Dans quel mesure le poète peut-il représenter le monde qui l'entoure ?
Par Christopher • 4 Juillet 2018 • 1 181 Mots (5 Pages) • 574 Vues
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dans sa poésie. Même si celle-ci se veut fantastique ou imaginaire, elle va, d’une certaine manière, représenter le monde réel. « Nuit Rhénane » d’Apollinaire en est le parfait exemple : la première strophe se passe dans le réel source d’inspiration à la fois de l’auteur et du « je » lyrique. Puis, cette situation rappelle au narrateur un souvenir et le lecteur se trouve embarqué dans une poésie surréaliste. Mais, dans la dernière strophe, on retrouve le réel, modifié par le fantastique puisque le « verre s’est brisé ». Cette construction résume le procédé de création poétique : s’inspirer du réel pour nourrir cette création et influencer le réel.
Enfin, le langage poétique mêle le réel et l’irréel et fait appel aux références communes des lecteurs pour toucher et se faire comprendre.
Lorsque le poète veut décrire un monde imaginaire il utilise les thèmes quotidiens et grâce aux figures de styles comme la métaphore, la comparaison ou encore l’allégorie, il transforme... De plus, l’écriture poétique peut aussi permettre au poète de décrire et dépeindre le monde réel grâce à un monde imaginaire. Ainsi, La Fontaine dans ses célèbres fables nous contait les histoires d’un peuple d’animaux parlant qui représentaient la société des hommes. Il s’est donc servi de procédés de style poétique pour cacher sa description de la réalité et adoucir son propos afin de le rendre lisible par tous.
La description de la réalité est donc obligatoire pour que le poète écrive et atteigne ses buts. Mais cette description connaît des limites que nous allons voir maintenant.
Premièrement, la forme même de la poésie empêche la description totalement fidèle du monde. En effet la poésie est rattachée au principe de l’art pour l’art. C’est à dire que la poésie doit être belle avant d’être utile. Le poète va donc tendre à déformer la réalité selon les propos et les émotions qu’il veut transmettre. Ainsi dans « L’émigrant de Landor Road » Apollinaire donne au paysage des caractéristiques du personnage pour mieux faire passer son message. On voit alors des feuilles dites « indécises » qui ne le sont que pour le poète et le « je » lyrique.
De plus, la subjectivité du poète ne permet pas non plus une représentation totalement réelle du monde. En effet, comme le disait Phillipe K.Dick “La réalité c’est ce qui continue d’exister lorsqu’on cesse d’y croire...” Elle n’est pas altérée par la vision d’un homme. Le poète peut donc décrire le monde qui l’entoure tel qu’il le voit, le ressent mais ne peut pas décrire le monde tel qu’il est objectivement. Mais cette incapacité n’est pas handicapante pour le poète. Son ambition n’est pas de montrer un monde objectif mais son monde à lui, afin que le lecteur puisse réfléchir et se créer le sien. Il est plus intéressant pour le poète d’étudier les milliers de mondes que chacun se représente plutôt que le seul monde réel que personne ne voit vraiment.
En conclusion, la forme littéraire de la poésie donne donc surement plus de le pouvoir et de liberté au poète. Il peut s’exprimer très librement, faire appel à ses sentiments, à son imaginaire, au fantastique… Mais, cette même forme de création souvent très abstraite, limite aussi le pouvoir du poète dans son expression de sa représentation du monde. Il n’a donc pas un pouvoir absolu, bien que conséquent sur la représentation du monde qui l’entoure. On peut alors se demander si ce pouvoir et ses limites sont propres à la poésie ou s’ils sont finalement associés à toutes les formes de création, comme le roman, le théâtre, la sculpture… ?
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