc un personnage complexe. Pourtant, si sa complexité explique qu'il soit à l'origine d'une véritable fascination et de nombreuses réécritures, c'est son hybris qui en fait un personnage tragique à part entière.

II Œdipe, un personnage démesuré

A Hybris d'Œdipe

Comme tous les personnages de tragédies grecques, le principal défaut d'Œdipe, celui qui explique, sans forcément justifier, le sort dont il est victime, est l'hybris, l’orgueil démesuré.

Cela se manifeste dès sa première apparition dans la pièce, quand il se présente avec orgueil comme « Œdipe au nom que nul ignore », ce qui reste paradoxal puisque son nom, dont l'un des sens pourrait être « pied gonflé », est la clef qui lui permettrait de résoudre l'énigme de sa naissance, et qu'il ignore justement cet indice.

La première source d'orgueil d'Œdipe est son origine royale, qui est la cause de son départ de Corinthe. En effet, après avoir triché à un jeu de palais, son rival l'accuse d'être le fils de la Fortune, renié par son père et par sa mère. C'est ce trouble « Ce mot me fit mal » qui le pousse à chercher des réponses chez l'oracle, ce qui met en branle le processus tragique.

L'inquiétude et même la honte d'Œdipe par rapport à son origine inconnue se traduit par le mépris qu'il attribue à Jocaste par rapport aux hommes de basse naissance. Alors qu'elle s'enfuit parce qu'elle vient de comprendre qu'il est le fils qu'elle avait abandonné, il pense que c'est parce qu'elle rougit d'avoir épousé un homme du peuple. Il tourne donc cette révélation à son avantage et se proclame fièrement « fils de la Fortune ».

La fierté d'Œdipe est également due à son ascension au trône. Œdipe est l'homme qui a vaincu le Sphinx, qui a déchiffré l'énigme, celui qui « lui [a fermé] la bouche, sans rien connaître des présages par sa simple présence d'esprit ». C'est cet orgueil qui le pousse à continuer de chercher la vérité même quand Jocaste le supplie de ne rien faire.

La fierté d'Œdipe, justifiée ou non, est également à l'origine d'un comportement violent, notamment par rapport à ceux qui mettraient en doute ses actes ou sa légitimité.

B Violence d'Œdipe

La principale faiblesse d'Œdipe, révélatrice de son hybris et responsable de son sort, est son emportement. Œdipe est impulsif, ce qui le conduit souvent à avoir des réactions brutales. Ainsi, sa colère le pousse à tuer Laïos plutôt qu'à s'écarter de son chemin – ce qui est d'autant plus flagrant dans le film car le meurtre n'est pas dû à un accès de rage mais bien à une volonté prémédité, il retourne sur ses pas pour achever son père. Il fait également preuve de violence par rapport à Tirésias qu'il injurie, menace et jette même au sol à plusieurs reprises dans le film. De même, il menace Créon de le faire exécuter et demande au berger de révéler ce qu'il sait sans quoi il aurait recours à la force pour lui arracher ses révélations. Tous ses adversaires sont donc menacé à un moment ou à un autre d'exil, de coups et de mort, mais finalement c'est contre lui-même qu' Œdipe retourne ces condamnations. En effet, c'était le sort que lui avait annoncé Créon lors de leur querelle « des caractères comme le tien sont surtout pénibles à eux-même et c'est bien justice » qui montre qu'Œdipe paie ici le prix de son orgueil.

Pour finir, de même qu'il se laisse facilement emporter, Œdipe prend souvent des décisions irréfléchies, comme lorsqu'il part pour la Pythie, qu'il quitte Corinthe ou qu'il part affronter le Sphinx alors qu'il n'avait selon toutes probabilités aucune chance de le vaincre.

Œdipe possède donc un caractère violent, prompt à s'échauffer qui fait, selon Jocaste, qu'il « ne sait pas juger avec sang-froid du présent et du passé ».

Pour conclure, nous pouvons dire qu'Œdipe est un personnage ambiguë, qui occupe plusieurs rôles à la fois, celui du solitaire, du roi et du tyran, du bourreau et de la victime. Il est également un héros tragique car, sans mériter pleinement les malheurs qui lui arrivent, il est victime de son hybris et son caractère colérique. Mais c'est justement parce qu'il est complexe et dominé par ses émotions qu'il est représentatif de la condition humaine, à tel point que, des centaines d'années après la création du mythe, il soit encore suffisamment représentatif de l'humanité même pour servir de prétexte à Pasolini pour réaliser un film autobiographique, mettant en avant son propre complexe d'Œdipe.