Les esclaves dans le monde grec dans la première moitié du IVe siècle, dissertation.
Par Raze • 7 Juin 2018 • 2 797 Mots (12 Pages) • 531 Vues
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sera plus sévèrement puni si le fautif est un esclave – par des coups de fouets entre autres. L’esclave est considéré comme un bien matériel, un animal domestique (chez Xénophon) ou un enfant (pour Aristote). Par ailleurs, il existe deux grands types d’esclaves : l’esclave rural et l’esclave-marchandise. L’esclave rural constitue la forme d’esclavage la plus répandue : une population rurale dans sa totalité était privée de liberté pour diverses raisons, et devait travailler sur des terres qui étaient la propriété de citoyens. Le cas le plus connu est celui des hilotes à Sparte, mais la situation est globalement identique, à quelques nuances près, pour les clarotes en Crète, pour les pénestes de Thessalie, pour les gymnètes d’Argos, pour les maryandiniens d’Héraclée du Pont, et pour les killyriens de Syracuse. L’esclavage-marchandise s’est développé au sein de cités où la réduction en servitude des natifs de la communauté était interdite, comme à Athènes par exemple. Une force de travail n’est importée que lorsque la force de travail interne devient insuffisante. Ce type d’esclavage est d’abord présent dans les cités qui protègent leurs ressortissants de la servitude. Dès lors, ces cités se tournent vers l’achat d’esclaves venus d’ailleurs, soit d’autres régions du monde grec, soit de pays barbares. Ces esclaves sont vendus et achetés sur des marchés spécialisés, à l’image de n’importe quelle autre marchandise, d’où la dénomination qui désigne leur statut.
Ainsi, l’origine, le mode d’obtention et le statut des esclaves grecs de l’époque permettent de mieux cerner leurs caractéristiques communes générales, et il est désormais possible de s’interroger quant à la notion d’être esclave, et les différentes spécificités qui en découlent.
En premier lieu, l’esclave faisait partie intégrante de la société puisque, par son rôle d’exclu et de marginal, il permettait notamment une structuration de la cité. En effet, s’il était totalement mis à l’écart de la vie sociale et politique de la cité, son existence même permettait la valorisation de la participation à ces mêmes aspects de la société par les citoyens. L’esclave ne pouvait pas avoir recours à une autorité légale, ni même pénétrer dans les lieux publics majeurs comme les palestres, où les hommes pratiquaient la lutte, ou les sanctuaires dédiées à Déméter pour les femmes.
Par ailleurs, l’Etat pouvait engager les esclaves à travailler dans les mines de plomb argentifère de Laurion, l’une des sources financières les plus importantes pour la Grèce de l’époque. Les esclaves étaient également intégrés au sein de la hiérarchie propre à la cité, surtout à Athènes, où la « pyramide sociale » les place au bas de l’échelle, au même titre que les étrangers ou encore les femmes. Le système était globalement semblable à Sparte, avec une société très stratifiée où les hilotes étaient dominés par les Homoioi. Ces esclaves et hilotes étaient par ailleurs extrêmement majoritaires en nombre comparés aux citoyens libres. Malgré sa mise à l’écart de la vie politique, religieuse et civique, l’esclave était soumis à une législation qui lui était propre : par exemple à Athènes, un maître qui se trouvait être trop violent envers son esclave pouvait comparaître devant un tribunal à la demande d’un autre citoyen. Cette législation permettait moins la protection des esclaves que la garantie, pour les propriétaires, d’un dédommagement en cas de perte d’un bien. L’esclave était donc pleinement la propriété du citoyen.
L’esclave dépendait exclusivement de son maître, le kurios. Il peut être perçu comme un « instrument animé » puisqu’il figure dans les inventaires des biens et les testaments des citoyens, au même titre que les biens fonciers, les terres, les meubles ou encore les bijoux. Il n’a aucun droit, ni politique ni civique et il est juridiquement privé de toute personnalité : par exemple, son témoignage ne peut être valable que s’il a été recueilli sous la torture. Son maître, au contraire, a tout pouvoir sur lui : il peut notamment le vendre ou le battre. En effet, et pour critiquer la législation propre aux esclaves mentionnée précédemment, le meurtre d’un esclave est jugé à Athènes devant le tribunal du Palladion, sous la condition qu’il y ait une plainte, or dans le cas d’un maître qui aurait tué son propre esclave, ce n’était pas le cas. Par ailleurs, la peine encourue se résume généralement à une amende. Ainsi, l’existence sociale de l’esclave se résumait au lien exclusif qu’il entretenait avec son maître. Il était dépendant du bon vouloir de son maître, et celui-ci pouvait même décider de l’existence ou de la non-existence de ses rapports sexuels : il était ainsi chosifié. Le maître était aussi responsable de son esclave, et il devait répondre des éventuels dommages causés par celui-ci. Cette responsabilité de l’un sur l’autre permettait un lien entre l’esclave et son propriétaire, et montre également à quel point les citoyens avaient besoin des esclaves, puisqu’ils sont prêts à s’engager à payer pour leurs fautes.
Enfin, être esclave en Grèce au IVe siècle se résume également à exercer une véritable pluralité des activités. Hormis l’activité politique réservée aux citoyens, les esclaves pouvaient pratiquer toute activité : ils jouaient un rôle prépondérant dans l’agriculture, fondement de l’économie grecque de l’époque, par exemple, mais aussi dans l’artisanat, ou en tant qu’employés de maison, puisque la majorité des citoyens possédaient au moins un – mais souvent plusieurs – esclave domestique. L’esclavage est dès lors perçu comme indispensable aux activités économiques. Les esclaves sont employés à toutes les tâches : domestiques (au sein des maisonnées), agricoles (à la campagne), et artisanales (dans les ateliers). Les femmes esclaves forment quant à elles l’essentiel des prostituées travaillant dans les bordels publics et privés athéniens. Les collectivités civiques employaient aussi des esclaves dans des fonctions publiques : ils aidaient les magistrats dans leurs fonctions, entretenaient les rues, assuraient le maintien de l’ordre… La privation de liberté est la même pour tous, toutefois les conditions de vie quotidiennes varient selon la tâche accomplie et de la relation entretenue avec le maître. Les esclaves domestiques étaient souvent dépourvus de qualifications, et leur travail consistait dès lors à celui des femmes et des enfants. Ce sont avant tout des gens de service (courses, repas…), et ceux étant instruits étaient chargés de veiller sur les enfants du maître : il en est le pédagogue.
Ainsi,
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