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L 'Aubette de Strasbourg

Par   •  22 Juin 2018  •  3 647 Mots (15 Pages)  •  641 Vues

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L'attribution des différents espaces et l'avancement des travaux ont été souvent commentés, aussi bien avant que pendant et après la «métamorphose» de l'Aubette, notamment par Van Doesburg lui-même dans son numéro spécial de De Stijl consacré à l'Aubette.

Pendant les années qui séparent cette première rencontre en 1922 de l'année 1926, lorsque la conception de l'Aubette fut confiée à Hans et Sophie Taeuber-Arp, ils semblent avoir entretenu des relations soutenues avec Van Doesburg. Cette amitié se concrétisa par le projet d'acheter un terrain et d'y construire deux maisons attenantes.

On peut difficilement déduire de la correspondance conservée la nature exacte des relations entre les trois artistes concernés. Sophie Taeuber, connue pour sa modestie et son sérieux, et qui avait seule décroché le projet de l'Aubette, s'est quelque peu laissé pousser au second plan par Van Doesburg pendant les travaux. Arp et Taeuber bénéficiaient d'un plus grand confort financier que Van Doesburg. Celui-ci jouait volontiers au chef de bande et avait été sollicité par les Arp pour réaliser ce projet parce qu'il était plus averti qu'eux en matière d’architecture. Van Doesburg s'accorda un rôle plus important dans le projet que les deux artistes. Ainsi, il conçut, en plus des deux salles qui lui étaient allouées, l'ensemble de l'éclairage, les meubles et la typographie de la signalétique. Hans Arp s'est restreint aux deux salles qui lui étaient attribuées. La déception de Van Doesburg, liée à son investissement en énergie important pour un résultat démentant ses grandes espérances, ne semble pas avoir gâché leur amitié. Après l'Aubette, il n'y a plus eu de grands projets communs, mais les Arp ont continué à entretenir des relations cordiales avec Van Doesburg jusqu'à sa mort. Arp fut ainsi l'un des initiateurs du numéro d'hommage de De Stijl en 1932.

LETTRES

- L'Aubette ou la synthèse des arts

A. L'Aubette : la synthèse des arts

La ville de Strasbourg, depuis des siècles ville à l'allure européenne, constitue l'emplacement idéal pour l'Aubette, car elle est exemplaire, en tant que création artistique, de ce que peut être une collaboration européenne : celle qui eut lieu entre le Néerlandais Théo Van Doesburg, ses amis et collègues Hans Arp et Sophie Taeuber.

L'avant-garde artistique de la première moitié du vingtième siècle se caractérise par le plurilinguisme, les contacts par-delà les frontières et la collaboration entre artistes de différents pays. Mais l'Aubette est également le fruit du plurilinguisme dans une acceptation plus métaphorique. Elle est exemplaire de la rencontre des différents « langages » des beaux-arts : la peinture, l'architecture, ainsi que, dans un certain sens, la sculpture et les arts appliqués ; elle est un exemple de synthèse des arts, l'une des priorités de l'avant-garde, mais elle s'inscrit évidemment dans une tradition séculaire et existe dans presque toutes les cultures.

Depuis toujours, il existe deux domaines dans lesquels les arts sont amenés à se rencontrer, où l'on peut parler de Gesamtkunstwerk : en architecture (la synthèse des arts y est permanente et concerne les arts visuels) et au théâtre (la synthèse des arts y est toujours éphémère et ponctuelle, la littérature et la musique y dominent, bien que soutenues par des moyens visuels).

L'avant-garde du vingtième siècle débutant a accordé beaucoup d'attention à ces deux modalités de synthèse, mais en développant un certain dualisme. D'un côté, on visait l'idéal d'une intégration de tous les arts, qui devait, selon cette pensée utopique, conduire à un environnement total capable de transformer l'individu et la communauté. D'un autre côté, il était question d'un idéal de pureté absolue : beaucoup d'artistes d'avant-garde souhaitaient conduire leur art à une pureté aussi intacte que possible de toute contamination d'éléments empruntés aux autres arts. Ce dualisme, travaille l'avant-garde en permanence, et cela est particulièrement vrai pour les artistes associés au sein de De Stijl,dont Van Doesburg était le leader.

Lassé de conflits, suite aux projets que n'ont pas été réalisé, Van Doesburg ne rechercha plus dans ses projets ultérieurs d'autres architectes, mais seulement le soutien de dessinateurs industriels.

Il se chargea désormais seul de la conception architecturale. Ceci vaut pour son dernier projet, sa propre maison à Meudon, mais aussi pour son projet le plus ambitieux et le plus abouti dans ce domaine, l'Aubette, conçue et réalisée entre 1926 et 1928 en étroite collaboration avec Arp et Taeuber.

Ce qui est inédit dans l'Aubette, c'est l'utilisation, dans la grande salle, de surfaces orthogonales placées en diagonale, ainsi que, dans cette même salle comme dans d'autres, de reliefs sur les murs et les plafonds : deux façons de troubler la perception visuelle de la fonction constructive d'un espace, et donc d'atteindre à la destruction ultime de l'architecture. Le fait que cette déconstruction ait lieu non pas dans une maison particulière, mais dans un espace public, où les gens venaient pour manger, boire et se divertir, est également inédit. L'idéal de la synthèse des arts était donc implanté en plein cœur de la vie moderne quotidienne.

- La restauration

A. A la recherche de la fête perdue;questions sur l'authenticité, l'image et la mémoire

S'associant avec Hans et Sophie Taeuber-Arp, Theo van Doesburg aurait voulu faire de Strasbourg une ville qui ait du swing, un creuset pour l'avant-garde internationale des roaring twenties. La transformation de l'Aubette, un bâtiment de garnison historique situé sur l'ancienne place de parade au cœur de la ville, en un complexe de divertissement contemporain (1926-1928) semblait la commande rêvée pour réaliser les idéaux de l'intérieur moderne. Les trois artistes décorèrent les espaces intérieurs chacun à leur façon, Van Doesburg prenant en charge la direction des travaux ainsi que la publicité. Ce dernier écrivit, entre autres dans son magazine De Stijl , alternativement en français, en allemand, et en néerlandais, illustrant ses textes de dessins et de photos, la genèse

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