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Lecture analytique Dom Juan V, 2

Par   •  20 Juin 2018  •  1 707 Mots (7 Pages)  •  597 Vues

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de la vertu

- Vocabulaire de la traîtrise, du piège : “panneau”, “dupes”, “stratagème”, “intrigues”, “imposture”

- Champ lexical du théâtre : “personnage”, “jouer”, “art”, “je ferai” au sens de “je jouerai le rôle de”, d’où une société devenant spectacle de théâtre, jeu de masques dissimulant la vérité des êtres.

- NB : hypocrite signifie étymologiquement le comédien, l’acteur en grec ancien. Procédé de mise en abîme : le théâtre dans le théâtre.

- Métaphores de la dissimulation :

o thème de l’ « habit » -déguisement appuyé par “rhabillé” et prolongé par le “manteau de la religion”

o images de l’ “abri” et du “bouclier” (l’hypocrisie protège du regard et donc du jugement négatif d’autrui) ;

2) La peinture d’un caractère : le portrait-type de l’hypocrite, un rôle facile à jouer en apparence

Dans sa tirade, Don Juan décrit le personnage de faux dévôt qu’il compte jouer : Mais le portrait moral est complètement opposé au portrait physique:

- le portrait physique : une caricature burlesque évoquant les portraits de la Bruyère à la même époque Mais, pour le spectateur de l’époque, les 3 traits physiques rappellent clairement la silhouette de Tartuffe !

o “quelque baissement de tête” = apparence d’humilité ;

o “un soupir mortifié” = apparence de pénitence ;

o “deux roulements d’yeux” = apparence d’émotion, de sensibilité.

+ les déterminants (“Quelque”, “un” et “deux”) montrent le peu d’efforts à fournir pour prendre le masque du dévôt = un rôle facile, accessible à tout le monde ! Tout laisse penser que Don Juan se livre ici à un véritable jeu d’acteurs, apprenant son personnage, travaillant sa gestuelle, ses mimiques… Théâtre dans le théâtre.

⇨ Un portrait physique qui construit une apparence inoffensive, toute en humilité et repentir….

- le portrait moral de l’hypocrite , évoqué à travers les projets de DJ en dernière partie, à partir de “Je m’érigerai” : violence des termes “censeur”, “haine”, “vengeur” et agressivité des verbes :“m’érigerai”, pousserai”, “accuserai”, “saurai déchaîner” soulignant l’intolérance, la férocité et la violence des faux dévôts.

⇨ Antithèse radicale entre le portrait physique et le portrait moral, entre l’apparence et la réalité = une figure en réalité redoutable, un personnage puissant et impitoyable sous des dehors insignifiants et inoffensifs

III : Un projet cynique

1) La société étant corrompue, Don Juan prend le parti de jouer lui aussi le faux dévot.

- Passage du « ils », « on » au « je » : après avoir brossé le tableau d’une société corropue, DJ dévoile son projet cynique, sa décision de se rallier à la pratique générale : « je veux » , « je voudrai » .

- Passage du présent au futur de l’indicatif, à partir de « Je ne quitterai point mes douces habitudes » = un futur à valeur d’affirmation de la volonté de DJ, décrivant avec précision sa future conduite de faux dévot.

3) L’hypocrisie comme refuge sûr et confortable

- Champ lexical de la tranquillité et du bien-être :

o “merveilleux avantages” : adjectif laudatif et hyperbolique,

o “jouit en repos”, “impunité”, “abri”, sûreté”, s’opposant au statut précaire et instable du libertin, pouvant tranquillement poursuivre sa conduite immorale désormais dissimulée sous des dehors respectables:

o “mes douces habitudes” et “ me divertirai à petit bruit” évoquant à l’aide d’euphémismes hypocrites sa débauche.

4) Retour ds la dernière phrase au présent de vérité générale afin de formuler une morale immorale, cynique :

- « C’est ainsi qu’il faut profiter des faiblesses des hommes » : tournure impersonnelle « il faut » suggère la visée morale de cette formule qui se présente comme un précepte, une maxime ou règle morale.

- « C’est ainsi […] qu’un sage esprit s’accommode des vices de son siècle ». Dans ce contexte de décadence, la sagesse conduit à accepter le vice, ce qui est paradoxal, et évidemment le contraire de ce qu’un vrai chrétien doit faire : “sage esprit” parodiant les termes de la morale traditionnelle pour mieux la bafouer : projet négatif et cynique de “profiter des faiblesses” et “s’accommoder aux vices” = contraire des préceptes chrétiens.

CCL : Molière se fait ici moraliste dans la grande tradition classique, il dénonce les travers et les vices d’une époque comme l’ont fait La Rochefoucauld dans ses Maximes ou la Bruyère dans ses Caractères. Mais il s’attaque ici au puissant parti dévot qui règne alors à la Cour de Louis XIV. Souhaitant protester contre la cabale dont Tartuffe a été victime, il va à nouveau déchaîner ses foudres.

L’intérêt de cette scène est aussi de nous montrer que le théâtre est peut-être le meilleur moyen de dénoncer la comédie sociale, ce théâtre des apparences qu’est la société, et cette tirade, par le jeu de rôle qu’elle propose, procède en effet du théâtre dans le théâtre.

Une question peut être soulevée par rapport au héros de la pièce : comment condamner Don Juan et ses dépravations dans un tel contexte ? Après l’avoir accablé, Molière nous montre qu’il existe bien pire que lui, c’est-à-dire des puissants aussi débauchés mais respectés en raison de leur dissimulation.

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