Progrès technique, ennemi de l'emploi?
Par Junecooper • 28 Novembre 2018 • 2 476 Mots (10 Pages) • 554 Vues
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Le progrès technique a modifié dans un premier temps la structure globale de l'emploi, en les détruisant et les créant, mais il s'avère également que la répartition des fruits de l'innovation affecte considérablement les emplois.
I – Le progrès technique modifie la structure de l'emploi
IG : Le progrès technique a un double effet : il rend obsolète certains marchés mais permet en contrepartie le développement de nouveaux secteurs économiques.
A – A court terme, le progrès technique détruit des emplois
>> Le progrès technique, par l'innovation, améliore le capital productif :
- Le progrès technique, en améliorant le capital productif, le rend plus performant et moins coûteux à la marge. Passé un certain seuil, il devient plus avantageux d'investir dans ce capital que de payer des travailleurs. L'intensité capitalistique, explicitée par la courbe de Cobb-Douglas et mettant en relation le facteur travail et capital, devient plus forte et le facteur travail moins présent. Le capital se substitue au travail et conduit à la suppression d'emplois. La robotisation dans les usines depuis plus de 50 ans est représentatif de ce phénomène. Les machines ont remplacé les ouvriers et ont supprimé des emplois notamment dans les pays développés où le coût de la main d'oeuvre est élevé. Par exemple, l'industrie automobile est presque entièrement robotisée au niveau du processus de production dans ces pays.
- Selon Schumpeter, le progrès technique entraîne une destruction créatrice, c'est-à-dire qu'il engendre dans un premier temps des pertes d'emplois. En effet, l'innovation va rendre certains marchés obsolètes. Ainsi, les entreprises de ces secteurs vont s'adapter et de nombreux emplois vont être supprimés. Par exemple, la mécanisation agricole pendant la révolution industrielle du XVIIIe siècle a engendré le licenciement de nombreux ouvriers agricoles car les machines effectuaient leur travail plus efficacement et à moindre coût. Schumpeter voit ici l'effet du progrès technique et de la destruction créatrice comme une purge. Seuls les entreprises ayant investi dans le but d'innover survivront car elle sont porteuses du progrès technique. Les autres entreprises, celles étant de simples copieuses, disparaîtront par manque d'innovation.
B – Mais à long terme, il crée des emplois dans de nouveaux secteurs
>> Le progrès technique assure la naissance et le développement de nouveaux marchés :
- En effet, la destruction créatrice de Schumpeter est également créatrice d'emplois. Elle rend obsolète certains secteurs économiques ou certaines organisations du travail car elle crée par l'innovation de nouveaux marchés ainsi que de nouvelles méthodes de travail. C'est ainsi que le Taylorisme puis le Fordisme révolutionnèrent l'industrie et insufflèrent une nouvelle phase de croissance durant la première moitié du XXe siècle puis durant les 30 Glorieuses. En instaurant le travail à la chaîne et en spécialisant les ouvriers, cette nouvelle Organisation Scientifique du Travail a permis de décupler la productivité des entreprises et donc à terme d'embaucher.
- Ensuite, le capital est substituable au travail mais il peut être également son complément. Par exemple, la robotisation des industries a impliqué la formation d'ouvriers de maintenance et de mécaniciens afin de pouvoir assurer le fonctionnement de ces machines. Cependant, la nature de l'emploi des ouvriers a été modifiée puisque leur fonction première n'est plus la même qu'auparavant et qu'une formation ainsi que l'acquisition de nouvelles compétences ont été nécessaires pour conserver ou trouver leur emploi. Ce phénomène peut être prolongé par la théorie du déversement de Sauvy. Cette théorie stipule que le progrès technique, en permettant de remplacer le travail par le capital, supprime des emplois dans un secteur économique. Mais cette force de travail disponible est par la suite employée afin de développer les nouveaux secteurs économiques émergents. Cette théorie peut justifier la tertiarisation des économies développées car les ouvriers remplacés par les machines dans les industries se sont reconvertis dans le secteur des services.
II – De plus, les effets du progrès technique varient selon son utilisation
IG : Le progrès technique conduit à des gains de productivité. Ses effets dépendent de la répartition de ces gains de productivité.
A – Le progrès technique peut être favorable à la création d'emplois
>> Le progrès technique est positif pour l'emploi à condition que les gains de productivité soient correctement alloués :
- Si les gains de productivité sont orientés vers la hausse des salaires, la demande et la consommation des ménages, notamment des plus modestes, augmenteront. Et par pression de la demande, les entreprises investiront et embaucheront pour répondre à cette demande. De plus, une augmentation des salaires pousseraient les salariés à s'impliquer davantage dans leur travail et donc d'accroître leur productivité pour que celle-ci corresponde au niveau de leur rémunération et éventuellement espérer une nouvelle hausse de leur salaire. On peut ici parler du salaire d'efficience de Stiglitz où le niveau de rémunération établit l'intensité du travail attendu.
- Ensuite, si les gains de productivité sont dirigés vers la baisse des prix des produits, cela aura pour effet d'augmenter leur demande car devenus accessibles à des classes ne pouvant pas se les offrir avant. Là encore, l'augmentation des débouchés permettront aux entreprises d'envisager la création d'emploi. L'association de ces deux premières répartitions fut appliquée par Ford et sa politique du « Five dollars a day ». En doublant les salaires et en diminuant les prix de sa Ford T, il augmenta les débouchés pouvant être satisfaite par le nouveau système de travail à la chaîne. Cette phase de croissance, d'embauche et d'investissement est également favorable à l'innovation ainsi qu'au renouvellement du progrès technique.
- Enfin, les gains de productivité peuvent se tourner vers la diminution du volume de travail mais spécialement vers la durée
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