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L'impact de la scénographie sur le corps du visiteur d'après l'étude du musée juif de Berlin

Par   •  20 Juin 2018  •  2 354 Mots (10 Pages)  •  674 Vues

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Les axes au sein du Musée juif de Berlin

L'axe de l'Holocauste est le dernier axe. Pouvant être considéré comme le mémorial du musée, la Tour de l'Holocauste s'ouvre après le franchissement d'une porte bétonnée. L'espace qui s'offre aux visiteurs est un vide à la hauteur de l'édifice soit de vingt-quatre mètres. L'atmosphère contraste avec celle du musée. Appréhendé comme un véritable choc physique par le corps, l'esthétique est tout aussi froide que la température mortuaire ambiante. La température corporelle diminue au fur et à mesure que l'espace semble compresser l'homme. Sans échappatoire le corps du visiteur se lie à l'immensité morbide de la structure, se rattachant à son seul espoir de sortie : un faible faisceau lumineux inaccessible tant il est haut. L'extérieur est ici évoqué comme une solution sans fin, improbable, vers la liberté. Une solution qui met le corps humain face à son impuissance, l'obligeant à se plier devant la force, la puissance architecturale. [pic 9][pic 10]

Le second axe est celui de l'exil menant au jardin éponyme. Cet espace intervient à la fois comme un soulagement corporel et une désorientation. Passant de l'ombre à la lumière, de l'intérieur vers l'extérieur, et voyant dans ce parcours scénographique un enchainement d'épreuves, le visiteur perçoit le jardin de l'exil comme un dérèglement apaisant. En extérieur, le corps bénéficie d'une lumière naturelle, véritable source qui tente à satisfaire une soif de liberté. Une liberté difficile créée par une instabilité visuelle, pouvant être symbolisée par le sol incliné d’où émanent 49 colonnes de verdure. « 48 colonnes sont remplies de terre de Berlin et symbolisent l'année 1948, année de fondation d'Israël[7]», tandis que la quarante-neuvième est représentée centralement par un élæagnus prenant vie dans la terre de Jérusalem. Tout comme la végétation est cloisonnée par ces colonnes de béton, le visiteur ne peut sortir de ce jardin sans re-rentrer dans le bâtiment. Illusoire, la liberté n'est qu'imagée, suggérée. Perdant tout repère, le parcours de LIBESKIND renforce l'idée d'un exil forcé de la population juive. [pic 11][pic 12]

Le premier axe, l'axe de la continuité, oriente le corps vers le contenu de l'exposition. Pour tout accès aux expositions, le corps doit faire face à un escalier de quatre-vingt-dix marches. S'imposant tel un mur, LIBESKIND impose à nouveau un effort éprouvant tant visuellement que physiquement. « Cette sensation est appuyée par la lumière naturelle que l’on retrouve après la descente dans le sous-sol et qui inonde cet espace. D’autre part, cette remontée vers la lumière paraît difficile. L'escalier traverse une sorte de faille maintenue entrouverte grâce aux poutres, telle une cicatrice toujours à vif. Cette expérience de remontée vers la lumière incarne l’avancée perpétuelle de la culture juive.[8] » Une avancée symbolisée également par les corps des visiteurs se dirigeant vers le cœur des expositions temporaires et permanentes. Offrant l'accès au second étage, les marches mènent vers le nom symbolique de Mortimer SACKLER, un donateur pour le musée.

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Axe de la continuité au pied de l'escalier / Axe de la continuité - au sommet de l'escalier

Le premier étage et le second sont entièrement dédiés aux expositions temporaires et permanentes retraçant deux mille ans d'histoire germano-juive. La scénographie de ces deux espaces a été quant à elle pensée par le bureau des designers chinois WÜRT et WINDEROLL. Ils divisèrent l'exposition en treize tableaux historiographiques présentés chronologiquement aux visiteurs. Contrairement à l'architecture scénographique de LIBESKIND, la scénographie d'exposition reste conventionnelle. Au travers les 3000m² d'exposition, le corps du public ne reste pour autant pas passif. Certes amené à contempler le contenu de la collection, il est néanmoins sollicité pour une participation à des ateliers interactifs, visuels, audiovisuels, et sonores à l'image de la dernière salle qui présente des biographies juives en Allemagne, en Autriche et en Suisse après l'Holocauste. [pic 15][pic 16]

Les plans sont présentés selon le sens de la visite.

Plan de second étage

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Plan du premier étage

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Alternant avec les espaces d'expositions, les vides sont omniprésents au sein de la structure de Daniel LIBESKIND. Les vides[9] sont souvent suggérés, mais seul l'un des six vides est accessible au public, et reste selon nous l'expérience la plus marquante de ce parcours. L'installation du sculpteur israélien Menashe KADISHMAN résonne tel un cri supplémentaire à travers l'édifice. Nommée "Shalechet" littéralement traduit comme « feuilles mortes », plus de dix mille visages de fer arpentent le sol. L'expression glaciale des visages tournés vers le ciel s'inscrit comme un cri interminable. La neutralité genrée et la diversité des tailles des visages de métal ne cessent de nous rappeler que les massacres de masse ont touché hommes, femmes et enfants, la sexualité et l'âge n'ayant aucune valeur face à la barbarie. La perception de cette installation, par le public, de manière multi-sensorielle la rend d'autant plus éprouvante. Malgré une marche silencieuse, respectueuse, le pas des visiteurs fait inévitablement entrechoquer ces figures d'acier dont l'architecture amplifie l'écho[10]. Des sons métalliques, douloureux, s'échappent ainsi et semblent courir après une mémoire collective comme « le souvenir de toutes les victimes innocentes, celles d'hier mais aussi celles d'aujourd'hui et de demain. [11]»

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Vide de la mémoire - architecture Visages d'acier - Vide de la mémoire

Afin de conclure, la visite du Musée juif de Berlin de Daniel LIBESKIND est un véritable parcours sensoriel. Le rapport à l'histoire juive ne se veut pas uniquement contemplatif mais psychologique et physique, à travers l'expérience du corps.

L'édifice

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