La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, Blaise Cendrars
Par Junecooper • 1 Mai 2018 • 1 916 Mots (8 Pages) • 1 032 Vues
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Plusieurs fois dans notre extrait, Cendrars se déclare « mauvais poète » et dit ne « pas savoir aller jusqu’au bout ». Le lien avec les observations qui précède est assez énigmatique (on a tantôt le connecteur logique « et » tantôt « pourtant »). Cendrars veut sans doute dire qu’il est un mauvais poète au sens traditionnel du terme. Il ne sait pas et ne veut faire de jolis poèmes achevés (« aller jusqu’au bout « ), aux formes fixes, et qu’il n’arrive donc à enfermer dans un poème toute cette vie et tous ces désirs débordants. Cela expliquerait qu’il ait appelé son texte « Prose du Transsibérien » alors même qu’il est en fait en vers libre. Il n’a pas prétendu faire un « joli poème » limité par trop de règles ou par la nécessité de délivrer un message, un propos achevé. Il nous livre un texte sans fin, rythmé, ou se mêlent les souvenirs, les images, les désirs, un poème pour dire la vie débordante, comme une musique de jazz ou un tableau cubiste.
Bien loin de ne constituer qu’une exploration intérieure de ses souvenirs, la « Prose du Transsibérien » est un poème dynamique tourné vers un ailleurs véritable. La poésie de Cendrars, fondée sur une expérience réelle du voyage, témoigne d’un élan enthousiaste d’ouverture sur le monde. On peut opposer cette image du voyage moderne à des poèmes du XIXe siècle, tels que L’invitation au voyage de Baudelaire, ou Le bateau ivre de Rimbaud, où le voyage est avant tout une expérience intérieure, qui est une métaphore de la poésie.
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