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Stella LeBlanc

Par   •  8 Novembre 2018  •  2 972 Mots (12 Pages)  •  554 Vues

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Mme Cormier voyait bien que Stella éprouvait de la difficulté à s'adapter à son nouveau poste au sein d'une grande entreprise. Elle tenta de l'encourager en lui confiant certains projets et en lui affirmant qu'elle ne tarderait pas à devenir plus occupée.

Un jour, Stella l'interrogea sur la possibilité d'obtenir un micro-ordinateur afin de sauvegarder l'information qui pourrait lui être utile plus tard. Dorina Cormier lui indiqua alors qu'un comité étudiait déjà la proposition faite plusieurs mois plus tôt d'acquérir un certain nombre d’ordinateurs. Cette requête avait été soumise à Rosaire Godin, le directeur de l’unité «Recherche et Développement» de l’entreprise qui, jusqu’à ce jour, n’avait donné aucune suite à cette demande. Sans se laisser troubler, Stella lui demanda si elle pourrait acheter son propre ordinateur et l'installer au bureau. Madame Cormier l’en dissuada en affirmant que cela risquait d’engendrer certains problèmes au travail. Cependant, comme elle disposait elle-même d’un ordinateur, elle rassura Stella qu’elles pourraient s’en partager le temps d’utilisation.

Au bout de six semaines, les choses n’avaient pas changé. La charge de travail demeurait réduite et Stella avait toujours à s’adapter à son nouvel environnement. La jeune femme se demandait maintenant si elle avait bien fait d’entrer au service d’une grande organisation. Elle s’inquiétait également de son avenir, puisque selon elle, elle avait l’impression de désapprendre. Elle avait commencé à redouter de travailler encore 30 à 35 ans dans de telles conditions. De plus, elle s’était très vite rendu compte de l’éloignement de sa famille, de ses ami(e)s, des heures passées dans l’autobus et le métro dans le cadre de son travail. Elle discuta encore et encore de cette situation avec Dorina. Elle avait même proposé à Dorina d’organiser une réunion avec Rosaire Godin, le directeur général, mais rien n’y fit.

Un jour où Stella et Dorina entraient à la cafétéria de l’entreprise, elles aperçurent Adalbert Losier, le président de la compagnie. Connaissant ce dernier depuis plus de 20 ans, Dorina alla le trouver. Voici les propos qu’ils échangèrent.

Mme Cormier : – Bonjour Adalbert, puis-je m’asseoir avec toi ?

Adalbert Losier : Bien sûr. Ça fait deux mois qu’on ne s’est pas parlé, toi et moi. C’est toujours un plaisir de discuter avec toi.

Mme Cormier : -On ne se rencontre plus aussi souvent…depuis que Rosaire Godin est nommé directeur général et que tout passe par lui maintenant. Selon moi…

Adalbert Losier : -Pardon ?

Mme Cormier :-Et bien… Je ne sais pas si tu es au courant, mais ça va mal dans l’entreprise. Le moral est au plus bas et Ales choses ne sont plus comme avant. Depuis que Rosaire Godin a pris la tête de notre département, il y a un an, tout a changé. Tout d’abord, j’ai l’impression de passer mon temps à ne rien faire. Cela fait plus de 20 ans que je suis au service de cette entreprise et je n’ai jamais vécu une situation pareille. Me voir tourner le pouce, non. Lorsque je dois quitter la maison pour le service, je me demande pourquoi j’irais travailler, puisque les projets sur lesquels je travaillais ne me sont plus référés. Imagine-toi donc quand vient le moment de ma paie… Je ne suis pas fière de recevoir mon salaire car j’ai toujours l’impression de ne pas le mériter. Je suis devenue la spécialiste des revues. Comment veux-tu que je ne vive pas le syndrome de ce qu’on appelle «dissonance cognitive» dans une situation pareille? Loin de moi l’idée de prétendre critiquer ton directeur, mais je me demande s’il a vraiment les compétences qu’il faut pour diriger notre unité. Non seulement il n’est ni visible ni disponible, mais aussi, pour le peu de tâches que nous avons à assumer, je ne comprends vraiment pas l’attitude de Rosaire. Il examine en détail le travail de tous les agents et il insiste pour lire la moindre lettre avant qu’elle ne soit expédiée. On a l’impression qu’il se mêle de tout. Notre production en souffre beaucoup. Par exemple, lorsqu’une de mes lettres contient un mot ou une expression qui ne lui plaît pas, il me la retourne quatre jours plus tard avec une note disant que je devrais faire plus attention. Il ne me donne pas d’indications précises afin que je sache quoi améliorer. Pas plus tard que la semaine passée, je l’avais rencontré pour lui parler mon sentiment de malaise que ses remarques créent en moi, il ne semblait pas comprendre. «On ne questionne pas les décisions de son supérieur, on les accepte et c’est tout», m’a-t-il répondu. J’étais sidérée et je n’arrivais pas à comprendre ce qui se passait. Avant, avec Samuel Tahé, l’ancien directeur du département de recherche et développement, c’était plus plaisant. Pourquoi au juste l’avez-vous fait partir? Actuellement les réunions du lundi matin ne se font plus. Nous n’avons plus l’occasion de nous exprimer ou encore de connaître les nouveaux employés. Aucun accueil, aucune occasion de socialisation. Tout ceci va à l’encontre des valeurs de l’entreprise auxquelles je crois et j’adhère.

Allant dans le même sens, depuis que Stella est embauchée, elle tourne le pouce et ne fait rien qui vaille la peine d’être considéré dans d’autres boîtes, comme moi d’ailleurs. Elle est démotivée et se demande si elle a fait un bon choix d’accepter de travailler ici. Quelles sont ses tâches de façon concrète? Je ne le sais pas, et elle non plus ! Et puis, ce n’est pas juste Stella et moi qui nous plaignons. Tout le monde y passe !

Adalbert Losier : -En as-tu parlé à Thomas ? (Thomas est un autre employé, directeur des ressources humaines, qui compte plusieurs années dans la compagnie).

Mme Cormier : -Bien sûr que oui. Il est lui aussi dans la même situation que nous. S’il n’était pas là pour nous calmer un peu, je crois que nous aurions tous déjà remis notre démission. Selon ses dires, étant donné que c’est un département nouvellement créé, les tâches devraient être définies avant l’embauche des employés. Rosaire Godin n’a jamais rien voulu comprendre et à peine s’il n’a pas haussé le ton lorsque Thomas lui en a parlé. Il est sorti du bureau de Godin écorché et la tête baissée. Juges-tu approprié, juste pour la compagnie d’être payé à ne rien faire? Ton choix de direction est-il le meilleur?

Adalbert Losier : -Tu me surprends. J’étais convaincu que tout allait pour le mieux dans

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