Psychoacoustique du Mantra Om
Par Matt • 4 Septembre 2018 • 2 944 Mots (12 Pages) • 449 Vues
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Ces questionnements soulèvent un point fondamental, développé dans les points suivants de notre étude : cette pratique est personnelle. Cela suscite certes des problématiques vis-à-vis de la rigueur intellectuelle des recherches sur ce thème, mais cela amène aussi à réduire la pratique à son essence même, c'est-à-dire à ce qu'elle est dans sa structure essentielle. Ainsi Ajay Anil Gurjar , Siddharth A. Ladhake et Ajay P. Thakare proposent :
What’s important is to perceive the sound and become one with it, without making “I” and “sound.” At the moment of true perceiving, there is no thought, no separation, only perceiving sound. This is the crucial point. So during chanting time, perceive your own voice and the voice of others, just perceive this bell or drum sound, and cut off all thinking. Then your wisdom will grow, you will get enlightenment, and thus save all beings.[6]
Le vocabulaire et la pratique maintenant définis, il s’agit d’analyser les observations acoustiques et psychoacoustiques.
- Étude acoustique du chant OM
- Propriétés acoustiques d’un son Humming (chant nasal)
La fragmentation de la syllabe OM induit des variations importantes dans le temps au niveau du spectre harmonique. Cependant, peu importe la manière dont on le pratique, c’est la consonne /m qui sera tenue. L’analyse sera donc centrée sur cette dernière. Les deux voyelles /a et /u jouent un rôle presque narratif dans une pratique du mantra : elles sont respectivement un début puis une transition vers le humming (/m) tenu, symbole d’apaisement et de sommeil profond. De plus, comme susmentionné, elles permettent cette sensation de soulèvement puis de chute naturelle. Ce qui pousse particulièrement à l’analyse de la consonne /m est sa résonnance importante dans la cavité nasale. Par conséquent, lors de la production de cette dernière, la bouche reste close tandis que le voile du palais reste ouvert[7] laissant ainsi l’énergie déployée par les cordes vocales résonner dans la cavité nasale[8].
[pic 2][pic 3]
On se retrouve donc avec une grande énergie concentrée dans la cavité nasale et fluctuant très légèrement pour deux raisons : l’asymétrie de la cavité nasale[9] et les modulations de la respiration du pratiquant. La cavité est placée au centre de la tête, on peut supposer alors qu’une grande énergie vibratoire concentrée dans cette partie pourrait engendrer des vibrations sympathiques du crâne par les parois osseuses environnantes. Ainsi, une partie de l’énergie serait dissipée par transmission aérienne au niveau des narines et une autre par transmission solidienne à l’intérieur de la tête. Peut-on voir ici un des arguments justifiant la sensation de bien-être provoquée par le OM ?
- Analyses spectrale et temporelle du chant « OM »
Dans la littérature scientifique sur le sujet, certaines analyses et mesures acoustiques sont effectuées sur des hommes et de femmes, d’autres uniquement sur des hommes, enfin certaines ne différencient pas les sexes pour effectuer des moyennes de données. La plupart du temps les sexes ne sont même pas différenciés dans la conclusion. Toutefois, les résultats ne correspondent pas dans l’absolu en termes de données chiffrées, la fondamentale du OM sera plus basse chez un homme que chez une femme : [10]
[pic 4]
En haut : OM féminin
En bas : OM masculin
Les rapports semblent néanmoins rester les mêmes, il y a proportionnanilté. Par exemple, une femme produira un OM généralement plus aigu, mais la fréquence du chant importe finalement peu (tant qu’il est relativement grave[11]), les rapports entre les harmoniques restes inchangés. Ainsi, les analyses sélectionnées ici seront toutes des analyses de pratiquants masculins du OM afin d’être sur de la cohérence des étapes de réflexion. Les résultats voulus n’étant pas quantitatifs, mais relevant plutôt du raisonnement et du processus de réflexion, ils pourront être appliqués par la suite à n’importe quel être humain.
Voici une analyse temporelle du OM : [12][pic 5]
On remarque bien l’idée de hausse puis de chute qui mènent à l’apaisement proposée par Ajay Anil Gurjar et al.[13], avec cette stabilisation sur la consonne /m. Voici d’ailleurs une deuxième analyse temporelle, proposée par Heisnam, J.D et al., axée sur la syllabe /m : [14]
[pic 6]
Les remarques importantes portent sur la stabilité et la pureté de l’échantillon : la forme d’onde est simple et semble très périodique, c’est un OM idéal. Une pratique assidue du OM offre un gain de stabilité. Cette étude menée en 2008 présente des formes d’ondes de OM chez un débutant, puis chez cette même personne après quelques jours de pratique[15].
[pic 7]
Dans son ouvrage The Roar of Silence : Healing Powers of Breath, Tone & Music.[16], Don G. Campell parle d’« accordage du corps »[17] pour qualifier ce phénomène. Il y a donc une progression vers la stabilité chez un pratiquant débutant du OM. On peut penser que cette stabilité dépend donc de deux paramètres : les variations de hauteur et d’intensité (de préférence les plus faibles possible) et la juste résonance qui accorde les harmoniques du chant aux formants caractéristiques de la cavité nasale. Ainsi, puisque chacun adapte son OM à son corps en pratiquant, on peut penser que le chant n’a pas de fréquence propre précise, mais un intervalle, plutôt grave, dans lequel chacun trouvera le chant qui lui est adapté.
Voici d’ailleurs une analyse spectrale réalisée avec une moyenne (deux pratiquants masculins différents) : [18]
[pic 8]
Au-delà du fait qu’il aurait été judicieux d’effectuer une moyenne sur un plus grand nombre de participants et de préciser leur niveau d’expérience en méditation chantée, nous pouvons confirmer certains éléments supposés préalablement. Le pic d’énergie situé aux alentours de 200Hz est un formant caractéristique de la cavité nasale, et on peut voir qu’il correspond au premier harmonique du spectre. Ainsi, l’« accordage » du corps passerait par la prise de conscience de cette résonance, afin de produire un chant dont la fondamentale est
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