Dissertation Artaud / Novarina
Par Junecooper • 30 Août 2018 • 1 429 Mots (6 Pages) • 444 Vues
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Le rapport avec le public est assez spécial : le temps doit être déstructuré, comme une partie musicale, chaque moment doit être unique. Le spectateur doit toujours être attentif pour se trouver entre deux mondes et restait dans un état de trauma. Il doit être actif pour être en quête de sens. Là ce fait un lien aussi avec le théâtre antique. On peut rajouter à ce lien l'effet de terreur, de pitié, l'utilisation de masques...
II – Le théâtre d'Antonin Artaud et le lien.
Quel est le théâtre d'Artaud ? Sa façon d'écrire le théâtre ? Il nous donne énormément d'élément dans Le Théâtre et son double (1938), qui est une œuvre singulier qui touche au début qu'un groupe restreint de lecteurs. Après les années 20, ses écrits connaissent un grand succès dans le monde. Très vite, il développe une haine pour la traduction occidentale du théâtre. Il dit justement que : « La représentation doit devenir un acte unique et dangereux d'où comédiens et spectateurs ne peuvent à aucun prix ressortir intacts » En 1931, il découvre le théâtre balinais , et c'est une révolution pour lui : le théâtre qu'il cherchait existe. Le théâtre pour Artaud doit être sans psychologie. Son théâtre doit être total et physique. Les mots ont de l'importance, comme les rêves. La phrase fait partie du rêve, et nous devons chercher son sens, comme on cherche à comprendre un rêve à notre réveil. Artaud utilise aussi la musique et les instruments dans ses pièces : ils envoient de la vie. Les lieux où sont représentés les pièces doivent sortir de l'ordinaire, être des lieux sacrés. L'acteur n'a pas d'intention personnelle : il agit pour la parole.
Comment un théâtre moderne pourrait-il être fidèle à Artaud? Il faudrait qu'il soit sacré, que la parole y soit pure affirmation, qu'il ne soit ni abstrait, ni distancié, une pure fête sans objet ni représentation, un acte pur, politique mais inarticulé, sans idéologie, ni culture, ni interprétation. Comment concilier tout cela? En effaçant la répétition. Celle-ci est le centre du mal. Elle est séparation, elle commande tout ce qui se dérobe et menace la vie. Seule vaut la dépense, présente et sans retour, sans oeuvre ni mémoire. La fête de la cruauté ne peut avoir lieu qu'une fois, ce qui prouve que cette fidélité est impossible. Quel est le geste et la parole qui n'a lieu qu'une fois? La voix, cette voix par essence unique qui, selon Artaud, devait commander aux signes comme aux corps. Dans cette direction, Artaud a eu des successeurs : Novarina. Valère Novarina s’inscrit dans cette lignée de grands protecteurs de la langue et de la pensée. Plusieurs allusions sont faites concernant Artaud et son « Théâtre de la cruauté » : théâtre du sang, du cri, de la vie, pas d'analyse psychologique... Dans Le Théâtre et son double, Artaud nous parle de cris, de plaintes, d'apparitions surprises . Novarina utilise les même éléments dans ses mises en scène. Pour Novarina comme pour Artaud, il incombe au théâtre de sauver l’Occident du matérialisme absolu, de lui rendre le sens du sacré, donc d’abord de l’Homme. Novarina, redoutant que nous ne finissions « un jour muets à force de communiquer », résiste « à l’image mécanique et instrumentale du langage que nous propose le grand système marchand qui vient étendre son filet sur notre Occident désorienté, à la religion des choses, à l’hypnose de l’objet, à l’idolâtrie, à ce temps qui semble s’être condamné à n’être plus que le temps circulaire d’une vente à perpétuité » . Ce procès se joue sur plusieurs scènes, linguistique, poétique, éthique. Les costumes doivent être colorés, spéciaux, non uniformes. Pour nos deux artistes, l'auteur et le metteur en scène doivent devenir une sorte de créature unique. Les pièces doivent être déséquilibrées. L'acteur doit être le porteur de la parole, il doit porter des masques, ou les visages deviennent des masques. Artaud parle lui de « reflets », de « miroir ». Novarina utilisera justement, pour la mise en scène du Vrai Sang en 2011, un col ciré afin que l'acteur puisse être reflété. Artaud incluant la musique, Novarina fait de même et rajoute même des bruitages.
Les deux soutiennent un théâtre qui abandonne la psychologie, qui raconte inconscient, le caché, la quête du sens / sang,
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