Cahiers de Douai, contexte biographique et historique, le recueil
Par Stella0400 • 9 Janvier 2018 • 1 427 Mots (6 Pages) • 2 158 Vues
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Trois baisers
Je regardai, couleur de cire
Un petit rayon buissonnier
Papillonner comme un sourire
À son sein blanc, – mouche au rosier!
Première soirée
– Je regardai, couleur de cire
Un petit rayon buissonnier
Papillonner dans son sourire
Et sur son sein, mouche au rosier.
Un véritable scrupule d'écrivain l'a conduit à corriger ses textes antérieurs: Sensation (deuxième version de «Par les beaux soirs d'été», avec une variante des plus heureuses dès l'incipit ; Le Forgeron (deuxième version beaucoup plus soignée que le manuscrit donné à Izambard, d'ailleurs incomplet) ; Soleil et chair (deuxième version de Credo in unam, allégé de 36 vers de la troisième partie) ; Ophélie dont il fera trois versions ; Vénus anadyomène qui comptera deux versions ; Les Reparties de Nina (deuxième version de Ce que retient Nina: deux strophes ont été supprimées, et une nouvelle, la seizième a été introduite) ; A la musique (deuxième version, avec des corrections qui rompent le rythme trop régulier de l'alexandrin). Pour d'autres textes, il ne nous est pas possible de dire si un semblable travail a été fait. C'est probable pour «Morts de Quatre-vingt-douze» et possible pour Bal des pendus ainsi que pour Châtiment de Tartufe. C'est en revanche incertain pour Les Effarés et pour Roman, datés de septembre, ainsi que pour Le Mal et les Rages de Césars, non datés, mais de création récente. Quant aux poèmes du Second Cahier, ils n'ont évidemment pas pu être retravaillés, et nous n'en connaîtrons jamais qu'une version.
Une dernière remarque s'impose, confirmant que Rimbaud a laissé derrière lui, à Douai, un recueil achevé : jamais il ne corrigera plus ces textes, à l'exception des Effarés, dont il existe un autre manuscrit autographe plus tardif, donné à Jean Aicard en juin 1871.
C – Un recueil cohérent.
Le classement des poèmes est en partie chronologique: ceux d'avant l'été figurent en tête, ceux de l'automne à la fin. D'un point de vue thématique, des disparités sont observées, les poèmes politiques se mêlant à des poèmes plus lyriques. Toutefois, l'inspiration politique apparaît plus diffuse. On notera qu'il s'agit bien souvent de l'expression d'un point de vue personnel : indignation, passion, irrévérence ou encore indifférence.
La satire est dans ce recueil indissociable de l'inspiration personnelle. On la retrouve aussi bien dans les poèmes politique qu'intimes. Elle se présente sous diverses formes, commentaire de paroles (Les Reparties de Nina) ou tableau faussement objectif (A la musique et ses scènes de vie à Charleville ; Les rages de César et son portrait de l'Empereur). Elle vise particulièrement la religion et ses représentants (Le Forgeron ; Le Châtiment de Tartufe ; Le mal). Cette ironie est même parfois utilisée à l'encontre de lui-même, notamment au sujet de ses déboires amoureux (Premières soirées ; Les Reparties de Nina ; A la musique ; Roman ; Rêvé pour l'hiver ; Au Cabaret-vert ; La Maline) et l'amour en général (Soleil et chair ; Vénus anadyomène). Le bohémien et le poète sont, eux aussi, moqués (Ma bohème ; Roman).
Le lyrisme se manifeste à travers la figure du poète se trouvant dans l'attente de « l'Amour infini », du frisson du désir provoqué par l'autre. Mais cette confiance se trouve être déçue, et ce pour diverses raisons : la malignité (Première soirée ; La Maline), la stupidité (Les Reparties de Nina), la décrépitude des femmes (Vénus anadyomène) ou l'indifférence de la Nature à la mort de l'homme (le Dormeur du val).
Cependant, « les bonnes croyances » n'en sont pas pour autant abandonnées (Ophélié et sa réponse à l'appel du révolté, Roman et ma bohème et leurs invitations à la robinsonnade et à la bohémiennerie). L'aisance, de l'adolescent fugueur, qu'elle soit rêve ou réalité (Rêvé pour l'hiver ; Au Cabaret Vert) ou le bonheur tranquille, ce bien-être du corps nourrissant l'âme (Le Forgeron), contrastent avec le lyrisme désappointé.
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