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Commentaire de la scène du meurtre de "L'Etranger" de Camus

Par   •  28 Janvier 2018  •  1 510 Mots (7 Pages)  •  891 Vues

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Nous avons donc pu voir que le cadre qui entoure Meursault le contraint, l’agresse et le pousse à tuer malgré lui.

Meursault est ainsi pris dans un engrenage tragique, il ne semble plus maîtriser ses actes et subir le poids de son destin, un destin tragique.

Tout d’abord, tout autour de lui, des signes semblent annoncer le drame à venir, des événements antérieurs à la scène lui rappellent ainsi que le danger et la mort rôdent autour de lui. Référence est faite, dans une première analepse, à l’altercation entre Raymond et les arabes qui s’est mal terminée pour lui ; à la ligne 12, Meursault compare son présent à cet affrontement sanglant : « C’était le même soleil, la même lumière sur le même sable qui se prolongeait ici ». Cette anaphore de l’adverbe « même » souligne cette ressemblance et une issue qui semble être tout aussi dramatique. Notons également que le temps semble même s’être arrêté : « il y avait déjà deux heures que la journée n’avançait plus, deux heures qu’elle avait jeté l’ancre... », l. 14-16, ce qui renforce ce sentiment de fatalité qui pèse sur ses épaules. D’autre part, juste après, c’est l’enterrement de sa mère qui est évoqué ligne 30-31 : « c’était le même soleil que le jour où j’avais enterré maman et, comme alors, le front surtout me faisait mal... ». Ici, c’est la souffrance physique qui est mise en valeur, souffrance doublement insupportable puisqu’elle est associée au souvenir de la mort de sa mère. Qui préfigure celle de l’arabe. Alors, on peut penser que l’évocation de ces deux événements dramatiques alourdit encore l’atmosphère de cette rencontre ; ils semblent de mauvais augure pour la suite.

En outre, lors de la scène du meurtre, il paraît ne pas maîtriser ses actes réellement, et est donc montré comme un homme dépossédé de son crime. Nous le voyons premièrement dans le contraste qu’il y a entre ses pensées et ses actions. A partir de la ligne 21 : « J’ai pensé que je n’avais qu’un demi-tour à faire et ce serait fini » ou ligne 36 : « Je savais que c’était stupide » ; grâce au discours indirect, nous voyons qu’il réfléchit à ses actes, qu’il en est conscient. Cependant, le connecteur logique « mais », l. 22 et 38 marque une opposition franche et montre que, malgré ces éclairs de lucidité, il agit autrement : il continue d’avancer vers l’arabe et de le provoquer indirectement : « j’ai fait quelques pas vers la source » et « j’ai fait un pas, un seul pas vers l’avant », l. 24 et 38. Et c’est ce pas incontrôlé qui est l’erreur fatale, qui déclenche le mécanisme tragique1. Par ailleurs, il n’est pas montré comme étant responsable du meurtre en lui-même ; il y a une ellipse du tir et la seule indication que nous ayons est la métonymie : « la gâchette a cédé », l. 58. Nous avons donc l’impression que ce n’est pas le narrateur qui a tiré mais que c’est l’arme qui s’est déclenchée seule puisqu’il n’est pas le sujet de l’action. Lui a juste « crispé sa main sur le revolver » et « touché le ventre poli de la crosse », l. 57 et 59. Et il a tué sans le vouloir, sans en avoir conscience, presque sans en être responsable mais cela va sceller son destin tragique qui est alors inévitable.

Même s’il a commis un meurtre malgré lui, ce dernier n’est pas vain, il permet d’éveiller sa conscience, il va reprendre en main sa vie et assumer son destin. C’est le parallélisme « tout a vacillé », « tout a commencé » des lignes 53 et 61 qui marque cette rupture, et cet éveil définitif ; le meurtre lui a fait prendre conscience que sa vie allait changer : « j’ai compris que j’avais détruit l’équilibre du jour... », l. 62. Ensuite, il reprend l’initiative de ses actes, est le sujet des actions : « j’ai secoué la sueur et le soleil », l. 61-62 ; il se débarrasse ainsi de ses premiers assaillants, de ceux qui l’ont poussé à tuer. Puis de son dernier adversaire, l’arabe, en tirant volontairement cette fois : « encore quatre fois sur un corps inerte où les balles s’enfonçaient sans qu’il y parût », l. 65-67. Notons la métaphore des deux dernières lignes « quatre coups brefs que je frappais sur la porte du malheur », porte qui représente un seuil, une limite entre deux mondes, celui des vivants heureux et celui des condamnés au malheur et à la mort. Ici, c’est une phrase qui a une valeur prophétique, annonçant sa condamnation à mort dont il semble alors conscient. Ainsi, il assume ses actes, il endosse son rôle de héros tragique qui est prêt à affronter le monde et sa propre mort.

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