Commentaire d'Ernest Renan "Qu'est-ce qu'une nation?"
Par Junecooper • 2 Novembre 2018 • 1 809 Mots (8 Pages) • 962 Vues
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- L’importance des notions de passé, de présent et de futur pour qualifier une nation
« Une nation est une âme, un principe spirituel » (ligne 22). Pour Renan, la nation est aussi un héritage de nos ancêtres, c’est « l’aboutissant d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements » (ligne 27). L’Histoire de la nation est ce qui la constitue principalement. La nation est unifiée surtout par ses souvenirs, ses guerres et ses regrets communs selon Ernest Renan. Pour Renan c’est « ce qui vaut mieux que des douanes communes et des frontières conformes aux idées stratégiques » (lignes 37 et 38). Il fait référence ici à l’Alsace-Lorraine perdue à la suite de la guerre franco-allemande. Pour lui ce territoire fait partie de la nation française car il a combattu avec la nation française. La nation est aussi « un plébiscite de tous les jours » (ligne 47). C’est un désir de vivre ensemble peut-importe les sacrifices à faire et de vouloir continuer une vie commune dans le futur. En 1882, la patrie redevenait une « expérience partagée » selon Alain Finkelkraut. Pendant la Troisième République, la culture nationale est très importante. Selon Sophie Guérard de Latour, une forte volonté d’intégration à la nation pour le futur existe. De plus pour Renan, le futur sert à faire perdurer une nation dans le temps. Il faut vouloir faire de grandes choses ensemble dans l’avenir, il faut vouloir les mêmes choses et avoir des ambitions communes.
Après avoir exposé sa conception de la nation, Ernest Renan va argumenter sur son idéologie de la nation.
II. L’idéologie de la nation : entre volonté humaine et pangermanisme
D’après Ernest Renan la volonté humaine est fondamentale dans la construction d’une nation. Il pense le contraire de la théorie allemande, qu’il n’hésite pas à critiquer.
- L’importance de la volonté humaine dans la construction d’une nation
« La sécession, me direz-vous, et, à la longue, l’émiettement des nations sont la conséquence d’un système qui met ces vieux organismes à la merci de volontés souvent peu éclairées » (lignes 56 à 58). Les volontés des Hommes changent dans le temps, en conséquence les nations en viennent à changer elles aussi. Les nations ne sont éternelles, « elles ont commencé, elles finiront » (ligne 62). C’est le cas notamment de l’Autriche-Hongrie qui est, aujourd’hui, huit pays différents. Les sécessions ─ le fait par une fraction de la population de se séparer de la collectivité nationale pour former une nation à part entière – mettent à mal les nations. La Catalogne en est l’exemple. Le 6 septembre 2017, le Parlement catalan a voté l’organisation d’un référendum en faveur de leur indépendance. De surcroit, Renan évoque le fait que les nations rencontrent des difficultés, il dit « Puisse l’esprit de sagesse te guider pour te préserver des innombrables dangers dont ta route est semée ! » (lignes 73 et 74). En France certains territoires revendiquent leurs différences comme la Corse, la Bretagne et le Pays Basque. Ces revendications contredisent l’article 1er, alinéa 1 de la Constitution française de 1958 qui dispose que « La France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. ». En déclarant « la confédération européenne, probablement, les remplacera » (lignes 62 et 63), Ernest Renan « prévoit » la création de l’Union européenne un siècle plus tôt, puisqu’il sait que les volontés des individus évoluent dans le temps.
- Critique de l’idée de nation des allemands
« Une grande agrégation d’hommes, saine d’esprit et chaude de cœur, crée une conscience morale qui s’appelle une nation » (lignes 76 à 78). Selon Fichte en 1807, la nation repose sur des critères objectifs. Dans ce texte, Renan critique la philosophie allemande de la nation selon laquelle le jus sanguinis prédomine. Renan qualifie les allemands comme « les transcendants de la politique, ces infaillibles ». Il les critique et, comme l’opinion publique en 1882, souhaite prendre sa revanche sur la défaite de la France lors de la guerre franco-allemande. Il voit une conception plus ouverte de la nation à laquelle n’importe qui peut s’agréger volontairement. On peut être de race différence mais consentir à faire des sacrifices pour la nation à laquelle on veut appartenir, c’est cela qui bâti une nation d’après Ernest Renan. En disant « Si des doutes s’élèvent sur ces frontières, consultez les populations disputées » (ligne 80), Renan fait référence à l’Alsace-Lorraine. Même si ce territoire a été perdu, ces habitants peuvent ne pas se considérer comme allemands mais comme français car ils ont partagé des choses communes avec la nation française ainsi qu’un passé commun. Il pense que la participation de l’Alsace-Lorraine à la guerre franco-allemande aux côtés de la République française, ne lui permet pas d’appartenir au Reich. Pour Renan, les alsaciens et les lorrains se considèrent toujours comme appartenant à la nation française. Ernest Renan, à la fin de son discours, prévoit le rattachement de l’Alsace-Lorraine à la France par le Traité de Versailles, le 28 juin 1919, en déclarant « Le moyen d’avoir raison dans l’avenir est, à certaines heures, de savoir se résigner à être démodé » (lignes 88 et 89).
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