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Etat fédéral, stade suprême du régionalisme ?

Par   •  15 Octobre 2018  •  2 432 Mots (10 Pages)  •  354 Vues

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Ainsi, si les modèles régional et fédéral, intégrés dans le modèle plus vaste d’Etat composé, font montre de ressemblances notables, il paraît nécessaire de nuancer l’idée que le premier serait une étape intermédiaire vers le second.

- L’Etat régional face à l’Etat fédéral : des différences de nature et de degré

D’abord, la structure même de chacun révèle une différence de nature : il ne s’agit pas du même type d’État, et cela s’observe aussi bien à la description de l’organisation que dans sa traduction constitutionnelle. Quant aux pouvoirs accordés aux entités infra-étatiques, ils diffèrent aussi : présents dans les deux cas, ils se manifestent à des degrés distincts.

En s’intéressant à la structure de l’État fédéral et à celle de l’État régional, une différence profonde tenant à la nature même de l’État apparaît, et elle se manifeste d’abord au niveau de l’organisation étatique. En effet, il est nécessaire de rappeler que l’État régional est avant tout un État unitaire et indivisible, comme le stipulent les article 5 de la Constitution italienne et 2 de la Constitution espagnole ; à l’inverse, l’Etat fédéral est un Etat complexe superposant des collectivités distinctes. Sur ce point la divergence est marquée, à tel point qu’A. de Tocqueville parle de « deux gouvernements séparés et presque indépendants » aux Etats-Unis pour désigner la superposition des niveaux fédéral et fédéré. Une telle dichotomie entre l’Etat central et les communautés est impensable au sein de l’Etat régional, en témoignent les procès pour « désobéissance » entrepris par Madrid à l’encontre de l’ancien président catalan, Artur Mas, à la suite de l’organisation en novembre 2014 d’une consultation à propos de l’indépendance de la Catalogne. Cette consultation avait en effet été jugée inconstitutionnelle par le Tribunal constitutionnel espagnol, considérant que, conformément à la Constitution, l'unité de l'Espagne ne pouvait être débattue que par l'ensemble des Espagnols et non pas au seul niveau régional. Ces divergences trouvent leur traduction dans la définition constitutionnelle de l’autonomie accordée aux entités infra-étatiques. En effet, si l’Etat régional reconnaît une autonomie politique au profit des régions consacrée par la Constitution, il n’en reste pas moins que cette dernière est unique et encadre, avec la loi nationale, ces institutions politiques locales. A l’inverse, les Etats fédérés disposent du principe d’autonomie notamment constitutionnelle des États fédérés (sous réserve du respect de la Constitution fédérale), et, bien qu’elles calquent le plus souvent leurs institutions sur celles de l’État fédéral (États-Unis, Allemagne), celles-ci peuvent parfois en différer, comme en Suisse. Aussi, aucun pouvoir hiérarchique n’existe du niveau fédéral sur les niveaux fédérés, tandis que l’Etat central exerce une tutelle sur ses communautés.

S’observent également des différences en termes de pouvoirs entre ces deux modèles. Afin d’apprécier le degré d’autonomie des entités au sein d’un Etat régional et de mesurer les différences éventuelles, la question de la division verticale des pouvoirs renvoie dans un premier temps aux relations existant entre le pouvoir national et le pouvoir local. S’agissant de l’étendue du pouvoir législatif, les Etats fédérés sont autonomes en matière législative dans le domaine garanti par la Constitution, alors que l’Etat régional se caractérise par un pouvoir législatif régional dont le domaine est prévu par la Constitution et sur lequel s’exerce un contrôle juridictionnel strict en termes de constitutionalité et de légalité pour l’Espagne, de constitutionalité et d’opportunité en Italie. D’autre part, les modalités de participation des autorités locales au pouvoir central sont aussi un point de divergence puisqu’elle est limitée s’agissant de l’exercice du pouvoir étatique : en Espagne, le Sénat est qualifié de « Chambre de représentation territoriale » mais les sénateurs désignés par les Communautés autonomes sont minoritaires (46 sur 254) ; en Italie le Sénat n’a pas vocation à représenter les régions. Au sein d’un Etat fédéral, les Etats fédérés participent au pouvoir fédéral, constituant, législatif et exécutif (que ce soit par la désignation des membres de l’exécutif en Suisse ou la représentation directe des Etats fédérés au sein de l’exécutif fédéral au Canada).

D’où l’affirmation progressive de l’Etat régional en tant que troisième voie originale plutôt qu’en tant que simple forme d’Etat transitoire.

II – L’Etat régional, une troisième voie

L’Etat régional semble être devenu une alternative réelle et stable au système binaire Etat fédéral/unitaire. Bien que dérivant de ce dernier, il n’en reste pas moins un modèle singulier que certains appellent d’ailleurs de leurs vœux en vue de sauver une Europe tiraillée entre fédéralisme et confédéralisme.

- L’Etat régional, une nouvelle forme d’Etat

L’Etat régional s’affirme en tant que forme étatique viable et original au sein de laquelle les collectivités régionales voient leur pouvoir d’auto-organisation encadré parallèlement à une participation au pouvoir au niveau national limité.

L’origine de la singularité de celui-ci peut en partie être trouvée dans la formation de celui-ci : tandis que la formation « historique » des Etats régionaux tels que l’Italie et l’Espagne s’est faite sur la base d’un Etat unitaire, celle de l’État fédéral s’est quasiment toujours faite par association, à quelques exceptions près. D’autant plus que, parmi ces exceptions, peu forment en réalité des contre-exemples du fait d’une réalité bien plus complexe et nuancée qu’une simple naissance par dissociation. En effet, la Belgique, dont la transformation de 1993 ne faisait en réalité qu’entériner une situation déjà établie, l’ex-URSS formée par dissociation qui dissimulait en réalité un Etat très centralisé ou encore l’Autriche engagée dans la voie du fédéralisme suite à la dislocation de l’Empire austro-hongrois. C’est peut-être ici l’une des originalités les plus visibles de l’Etat régional par rapport à l’Etat fédéral.

Aussi, certains observateurs ont tendance à faire tendre vers le modèle régional d’autres Etats, dont le Royaume-Uni depuis la « dévolution de pouvoirs » à l’Écosse et au Pays de Galle

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