R. Desnos | Ce coeur qui haïssait la guerre
Par Junecooper • 27 Avril 2018 • 1 645 Mots (7 Pages) • 679 Vues
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Ce poème appartient à la littérature engagée, celle qui s’engage dans la réalité de son époque et défend une cause, prend parti, attaque, condense… Ici, on est en présence d’un appel à la Résistance et à la lutte contre l’Occupant et l’idéologie Nazi. Ce qui explique qu’il n’ait pas pu autrement que clandestinement. Desnos use de différents moyens et procédés pour obtenir l’adhésion de son lecteur et le pousse à l’action.
La forme du texte : le choix du verset confère au poème une solennité, un caractère quasiment sacré (ici, la liberté prend la place de la divinité) qui exalte le lecteur. De même, la répétition et les anaphores créent un martèlement, un appel opiniâtre qui oblige à répondre :
La dimension collective : Desnos veut montrer à tous ceux qui se sont engagés dans la Résistance, et qui travaillent « dans l’ombre », qui ne restent pas seuls mais s’en rajoute des millions » « autour d’un même mot d’ordre », d’où l’insistance sur les pluriels et le passage de « ce cœur » a « ces cœurs ». C’est la France toute entière qui est appelée, jusque dans les plus petits villages symbolisés par la cloche. Il même appel à la mémoire du lecteur en évoquant « les vieilles colères » rappelant l’héritage républicain des révolutions et les nombreuses rébellions du peuple français contre l’oppression « le recueil l’Honneur des poètes » est paru à la date symbolique du 14 Juillet, fête nationale et commémoration de la rébellion contre l’oppression avec la prise de la Bastille. Le poète utilise ainsi le registre épique en donnant à la lutte une dimension cosmique qui rejoint la nature toute entière ; le combat du peuple français contre l’occupant devient alors comme « celui de la mer à l’assaut des falaises » comme une puissance inexorable qui doit emporter l’adhésion de tous. L’engagement du poète s’exprime également par l’appel à la responsabilité : au verset 7, Desnos en s’adressant directement à l’impératif « écoutez » lui montre qu’il ne peut rester indifférent, qu’il doit écouter le message porté par le poème (d’où la répétition du mot bruit). Mais il ne suffit d’écouter et d’autres termes sont des appels à l’engagement actif comme « réveiller, se préparent et besogne » répétés 2 fois.
Les valeurs pour lesquelles il faut lutter sont scandés comme un mot d’ordre ou un slogan dans une manifestation : "Révolte, ses partisans, liberté » avec le polyptote du verbe battre (un mot décrit sous différentes formes) Desnos montre encore que cette lutte a pris un caractère vital. Mais au-delà de cet appel Desnos envoie un message d’espoir. Il affirme à son lecteur que la lutte n’est pas vaine, puisqu’elle repose sur une communion de tout un peuple.
Par le jeu des temps, il donne foi sur l’avenir en allant du passé au présent de l’entrée en résistance puis au futur du combat au verset 15 «imposera » il jouera également sur les connotations opposés de l’ombre et de l’aube : cette ombre symbolise les ténèbres de l’oppression Nazi. Mais elle laissera forcément de la lumière « l’aube proche » « garantie l’espoir ».
Le lyrisme poétique sait se faire engager quand le poète exprime sa révolte et sa volonté de lutte contre l’oppression tout en parlant au nom d’une collectivité mais le poète garde son langage propre et ne fait pas de discours de propagande. Il partage son émotion à travers un rythme suggestif ou les jeux sont les sonorités et les connotations. Le message n’enlève donc rien à la beauté du texte et le lecteur est toujours ému par ce poème même s’il ne se trouve plus dans le même contexte politique.
Quelques années plus tard après la fin de la guerre Jean Paul Sartre dans son article l’écrivain engagé définit bien la responsabilité des Hommes de lettre dans l’engagement.
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