Arrêt CE 3 décembre 1999 Didier
Par Ramy • 17 Novembre 2018 • 1 789 Mots (8 Pages) • 1 143 Vues
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La CEDH a quant à elle dit expressément que cet organisme « doit être regardé comme un « tribunal » au sens des dispositions en cause.
Il est nécessaire de ne pas faire de cette application une généralité, autrement dit il ne faut pas considérer que tous les organismes collégiaux entre dans le champ d’applicabilité de l’art 6-1. Le CE considère d’ailleurs que le CNIL « n’émane pas d’un tribunal au sens de l’art 6-1 »
- L’étendue du principe d’impartialité
Dans l’arrêt Didier, le Conseil d’Etat le respect par le Conseil des marchés financier du principe d’impartialité énoncé à l’art 6-1. Le Conseil d’Etat relève le principe d’impartialité comme un principe général mais vient aussi souligner certaines exigences notamment celles liées à la participation du rapporteur.
- Principe : l’impartialité, la consécration d’un principe selon le droit interne
Ce principe peut être relié à la notion de service public et constitue un principe général du droit. Le principe d’impartialité est également relié à l’art 16 de la DDHC (« les principes d’indépendances et d’impartialité sont indissociables de l’exercice de fonctions juridictionnelles » , « des pouvoirs de sanction par une autorité indépendante »). Il ne s’impose pas seulement aux organes juridictionnels au sens du droit français ou aux tribunaux au sens de l’art 6-1. Il s’applique aux organes administratifs ou juridictionnels. Le principe doit également être respecté par les organismes consultatifs.
Selon l’article 6-1 de la CEDH, « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de tout accusation en matière pénale dirigée contre elle. » La Cour de cassation s’est prononcée en faveur de l’article 6-1 au nom de l’impartialité et de l’égalité qui s’imposent aussi aux AAI, en l’occurrence ici le Conseil des marchés financiers, même si elles ne sont pas des juridictions ( Cass. Ass. Plénière 5 janviers 1999 « Oury » à propos de la COB. Le Conseil d’Etat quant à lui était en désaccord avec cette décision, estimant que les autorités de régulation ne sont pas un tribunal (CE, 4 mai 1998, « Wargny »)
Cependant il revient sur cette position dans l’arrêt du 3 décembre 1999 « Didier » à propos du Conseil de marchés. Le Conseil d’Etat estime que le pouvoir de certaines AAI doit être regardé comme « décidant du bien-fondé d’une accusation en matière pénale. » En conséquence, le respect du contradictoire et de l’impartialité doit être une garantie.
- L’importance d’une rigueur dans l’organisation des institutions : remise en cause de la présence du rapporteur
Dans l’affaire Didier la question était de savoir si la présence du rapporteur était contraire au principe d’impartialité. Dans cet arrêt, on s’intéresse aux dispositions régissant les fonctions du rapporteur mais plus encore le respect des actions du rapporteur en fonction de ces dispositions. Il est a noter que la réflexion sur ce débat dépasse le rôle du rapporte et s’étend à la composition des organismes collégiaux. On constate que les fonctionnaires peuvent exercer un certain pouvoir à condition qu’il n’exerce pas des activités donnant lieu aux questions qui lui sont soumises.
On comprend que le Conseil d’Etat juge que la participation du rapporteur dans cet arrêt n’est pas contraire au principe d’impartialité rappelé par l’arti 6-1 de la CEDH. Pour statuer ainsi, le CE a établi un examen très précis des pouvoirs du rapporteur devant cet organisme. Après avoir cité les textes organisant l'ensemble de la procédure disciplinaire devant le Conseil des marchés financiers, il a relevé "que le rapporteur, qui n'est pas à l'origine de la saisine, ne participe pas à la formulation des griefs ; qu'il n'a pas le pouvoir de classer l'affaire ou, au contraire, d'élargir le cadre de la saisine, que les pouvoirs d'investigation dont il est investi pour vérifier la pertinence des griefs et des observations de la personne poursuivie ne l'habilitent pas à faire des perquisitions, des saisies ni à procéder à toute autre mesure de contrainte au cours de l'instruction". Ces pouvoirs, qui sont d'ailleurs identiques à ceux dont dispose la formation disciplinaire collégiale du Conseil des marchés financiers elle-même, constituent donc des pouvoirs d'instruction faisant partie de l'office même de cette formation et ne sont nullement assimilables ni à des pouvoirs de poursuite, ni aux pouvoirs conférés au juge d'instruction devant les juridictions pénales. Dans ces conditions et selon un mode de raisonnement analogue à celui adopté, dans des hypothèses voisines, par la Cour européenne des droits de l'homme, le Conseil d'Etat a jugé que la participation du rapporteur au délibéré n'était pas contraire au principe d'impartialité.
Cette solution ne préjuge pas de celles qui seront adoptées par le Conseil d'Etat lorsque celui-ci aura à connaître de sanctions infligées par des organismes au sein desquels le rapporteur est doté de certains pouvoirs de poursuite ou de formulation des griefs. Mais elle ouvre la voie à un examen au cas par cas de chacune des procédures suivies par les organismes administratifs du type du Conseil des marchés financiers qui sont chargés d'infliger des sanctions administratives.
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