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Peut-on encore parler de classes sociales

Par   •  12 Avril 2018  •  2 524 Mots (11 Pages)  •  668 Vues

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on privilégie aujourd’hui la théorie du « retour de l’acteur » développé par Alain Touraine qui remet l’individu au centre des préoccupations. On peut considérer que les acteurs se définissent aujourd’hui par une identité individuelle. C’est pour cela que la logique de classe, qui présuppose une cohésion entre individus semblables, n’est plus applicable réellement à notre société. Les acteurs sociaux que sont les individus sont capables d’agir dans leur processus de socialisation. Ils disposent d’une marge de manœuvre et ne sont pas soumis à une société qui gouvernerait leur conduite. En outre, il y avait auparavant un véritable groupe ouvrier autour des bassins miniers en Nord-Pas-De-Calais par exemple, mus par un comportement solidaire et qui subissaient les mêmes conditions de vie comme dans « Germinal » de Zola. Ils partageaient également des intérêts communs. Or, cette identité commune n’existe plus, tout comme les classes, car les individus n’ont pas conscience d’appartenir à des catégories sociales. Pour preuve de cette étiolement des groupes, le pourcentage de syndicalisation en France a chuté depuis les années 1950 à aujourd’hui en passant de 30 à 5% de syndiqués, ce qui montre bien la rupture de l’identité collective. Enfin, on assisterait à une moyennisation sociale : un mode de vie de classe moyenne tendrait à se généraliser dans la population. Au final, il n’y aurait donc plus de classes rivales identifiées clairement, mais plutôt des constellations non homogènes, gravitant autour de la classe moyenne. Ainsi plus de 40% des Français estiment appartenir à la classe moyenne.

b) L’individu est capable d’autoréflexivité et de mettre en place des stratégies :

Cette « crise » de l’identité commune dans les classes sociales est aussi mise en avant et accentuée par Margaret Mead, qui soutient que l’individu peut jouer un rôle (ce qu’on attend de lui) différemment en l’interprétant et en l’adaptant à un contexte social donné. Cette analyse est partagée par Bernard Lahire, disciple de Bourdieu, dans sa théorie du pragmatisme. L’individu, qui appartient à un milieu social d’origine, ne se résume pas à ses capitaux économique, culturel, social et symbolique. Le fait est que l’individu peut établir des stratégies, réaliser une autoréflexivité et une auto-analyse. En vérité, selon la théorie de Lahire, l’homme est « pluriel », il est complexe et peut s’adapter à des habitus qui ne relèvent pas de son milieu social d’origine. Par exemple, un cadre peut regarder des émissions de télé-réalité, ce qui relève pourtant de classe sociale populaire. On reconnait à l’individu une certaine indépendance qui lui permet de s’émanciper de la logique sociale, au travers par exemple de l’ascension sociale (un fils d’ouvrier, à force de travail peut devenir cadre), car l’école est méritocratique. Par exemple, Najat Vallaud-Belkacem, fille d’un ouvrier marocain, est devenue ministre. Ainsi, selon les propres mots de Garfinkel : « L’homme n’est pas un idiot culturel ». Par ailleurs, la société est passée d’une configuration concentrique où les individus sont imbriqués dans les cercles sociaux à une configuration où ces cercles sociaux sont juxtaposés. Par exemple, il y a quelques décennies, la société mêlait en permanence la famille, l’école et le travail des individus, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Les individus sont donc libres car leur milieu social d’origine ne définit plus par avance leur socialisation à l’école ou au travail. En somme, la socialisation qui est un processus d’intériorisation, est propre de nos jours à chaque individu. Par exemple, un enfant d’ouvrier peut, dans le cadre d’une sortie scolaire, réaliser une activité ne correspondant pas à son capital culturel d’origine, comme fréquenter des musées. Nous sommes donc amener à côtoyer différents individus de milieux divers qui vont forger notre socialisation, qui évolue tout au long de notre vie. De même un individu peut bénéficier d’une socialisation anticipatrice qui est un mécanisme d’apprentissage de la vie en société dans lequel l’individu se comporte non pas selon l’éducation de son groupe social, mais selon les comportements du groupe auquel il souhaite se conformer. Par exemple, des ouvriers peuvent élever leurs enfants comme le feraient des bourgeois. Donc, l’individu, par des socialisations diverses, peut s’affranchir de son milieu social d’origine, ce qui montre bien l’obsolescence du principe de classe sociale.

III) Des classes sociales persistantes :

a) La conscience des classes sociales supérieures et leurs intérêts communs :

Même s’il n’existe plus à proprement parler de classes sociales, certains groupes sociaux s’apparentent encore au principe de classe. En effet, malgré l’étiolement de la classe prolétaire (l’ouvrier cherche à s’élever individuellement), et l’émergence de la classe moyenne, la bourgeoisie cherche encore à s’isoler et à conserver la classe bourgeoise. En vérité, si cette classe sociale persiste, c’est qu’elle a conscience d’appartenir à un milieu social car ses individus partagent des intérêts communs « les gens biens nés les protègent au moins des mauvaises fréquentations. » Ils ne veulent pas risquer de se mélanger avec des classes sociales inférieures et souhaitent conserver leur domination sociale. En somme, il y a une véritable mobilisation de la « haute société ». Ses membres partagent en effet des pratiques communes comme l’opéra, l’équitation, une façon de s’exprimer. Par ailleurs, cette différenciation de la bourgeoisie demeure la séquelle de la société d’ordre et des distinctions entre noblesse et tiers-états qui perdure encore de nos jours : « Dans l’Ouest, les bonnes familles ont toujours été plus nombreuses qu’ailleurs et cela, depuis des siècles » ; « Le Bottin rassemble…48% de nobles ». Pour pouvoir se conserver telle quelle, la classe bourgeoise a recours à différentes pratiques qui font appel aux capitaux économiques, sociaux et culturels qui lui sont propres. En effet, elle organise des rallyes « leurs parents dans les années 1960, ont inventé les rallyes » pour ne se regrouper qu’entre membres d’une même classe et qui est défini comme un « cadre nécessaire à l’apprentissage mondain ». Il s’agit d’apprendre à des jeunes issus d’un même niveau social à vivre ensemble, à se connaitre et se reconnaître, et finalement à organiser leur vie affective en conformité avec les obligations matrimoniales d’une reproduction sociale

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