Dissertation sur le conte voltairien.
Par Orhan • 17 Avril 2018 • 1 724 Mots (7 Pages) • 1 357 Vues
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Ainsi, le conte voltairien donne une véritable leçon de vérité puisque les grands combats des Lumières se dégagent des séductions de l'imagination. On retrouve un principe cher aux encyclopédistes, l'appel à la tolérance et à la liberté d'expression. Dans Micromégas, Voltaire tourne en dérision le personnage du muphti et les jurisconsultes. Il cherche à dénoncer l'injustice, la censure et les jugements arbitraires que portent les détenteurs de la justice.
Autre point important dans la pensée des Lumières, l'appel au pouvoir de la raison et de l'esprit de recherche et d'examen afin de combattre l'obscurantisme sont présents dans Micromégas avec l'examen de la baleine, des terriens et de la terre. En utilisant les diverses ressources de la fantaisie, une dénonciation du fanatisme religieux, décrit comme un véritable problème qui empêche d'avancer, est réalisée à travers le conte philosophique.
De plus, Micromégas est l'incarnation du souverain éclairé qui possède toutes les qualités du philosophe. Doté d'un esprit curieux, il est le type même de ''l'honnête homme''. Zadig, dans l'oeuvre qui porte son nom, incarne le personnage type du souverain philosophe, il fait régner la justice en supprimant la corruption, en réconciliant des partis hostiles et surtout en libérant un peuple de la superstition.
Enfin, il est à noter que le conte propose un véritable modèle politique à travers les péripéties qui rythment la vie du héros, de telle sorte que les questions philosophiques qui nécessitent des réponses faisant appel à la sagesse sont mêlées au récit, formant un ensemble à la fois agréable à lire mais qui ne manque pas d'instruire.
Ainsi, en entremêlant la recherche de la vérité et les leçons de sagesse avec la fantaisie et le merveilleux, le conte voltairien parvient à unir désir d'instruire et désir de divertir en amusant.
Comme dans les fables et autres textes argumentatifs, la moralité et la leçon de sagesse ne sont pas directement intégrés au récit. Ils sont insérés implicitement, ce qui mène le lecteur à se retrouver dans l'oeuvre, pour peu qu'il soit assez instruit pour parvenir à déceler ladite morale. Dans Micromégas, la morale est bien entendu portée sur la notion de relativisme, basée sur l'opposition entre l'infiniment grand et l'infiniment petit. Les leçons philosophiques ne sont ainsi pas en marge du récit mais bien intégrées à des épisodes chargées de les illustrer, le rôle de la narration dans Micromégas est donc de proposer au lecteur une morale intrinsèque, qui doit être décelée au fil de la lecture.
De plus, plusieurs registres sont entremêlés dans le conte philosophique. Alors que les plus graves questions sont traitées avec légèreté dans le but de ne pas ennuyer le lecteur, l'ironie est incontournable pour séduire l'esprit. En provoquant une réflexion, elle devient donc inévitable. L'ironie est par ailleurs l'une des armes favorites de Voltaire car elle souligne les travers de ses contemporains, conduit à la caricature et lui permet d'exprimer librement ses pensées et ses idées, sans risquer de se heurter à la censure. En utilisant des parodies ou des mises en dérision, Voltaire utilise l'ironie et l'humour comme lorsqu'il parle de ''satisfaction des lecteurs''. Grâce à cette outil, les explications perdent de leur sens et de leur utilité, sans pour autant que cela ne déteigne sur la vivacité de l'écrit. Les attaques se font entre autres à demi-mot pour déjouer la censure, comme dans Micromégas lorsque Voltaire lance un regard amusé à l'égard des ''mites philosophiques'' et des ''animalcules philosophiques'' débattant de la nature de l'âme. L'ironie et la satire sont donc des outils préférentielles du conte philosophique, lui conférant une dimension à la fois instructive mais aussi plaisante, tout en dénonçant les fléaux de l'époque.
Cette ironie si chère au conte philosophique et à son initiateur et précurseur Voltaire est aussi illustré en fins de chapitres. Grace à l'allusion au ''livre tout blanc'' entre autres dans Micromégas, une certaine complicité s'installe entre l'auteur et le lecteur, les fins de chapitres donnent une bonne image de l'ironie. Cette dernière, caractérisée par la légèreté et la profondeur, illustre bien la visée du conte philosophique, qui mêle fantaisie et merveilleux avec vérité et réel.
En définitive, le conte voltairien joint la fantaisie et la vérité, et par la même occasion l'utile à l'agréable. A la limite de l'oxymore, le conte se rapporte à la fiction alors que l'adjectif philosophique évoque la réflexion, la recherche scientifique et le rejet du fanatisme et de l'obscurantisme. Nous retrouvons alors la drôlerie et l'amusement, délicatement mêlées à la vérité, par le biais d'outils comme la satire. Ces deux aspects deviennent alors inséparables, en se renforçant mutuellement et en faisant du conte voltairien une œuvre qui parvient à unir désir d'instruire et désir d'amuser.
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